Patches

Dj/rupture & Andy Moor

Unsuitable – 2009
par Simon, le 17 mars 2009
8

S’il y en a deux qu’on ne présente plus, c’est bien ceux-là : Dj /rupture, magicien émérite de mash-up allumés, qui nous avait particulièrement séduits avec sa dernière sélection mixée (Uproot) ; et le Néerlandais Andy Moor, guitariste attitré des excellents The Ex, qui avait fait parler la poudre en 2008 aux côtés d’Anne James Chaton pour une session de slam expérimental de haute volée. L’annonce d’une collaboration entre ces deux chantres de l’aventure musicale avait donc de quoi étonner. Sûr qu’au final, l’excitation aurait été récompensée par un disque aussi audacieux que décalé.

Plutôt que de figer une collaboration aussi prometteuse dans des enregistrements studio classiques, nos deux compères ont eu la merveilleuse idée de poser sur disque une série de prestations live, point de rencontre idéal pour ces deux personnalités aux sens de l’improvisation exacerbé. D’un côté, l’homme aux platines, jonglant de manière lubrique avec ses vinyles comme il transgresse sans vergogne les genres : dubstep, hip-hop, ambient, soul. A ses côtés, l’intenable guitariste Moor, malmenant sa guitare affûtée comme un rasoir, tranche avec une précision millimétrée les gimmicks world music/electronica/dubstep/noise assénés sans relâche par Dj/rupture. Mais Patches est avant tout une collaboration symétrique à tout point de vue. Constamment balancé entre les beats urbains et terriblement référencés du New-Yorkais (Skream, Bass Clef, Ghislain Poirier mais aussi Tracy Chapman ou encore Diana Ross) et les assauts électriques d’Andy Moor, ces seize titres déclinent des univers exclusifs ou tout est mélange, choc et expérience des genres. Tantôt basées sur la guitare sanguinolente du Néerlandais, tantôt axées sur les mash-up fous de Dj/rupture, c’est finalement au moment où ces improvisations s’entremêlent avec fracas que la magie opère réellement, que l’évolution arrive à un paroxysme totalement jouissif de complémentarité. 

L’organique offre ses contours à l’électronique, et celui-ci donne de la lumière à l’organique. Au final, un disque rempli à ras bord de curiosités intrigantes, de fouilles fructueuses et d’osmose permanente. Finalement, les deux noms gravés sur le disque auraient dû suffire à nous faire imaginer la suite, consacrant toute l’inventivité qui ne cesse d’habiter ces deux personnalités disque après disque. Je vous conseille vivement de vous pencher sur cette plaque essentielle, persuadé au fond de moi que nos deux lascars feront encore parler d’eux avant la fin de l’année.