Concert

Pitchfork Music Festival Paris 2012

Grande Halle de La Villette, Paris, le 1 novembre 2012
par Maxime, le 6 novembre 2012

Ce week-end à Paris, la bible indie des temps modernes qu'est Pitchfork organisait sur trois jours la seconde édition de la version française de son festival à la Grande Halle de la Villette. Un rendez-vous que la rédaction de GMD ne pouvait pas manquer. Compte-rendu non exhaustif et rempli de partis pris.

Le festival en résumé :

Bon, on ne va pas vous le cacher, ce n'était pas le festival de l'année, loin de là : le lineup a priori alléchant s'est révélé décevant dans les faits. Heureusement, quelques moments de grâce ont justifié le déplacement.

Pour la faire courte, on a vécu :

- un premier jour où on s'est un peu demandés ce qu'on foutait là;
- un deuxième lors duquel on a fait nos groupies en se faisant dédicacer un CD des Walkmen (et ouais);
- un dernier qui a failli faire pschitt mais qui a été sauvé par la magnifique performance de Grizzly Bear.

Le top du bien :

Le festival n'a heureusement pour nos oreilles pas été indigent de bout en bout. La crème de la crème :

1 - Grizzly Bear

23h le dernier jour. Pour tout dire, on n'attendait plus grand chose du festival en se disant que les 130 euros de billet avaient un peu fait mal, et on est restés plus par curiosité qu'autre chose pour écouter les petits gars de Brooklyn vu que de toute façon ça ne pouvait pas encore plomber plus le niveau général. Et là, c'est la claque à coup de mélodies sublimes, d'un rock précis parsemé d'arrangements cristallins, pour le set le plus long de la soirée. Ne boudons pas notre plaisir : on a kiffé.

2 - The Walkmen

Ces gars-là étaient décidément trop classes pour le festival. Même un peu moins en forme que lors de leur incroyable prestation de la Route du Rock cet été (trois rappels!), ils ont quand même largement surclassé le reste de la programmation, tant par leur formidable énergie que par leur setlist alternant classiques ("The Rat", "All Hands & The Cook") et tueries plus récentes ("Heaven", "The Love You Love"), portés par la voix toujours époustouflante d'Hamilton Leithauser.

3 - Liars

Un brin trop noisy, les Liars sont néanmoins parvenus à tirer la substantifique moelle de leur dernier opus, Wixiw, pour livrer un set serré et énergique ("N°1 Against The Rush", une bombe en live), puisant également dans leur répertoire plus ancien des morceaux aux rythmes bien tribaux pour retourner les tripes du public. Objectif atteint !

Le top de la loose :

Difficile de choisir tant les prestations médiocres se sont succédées. Ceci étant, on a quand même réussi à dresser un petit top 3:

1 - Sébastien Tellier

Mais comment ce mec peut se retrouver en quasi tête d'affiche du premier jour? Son dernier disque boursoufflé ne laissait même pas présager l'indigence d'un spectacle lourdingue, ponctué d'interventions malvenues tournées vers sa petite personne à l'égo surdimensionné. À oublier très très vite.

2 - James Blake

Jouant juste avant Tellier, James Blake a été LA déception du premier jour. Alors que sur disque son dubstep mâtiné de soul donne parfois lieu à des choses intéressantes, même s'il donne parfois dans la facilité, le Londonien a livré à Paris un show brouillon, noyant ses mélodies dans une soupe électronique indigeste et bruyante, gommant toute la sensibilité qu'on avait cru déceler dans ses premiers EP.

3 - Robyn

Certains à la rédaction de GMD (en ce compris votre serviteur) n'ont jamais compris ce que Pitchfork trouvait à cette Rihanna indie pour blanc-becs. Toujours est-il qu'elle a fait ce qu'elle sait faire de mieux : bouger son cul et mouliner des bras sur des gros beats électros en faisant exploser le compteur à "fuck" par morceaux. Pour le coup on n'en attendait pas grand chose et effectivement c'était nul.

Mention spéciale du meilleur espoir :

Elle est décernée sans l'ombre d'un doute à l'Espagnol John Talabot, qui avait surpris avec son premier opus d'électro hantée Fin en début d'année et en livre sur scène une version réussie, parfois un peu répétitive, mais qui laisse présager de grandes choses. Affaire à suivre donc.

Mention de la surprise réussie :

Le duo Chairlift étant retenu à NY pour cause d'ouragan, ils ont été remplacés au pied levé par les petits frenchies de François and The Atlas Mountain. Et bah, on s'y attendait pas mais c'était bien sympa, pas énergique mais planant et suffisamment envoûtant pour qu'on se replonge dans leur récent E Volo Love à côté duquel on était un peu passés.

Le reste de l'affiche en bref :

Pas de concerts impérissables mais pas non plus de gros foirage pour M83, Wild Nothing ou encore The Tallest Man On Earth qui ont fait le job. On évitera par contre de trop mentionner les gentils Breton plein de bonne volonté et d'énergie sur scène mais qui jouent de la soupe; on oubliera les Chromatics, pourtant excellents sur CD, et leur habituel set désincarné (même leur reprise de Neil Young est bâclée); et promis, on ne parlera plus jamais de Death Grips et de leur hip-hop emo-hardcore de seconde zone (ce dernier avis n'est pas forcément partagé par le reste de la rédaction, on le précise).

L'ambiance, le public et le reste :

Globalement, l'affiche était variée d'un point de vue des styles, mais très concentrée autour de groupes "récents", des années 2000 à aujourd'hui. Pas de grand ancien à la The Cure ou Dylan qui ont pourtant fait des festivals cette année, pas de ponte de l'électronique comme Aphex Twin l'an dernier, et c'est dommage que Pitchfork ait fait le choix de se focaliser sur un grand résumé des groupes hype qui ont fait l'histoire du site, donnant un peu l'impression de tourner en rond.

Au vu du lineup, on s'était d'ailleurs un peu préparés à croiser de la chemise de bûcheron ce week-end, mais pour le coup on était bien loin du compte: le tout Paris bobo et le tout Londres hipster étaient présents, à tel point qu'on a cru l'espace d'un instant que le trio barbe/chemise à carreaux/bonnet en laine était le dress code officiel. Et on a carrément eu l'impression que tous ces jeunes gens bien propres sur eux étaient ici justement car c'était the place to be et pas vraiment pour la musique.

Conséquences directes : applaudissements peu nourris et foules loin d'être en délire (le niveau médiocre de nombre de concerts a sûrement aussi un peu aidé), évidemment pas de classique pogo endiablé dans la poussière/dans la boue (il faut dire qu'en intérieur c'est plus dur, mais bon bref pas de pogo tout court, sauf peut-être pour Fuck Buttons), et des pompiers qui se font chier comme jamais (pas un seul malaise, à peine un vomi vu en trois jours, et encore un tout petit).

On ne s'attardera pas non plus pour ne pas s'énerver sur le système de jetons sans lesquels on ne peut rien acheter dans toute l'enceinte du festival, vendus par plaquette de dix à un prix prohibitif étant donné le coût initial des places. En résumé, un festival safe and clean, à l'image de ce qu'est devenu le site qui l'organise. C'est pas dit qu'on soit au rendez-vous l'an prochain.