The Last Memories of My Old House

Zak Laughed

3eme Bureau – 2009
par Jeff, le 27 août 2009
7

Bizarrement, là où les mondes de la pop et de la variété ont toujours été à la recherche de talents particulièrement précoces, le monde du rock s’est quant à lui toujours méfié de ces gamins un peu trop pressés de jouer dans la cour des grands – et le phénomène Hanson n’a évidemment pas aidé à inverser cette tendance. Ainsi, un groupe comme les bruyants Tiny Masters of Today, dont ses membres sont nés en 1994 et 1996, récolte dans le meilleur des cas discrètes félicitations et polis encouragements, et ce malgré des collaborations avec la féline Karen O des Yeah Yeah Yeahs ou les louanges d'un dénommé David Bowie - dont une posture similaire a par la passé donné un sacré coup de pouce à certaines carrières, à commencer par celle de Placebo. Aussi, on se demande bien quel va être le sort réservé par la presse à Zak Laughed, tête blonde d'une quinzaine d'années à tout casser  dont le pseudonyme est en fait traduction phonétique de son prénom Zachary, et qui débarque sur le label 3ème Bureau avec un premier album empreint d’un talent certain et d’une indéniable maturité.

Auteur, compositeur et interprète, Zak Laughed va probablement sidérer autant qu'il va exaspérer. Mais là où il était facile de s'en prendre aux Naast ou aux Shades en raison d’une certaine condescendance qu’on mettra sur le compte d’une jeunesse un peu trop dorée, Zak Laughed débarque sur la pointe des pieds et avec beaucoup d'humilité. Par ailleurs, quant on connaît l’affection, voire l’admiration, que porte une certaine frange de nos lecteurs à ces chanteuses aux voix fluettes et enfantines (Joanna Newsom et Cocorosie en tête), comment ne pourrait-elle pas se laisser séduire par la douce voix d’un gamin n’ayant pas encore mué et qui ressemble parfois à s’y méprendre à celle d’une Kymia Dawson

Et si « Each Day », le premier single du garçon, pourrait laisser penser qu’il aime jouer la carte de la facilité, le reste du disque nous prouve avec beaucoup de finesse qu'il a rapidement assimilé les codes du milieu folk/anti folk qui le passionne tant et que ses compositions ne sont pas arrivées jusqu’à nous par la seule opération du Saint-Esprit. Qu’il s’agisse de tendres et innocentes ballades comme « Emily » ou « December Song », de folk déprimant à la Eels sur « Travelling Cat » ou d’escapades countrysantes telles « Ballad of Celestial Railroad»,  The Last Memories of My Old House témoigne d’une sacrée dose de talent, magnifié et optimisé par un réseau de contacts bienveillants (Cocoon, The Edelberries, Coming Soon, le label Kutu Folk).

Certes, l’ensemble est parfois un peu trop de naïf, et ce premier album aurait pu peut-être afficher quelques titres de moins au compteur, mais il n’en reste pas moins que The Last Memories of My Old House est un album magnifiquement écrit, joliment produit et finement arrangé. Sa bio le dit très bien, il serait injuste de ne voir en Zak Laughed qu'un fan accompli, là où sent déjà poindre les premiers signes de l’artiste à part entière. Puis il sera toujours temps de réévaluer la situation après la mue... En attendant, on profite en se disant qu’à 15 ans, on aurait bien aimé avoir le bagage musical d'un Zak Laughed...