Guy

Jayda G

Ninja Tune – 2023
par Jeff, le 19 juillet 2023
7

Du Primavera à Glastonbury en passant par Ibiza, l’agenda de Jayda G est bien chargé et nos timelines sont inondées d’instantanés qui montrent la Canadienne en train de vivre ce qui ressemble fort à sa meilleure vie derrière une paire de CDJ.

Et c’est amplement mérité : dans les petits papiers de tous les bookers du globe depuis une Boiler Room à l’édition 2017 du Dekmantel, Jayda G n’en finit plus de briller. Ce qui est plus problématique, c’est que son deuxième album sort en pleine saison des festivals, et la Canadienne ne semble pas faire de sa promotion un enjeu majeur de son exercice 2023. Une partie de la réponse, on la trouve peut-être après un rapide coup d’œil sur le nombre de streams de son précédent album sorti en 2019: une centaine de milliers d’écoute par titre, ce qui ne pèse pas bien lourd quand ton calendrier se remplit plus vite que la vessie de Jean Lassale à l’heure de l’apéro et que les cachets qu’exige le cerbère qui te sert d’agent se terminent très certainement par quatre zéros.

Mais tandis que Peggy Gou est en train de réaliser le hold up de l’été avec « (It Goes Like) Nanana », le défaut de visibilité dont souffre ce Guy est déplorable, tant ce disque propose tout ce qui manque au tube de la dj et productrice coréenne pour être autre chose qu’une plaisir éphémère : un petit supplément d’âme et une capacité à charmer nos guiboles sans donner l’impression de n’y arriver qu’en respectant un cahier des charges par trop rigoureux.

Tirant probablement les leçons d’un premier long format malhabile et creux, Jayda Guy reproduit l’approche privilégiée sur « Both of Us » et « All I Need », deux singles dont on se dit aujourd’hui qui étaient en fait des ballons d’essai : ceux-ci ont permis d’affiner la DA d’un disque qui, à l’image de ses dj sets, emprunte à la house, au disco, à la pop ou au boogie, avec une générosité et une sincérité qui se ressentent immédiatement - difficile de résister à l’enchaînement « Meant to Be » / « Circle Back Around », le premier ressemblant à un énorme clin d’œil à Moodymann, et le second portant le griffe de son producteur Jack Peñate, qui se rappelle à notre bon souvenir après avoir été dévoré par un succès trop rapide à la fin des années 2000.

La fraîcheur qui se dégage de ces 36 minutes de B.O. de canicule est d’autant plus remarquable que ce disque, Jayda G le construit autour d’extraits sonores enregistrés par son père avant de mourir, quand elle n’avait que 10 ans. Et ce qui aurait pu être un concept un peu fumeux donne un stroytelling agréable et pertinent à Guy. Par ailleurs, et c’est peut-être le plus important, Jayda G commence à s’assumer en tant que chanteuse. Certes, on ne tient pas encore la nouvelle Róisín Murphy ou la prochaine Jessie Ware (deux artistes avec lesquelles on la verrait bien bosser, tiens), mais elle s’affirme déjà comme un artiste qui, si elle se consacre à ce volet de sa carrière avec le soin qu’elle accorde à ses DJ sets, pourrait nous réserver encore de bien belles surprises.