Dynamite Steps

The Twilight Singers

Sub Pop – 2011
par Jeff, le 9 mars 2011
7

Greg Dulli et ses Afghan Whigs figurent parmi les groupes les plus passionnants du rock alternatif américain des années 90, une formation clairement sous-estimée et dont le succès aurait pu être massif si elle était apparue aujourd'hui – non pas parce qu'elle répond aux attentes d'une quelconque génération Internet, mais tout simplement parce qu'un personnage aussi sombre et auto-destructeur que Greg Dulli aurait a lui seul pu faire l'objet d'un buzz en bonne et due forme. D'ailleurs, la page Wikipédia du groupe débute judicieusement par une citation du magazine PopMatters: "Beyond simple genre categorization, and though lauded by the music press, [the Afghan Whigs] never got their just due." Tout est ici dit et on ne va pas s'appesantir sur le triste sort du groupe de Cincinnati, disparu en 2001. On ne jouera pas non plus les moralisateurs, puisque le rédacteur de ces lignes avait depuis lors pris ses distances avec le groupe, ignorant les nouvelles réalisations de Greg Dulli, que ce soit avec Mark Lanegan sous la bannière The Gutter Twins ou entouré d'un groupe à géométrie variable au sein des Twilight Singers. Un rédacteur qui, après plusieurs écoutes de Dynamite Steps, ne peut s'empêcher de battre sa coulpe.

Parmi les trop rares groupes de rock à avoir pleinement assumé l'influence de la musique noire américaine à une époque où les genres étaient autrement plus cloisonnés, les Afghan Whigs mariaient à la perfection post-punk, soul et R&B, enrobant le tout d'un épais voile de noirceur tissé par un Greg Dulli n'ayant pas son pareil pour conter des histoires glauques à souhait. A l'écoute de ce cinquième album (déjà!) des Twilight Singers, on comprend que hormis le nom du véhicule de ces idées noires, rien n'a vraiment changé pour papa Dulli et ce, même si le poids des années a fait son oeuvre et rend l'ensemble parfois un peu moins abrasif et vicelard que par le passé. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'a pas pensé à une parade. Bien au contraire. Le travail sur la voix est plus efficace et maîtrisé que jamais, la production se donne à l'occasion des airs de modernité et l'art de la montée en puissance - qui était déjà l'une des marques de fabrique des Afghan Whigs - est ici poussé à son paroxysme sur quelques uns des meilleurs titres du disque, à commencer par « Last Night In Town » ou « On The Corner ». Album enchaînant les décharge émotionnelles à forte valeur libératrice, Dynamite Steps ne sera pas vraiment une surprise pour celles et ceux qui suivent fidèlement Greg Dulli depuis les années 90. Quant à ceux qui avaient abandonné le songwriter au bord de la route, le moment est idéal pour rebrousser chemin et lui offrir une seconde chance bien méritée...