Acid Arab

Acid Arab

Versatile  – 2013
par Bastien, le 21 novembre 2013
7

Mine de rien fusionner des musiques qui évoluent aux antipodes l'une de l'autre est un exercice particulièrement casse-gueule. En général, l'ADN de certains genres sont tellement antithétiques qu'ils donnent naissance à d'affreuses chimères. Pensons à l'electro-jazz et passons vite à autre chose. Autre écueil à éviter: la réduction à de vagues clichés d'un genre ou l'autre. Et pourtant, dans ce royaume où les fausses couches musicales sont légion, le duo parisien Acid Arab (aidé de quelques autres artistes) a réussi le tour de force de faire le lien entre le bédouin du Hedjaz et le clubber européen. Sans jamais singer la musique « orientale », les différents protagonistes de la compilation ont réussi à parfaitement intégrer à la musique électronique des éléments traditionnels comme la darbouka, le riqq ou le rebec. En d'autres termes, le tam tam, le tambourin et le violon à la sauce harissa. Les rythmiques acid de la house et de la techno se fondent comme un sucre dans du thé à la menthe. Et doucement mais sûrement, on voit alors défiler des images d'Orient devant nos yeux. Il est à parier qu'à la fin du disque vous ayez envie d'aller chasser avec un faucon, faire la danse des sabres ou rejoindre des membres de l'ASL à Homs.

Au total, ce sont treize artistes différents qui se relaient pour servir des loukoums à vos oreilles. En ce sens, l'introduction fournie par Rikslyd permet de se mettre dans le bain: des rebecs, des kicks tech-house et des effets acid à n'en plus finir. Cette entame à peine digérée, on passe par la case remix avec Crackboy qui sublime la voix notre moustachu préféré, j'ai nommé Omar Souleyman. Le chanteur syrien semble avoir ingurgité une grosse dose de codéine, et on ne boude pas notre plaisir d'y voir ajouté une montée plus acid que des renvois de lendemain de cuite. Autre morceau qui a retenu notre attention, "The Wizzard Edit" de Pilooski avec du rebecs à foison, quelques cuts bien placés et un esprit résolument transe pour fournir une des pépites de la compilation. Passons désormais au plat de résistance. Et c'est l'un des pensionnaires de la série Goûte Mes Mix qui nous offrent un « dabké diabolique » selon les mots d'Acid Arab. Ce producteur n'est autre que Renart, déjà rôdé dans ce style puisqu'il avait livré récemment un remix de première bourre du "Atabat" d'Omar Souleyman il y a peu. Les hôtes de ce projet ne sont pas en reste puisqu'ils se fendent de "Berberian Weddings" et "Samira". Morceaux plus calmes mais non moins efficaces avec voix et sonorités cosmiques pour l'un et l'autre. Ces instants bédouins se terminent sur une belle pièce avec de la house nourries aux percussions, un titre signé Mattia - qui n'est autre que le frère de Joakim. Histoire de mettre un léger bémol, on précisera que certains morceaux semblent un peu trop éloignés de l'esprit « bédouin on the dancefloor ». On s'en accommodera quand même. Avec cette compilation, Acid Arab nous offre un joli manifeste d'acid jihad. Et on espère très fort que ce style perdura et sera relayé par nos copains yéménites d'Inspire.

Le goût des autres :