Sun Coming Down

Ought

Constellation – 2015
par Michael, le 22 septembre 2015
8

Pour avoir vu les Canadiens dans une petite salle avant leur passage au Primavera, on ne se faisait pas trop de soucis pour ce deuxième album. Ce soir-là, le groupe en a profité pour tester quelques titres de son Sun Coming Down, comme le très bon « Beautiful Blue Sky ». Autant dire que la qualité de ces nouvelles compositions nous confirmait que les jeunes poulains de chez Constellation en avaient encore passablement sous le capot.

Par contre, on ne pouvait bien entendu pas anticiper les choix de production du prochain effort du groupe. Sur More Than Any Other Day, l’option enregistrement live avait parfaitement fonctionné. Le risque était donc de tenter quelque chose de plus produit et de perdre une spontanéité et une énergie qui faisaient largement l’intérêt de la formation post-punk de Montréal.

Toujours enregistré sous la houlette de Radwan Ghazi Moumneh au légendaire Hotel2Tango de Montreal, on constate d’entrée une évolution dans la continuité. Toujours très peu d’overdubs, un enregistrement que l’on devine comme ayant ici aussi privilégié les prises live, mais un placement sonore tout de même légèrement différent. On pourrait dire que ça tranche un peu plus que sur le premier LP et que, surtout, le groupe a condensé (ou du moins densifié) son propos. Il y a toujours ces digressions soniques et parfois bruitistes mais elles sont plus ramassées, Ought privilégiant ici l’uppercut aux entrées en matière ou aux fins de morceaux plus lentes et progressives. Les quatre jeunes gens semblent avoir trouvé une cohésion et une assurance qui se retrouvent dans les titres de Sun Coming Down. Les Canadiens jouent quasiment tout le temps ensemble, avec peu de passages guitare/claviers comme auparavant.

Même si comme son prédécesseur cet album propose huit titres pour sensiblement la même durée, les morceaux se détachent mieux. On a l’impression d’une vraie suite, alors que le premier LP misait davantage sur un effet de continuum sonore. Ought réussi donc parfaitement la passe de deux en confirmant une formule qui lui sied parfaitement. Au tableau des belles réussites on notera notamment le doublé parfait « Sun’s Coming Down »/ « Beautiful Sky » et le plus tranquille « Passionate Turn », trois titres où les paroles de Tim Darcy trouvent une résonnance parfaite dans un existentialisme rageur et un refus de l’absurdité aliénante du quotidien.

C’est peut-être ce qui résume le mieux la musique des Canadiens : une quête. Un groupe qui cherche, qui expérimente, sans avoir la prétention de révolutionner quoi que ce soit si ce n’est repousser ses propres limites. Le tout armé d’une force et d’une foi qui les porte pour l’instant au-dessus d’une masse de concurrents potentiels à qui il manque ce je ne sais quoi de grâce et de classe qui fait toute la différence. Le post-punk n’aura jamais été autant dans l’air du temps depuis 1980.