Post War

M. Ward

4AD – 2006
par Jeff, le 16 novembre 2006
9

Un an seulement après nous avoir ensorcelés avec son magnifique Transistor Radio, M. Ward revient à la charge. Quoique, dans le cas du songwriter américain, une telle expression semble totalement inappropriée. Car une fois encore, c'est dans une relative discrétion que l'artiste se rappelle à notre excellent souvenir avec un album s'inscrivant dans la droite lignée de son prédécesseur, et ce même si pour la première fois de sa carrière l'artiste a délaissé le confort de son 'home sweet home' pour enregistrer en studio avec l'entièreté de son groupe ce nouvel album qui sort sur 4AD - et non plus sur Matador.

Mais malgré une méthode de travail inédite, le constat reste heureusement le même, toujours aussi flagrant: M. Ward est bien l'un des songwriters les plus doués et les plus injustement ignorés de sa génération. D'ailleurs il n'y a qu'à regarder ses invités pour avoir une nouvelle preuve du succès d'estime dont il bénéficie: Neko Case, Jim James (My Morning Jacket), le producteur Mike Mogis ou Rachel Blumberg (The Decemberists) ont tous tenu à participer à ce Post-War magnifique entièrement produit par son géniteur.

Fingerpicking parfaitement maîtrisé, voix envoûtante et légèrement fatiguée ou capacité sidérante à accoucher de mélodies plus prenantes que surprenantes sont autant de qualités qui m'obligent à adouber cet artiste âgé d'une trentaine d'années à peine. Une fois encore, on s'incline devant les 12 titres de Post-War qui, de par leur plaisante diversité, en font à coup sûr l'un des tous bons albums de cette année 2006.

Certes, la formule M. Ward commence à être connue (une écriture folk faussement passéiste lui permettant de se réapproprier des joyaux d'antan), mais comment ne pas succomber à chaque fois devant une telle maîtrise. Qu'il s'agisse de titres tout simplement déchirants ("Poison Cup", la ballade d'ouverture est un modèle du genre), de ballades attachantes ("Chinese Translation"), d'une reprise classieuse (après une version "fingerpickée" des Beach Boys, c'est au tour du "To Go Home" de Daniel Johnston de subir les joies de la réécriture), d'un gospel bâtard ("Magic Trick"), de surf-rock débraillé ("Neptune's Net") ou de titres plus enlevés ("Right in the Head"), M. Ward touche à tous les coups notre corde sensible avec une précision chirurgicale.

Avec Post-War, Matt Ward continue avec cette retenue qui lui sied si bien et dans un mode "sépia" son inéluctable ascension vers les sommets de la musique alternative américaine en s'imposant au passage comme l'un des plus prisés vendeurs d'émotions qu'il vous sera donné de côtoyer cette année.

Le goût des autres :
8 Nicolas