Our Love to Admire

Interpol

Capitol – 2007
par Splinter, le 16 juillet 2007
7

Troisième album pour les Américains d'Interpol, Our Love to Admire marque une nouvelle étape dans la carrière du groupe. Pour la première fois, en effet, le disque sort sur le label d'une major, Capitol, et bénéficie d'une promotion d'envergure à base notamment de stickers collés un peu partout dans Paris. Charmant. Pour la première fois aussi, le groupe se décide à délaisser l'esthétique noire et rouge de ses précédents opus, Turn on the Bright Lights (2002) et Antics (2004), au profit d'une fresque animalière assez déroutante, à base de fauves empaillés, et, pour tout dire, d'un goût assez douteux.

Pourtant, malgré ces changements et ravalements de façade, il est toujours aussi difficile de distinguer un album d'Interpol… d'un autre album d'Interpol. Qu'on nous comprenne bien : les deux précédents opus de Paul Banks & Co. sont franchement excellents et il en va de même d'ailleurs pour le Black EP, composé principalement de démos et d'extraits live. Les ambiances sombres que parvient à distiller le groupe, les riffs glaciaux qui font tant penser à Joy Division, ont réussi à capter une audience de plus en plus importante et ce de manière tout à fait méritée, grâce en particulier à de véritables tubes tels que "NYC", "Evil", "Narc" ou encore l'excellente "Slow Hands".

Cela dit, on a malheureusement l'impression persistante que le tout vire un peu à la recette facile : chaque morceau est construit de la même façon, sur un riff de guitare tranchant, quasiment toujours le même, au point qu'on pourrait s'amuser à repérer les titres jumeaux. La voix de Banks, si caractéristique, ce chant froid et distant, n'est que rarement modulé. La basse, toujours très mise en avant, donne l'impression de toujours jouer la même partition. Et ce n'est pas l'introduction de synthétiseurs sur ce nouvel album qui vient bousculer la donne.

Attention : Our Love to Admire, quoi que très semblable à ses prédécesseurs, n'en est pas pour autant un mauvais album. Car, le coup de gueule passé, force est de constater que les ptits gars d'Interpol possèdent de réelles qualités d'écriture. Le morceau d'ouverture, par exemple, "Pioneer to the Falls", est une pure merveille mélodique, fondée sur une progression émotionnelle assez fantastique, jusqu'au couplet fatidique : But here comes the fall, qui vous emmène dans sa chute, sans filet, sans parachute. Le premier single, "The Heinrich Maneuver", est excellent lui aussi, si typique d'Interpol, certes, mais parvient presque à égaler un titre comme "Evil" sur l'album précédent. Mention spéciale à "Fired Up" et "Rest my Chemistry", plutôt entraînantes.

Du déjà entendu, mille fois, donc, mais de l'efficace, somme toute. Et on peut noter un léger effort de renouvellement sur les deux derniers morceaux, en particulier "The Lighthouse", très lente, très belle aussi, qui pourrait éventuellement marquer le début d'une évolution.

Au final, moins bon qu'Antics, déjà lui-même moins bon que Turn on the Bright Lights, ce nouvel album s'avère globalement acceptable, surtout au vu de la production actuelle des groupes dont Interpol a entraîné la naissance, Editors en tête, mais ne parvient pas à dissiper un sentiment de déception assez tenace dû sans doute à une énorme flemmardise de la part des New-Yorkais, ambitieux mais pas suffisamment pour accoucher d'un album qui mettrait tout le monde à genoux. Gageons néanmoins que cette baisse régulière de la qualité musicale se doublera à nouveau d'une progression inversement proportionnelle de la base de fans. La preuve, le groupe joue dans des salles de plus en plus grandes. Et si c'était là le problème ?

Le goût des autres :
4 Jeff 8 Romain 6 Popop 6 Laurent