Aerotropolis

Ikonika

Hyperdub – 2013
par Simon, le 21 août 2013
7

Quoiqu’on en pense, la destinée de Hyperdub semble tout de même assez folle. Certains diront que même dans ses débuts strictement dubstep/garage, le label avait cette culture de la différence. Mais avouons que croiser des disques comme ceux de Laurel Halo (magnifique exploit que d’avoir su placer un disque horrible dans la plupart des tops de fin d’année) sur la structure parait étrange, ou au moins symptomatique d’une certaine culture de l’embrouille, du talent et (parfois) de l’arnaque joliment dissimulée. Un label qui multiplie les pistes, dont les EP’s sont toujours de nouvelles opportunités pour élargir son catalogue dans une entreprise qui sonne finalement comme cohérente au beau milieu d’un grand bordel. Preuve même que cet éclatement n’en finira jamais (et qu’il ne date pas d’hier), le retour sur long format de la charmante Ikonika. Deuxième disque, deuxième mise à l’épreuve pour tous ceux qui se plaisent encore à concevoir la bass music comme un modèle unique.

Si on a désormais l’habitude de ne plus s’attendre à rien de précis au moment de saisir la prochaine sortie du label mené par Kode9, on doit avouer qu’on attendait peut-être de Sara Abdel-Hamid qu’elle nous ponde un point de repère, un phare two-step auquel on aurait pu encore se raccrocher en pleine tempête. On peut bien aller se faire foutre pour le coup. Si Contact, Love, Want, Have était un disque brillant, il reste qu’il avait pas mal fracassé notre vision statique de ce que pouvait encore être le dubstep d’époque. Toujours est-il que ce disque possédait une réelle assise two-step, un héritage sur lequel elle n’était pas encore prête à s’asseoir totalement. Avec Aerotropolis, Ikonika file droit dans les années 80’s, dans la freestyle house et dans les reliquats electro-funk. Un disque qui laisse entrer le soleil de toute part, et qui en serait presque outrancier de bonheur. Une écriture simple, parfois pop, qui privilégie le plaisir immédiat plutôt que la grosse prise de tête. Aerotropolis regorge moins de sonorités 8-bit, mais possède toujours une dimension ludique qu’on entrevoit dans un travail de synthèse sur les ambiances, sur la manière d’amener claviers et kicks dans des structures évidentes.

Que reste-t-il donc dès lors des instincts bass music ? Une sorte de lame de fond, devenue aujourd’hui presque imperceptible (sauf dans les quatre derniers titres, imparables cela dit), qui grossit parfois les basses, qui rappelle lointainement des souvenirs d’une Angleterre aux grosses couilles. Mais rien de définitif. Hyperdub tient donc son nouveau jouet, qui parvient magnifiquement à jouer avec nos références sans donner trop de réponses à nos questions. Il s’agira de fermer nos gueules, et de savourer cet hybride estival comme la chose bizarre qu’il est. Comme on le fait d’ailleurs depuis 2004 avec ce foutu label de génie.