Ty Segall

Ty Segall

Drag City  – 2017
par Pierre, le 6 mars 2017
6

Difficile de remettre en question Ty Segall, tant l’homme est (à raison) adulé par un public s’étendant bien au-delà des sphères souterraines du rock garage. S’adressant aussi bien aux néophytes qu’aux connaisseurs, le Californien est parvenu à démocratiser un style peu avenant de prime abord en développant une esthétique toute personnelle et totalement fédératrice.

Du coup, il ne faut pas s’étonner si la tendance est à la dithyrambe, lui qui est devenu une sorte de label de qualité dont bénéficient tous ses acolytes et compagnons de jeu gravitant autour de sa personne. Bref, oser s'en prendre à Ty Segall relève presque du suicide et nécessite de prendre un maximum de pincettes, voire de sortir la vaseline. Pourtant, après mûre réflexion et un paquet d’écoutes de son neuvième album solo, il était temps de montrer un peu les crocs.

Paradoxalement, ce Ty Segall ne nous est pas apparu intrinsèquement mauvais ou déloyal - d’où la nécessité d’une certaine prise de recul à l’heure d’exprimer nos réserves. Le problème en réalité, c’est que les dix titres ici présents prennent le pari de la sécurité au détriment de celui de l’audace et aboutissent de ce fait à un album franchement prévisible. Sauf qu’après avoir poncé l’intégralité de la discographie du blondinet et après avoir érigé un totem à son effigie dans nos piaules, on finit par la connaître la fameuse recette du chef.

Car tout ça a déjà été entendu auparavant, que ce soit sous la bannière Ty Segall ou dans ses très nombreuses collaborations. Du coup, si l’écoute est loin d’être désagréable, il n’en demeure pas moins que ce nouvel album est sans grande surprise et que la production décidément très soignée finit de lisser l’ensemble et le dépouille de la rugosité et du côté cradingue propres au Californien et si chers à nos yeux. 

En fin de compte, ce qui apparaît ici en filigrane, c’est que Ty Segall ne s’est pas forcément foulé pour pondre cet album qui se contente de "faire le taf", là où notre niveau d'attentes à son égard a forcément pris pas mal de hauteur avec le temps. Alors on ne va pas non plus se mentir, on a quand même parfois bien pris notre pied (ça reste Ty Segall), mais face à une concurrence de plus en plus rude (on pense notamment à King Gizzard & the Lizard Wizard, qui eux n'ont pas déçu avec leur petit dernier), il était de temps de mettre les points sur les i, quitte à se prendre une volée de bois vert de la part de fans aveuglés au passage.