Skeleta
Ghost

Tout le monde sait que la Suède est une véritable usine à pop (culture). ABBA, Yung Lean, Avicii... tous ont marqué un genre, quand ils n'ont pas marqué l'histoire. La raison est assez difficilement explicable et tient à une foultitude de facteurs et un alignement diabolique des planètes. Mais les faits sont incontestables : les Suédois trainent derrière eux une longue tradition de la mélopée qui fait mouche. Et depuis 15 ans, Ghost perpétue cet état de fait avec des albums qui ne sont que des collections de titres d’une efficacité redoutable et d’une intelligence rare. Groupe mené de main de maître par un Tobias Forge omnipotent et grimé (et dont l'identité véritable n'a été révélée qu'en 2017), Ghost est aujourd'hui une impitoyable machine à tubes hard rock, un groupe dont la musique a dans son viseur les stades auxquels elle est promise.
Ghost (enfin, Tobias Forge) n’a jamais renié ses penchants pop et a choisi de l’assumer sur des reprises de Phil Collins ou Tina Turner. Mais tout le génie du projet réside dans sa manière de procéder. En effet, si le qualificatif « pop » est souvent utilisé avec dédain et mépris, et à plus forte raison dans le métal, les Suédois en font une raison d’être sur Skeleta. Ce sixième album est une collection de bangers (oui, vous avez bien lu, des bangers) s’appuyant invariablement sur deux éléments : la force d’une accroche et l’intelligence d’une compo. Ayant parfaitement digéré des influences pour le coup vraiment variées, le groupe en maîtrise désormais les codes dans une sorte d’hommage perpétuel à la musique qui a compté pour lui - « Peacefield » et ses riffs digne des meilleurs Judas Priest, « Guiding Lights » qui s’écoute comme une balade FM délicieusement cheesy façon Foreigner, « Missilia Amori » qui ressemble à un titre que KISS aurait sans doute rêvé de composer ou « Umbra » qui nous offre une batailles d’instruments digne des plus belles heures du prog rock des années 70. Pour autant, et c’est là la vraie intelligence de Ghost, on n’a pas le sentiment de se faire prendre par la main, comme s’il fallait obligatoirement tomber dans le panneau pour en profiter.
Skeleta est une nouvelle démonstration de l’irréversible montée en puissance de Ghost, et de sa maîtrise absolue des codes d’une époque avide de grand n’importe quoi. Surtout, à un tel niveau de songwriting et de maîtrise de son sujet, c’est le disque idéal pour laisser de côté ses idées préconçues sur une formation dont le sens du spectacle et de la démesure se mettent au service d’une musique parfaitement calibrée, joliment référencée et surtout très très bien branlée.