Live At Robert Johnson

Thomas Hammann & Gerd Janson

Playhouse – 2010
par Simon, le 9 mars 2010
8

Outre la figure historique du deejay/producteur, qui peut se targuer d'en connaître un rayon en matière de musiques électroniques de tous bords? Les dirigeants du club Robert Johnson nous donnent la réponse : les disquaires indépendants et les patron de label. Thomas Hammann et Gerd Janson possèdent respectivement au moins une de ces qualités et ont forcément dû taper dans l'œil des responsables du club d'Offenbach. Mais plus qu'une simple logique de transfert footballistique, le Robert Johnson peut compter sur ces deux personnalités puisqu'il les a laissé organiser, neuf années durant, les très chaudes soirées « Liquid », où règnaient en maître les plus beaux contours de la musique house.

C'est donc tout à fait logique de voir nos deux faux inconnus prendre les rênes du quatrième volume de la très bonne série Live At Robert Johnson - après les prestations tout aussi méritantes de Ivan Smagghe, Chloé et Prins Thomas. Un choix qui se révèlera très vite payant puisque la sélection des deux maîtres est à mettre au rang des plus grandes compilations du genre (on pense aux Fabric, aux Dj-Kicks ou encore aux At The Controls). Tout ici respire la house des origines, de l'esprit à la finition, des pulsions animales au prévisible burn-out corporel. Je me battrai à nouveau pour ne pas avoir à jouer les statisticiens pervers, mais plus de la moitié des titres en présence ont plus de dix ans d'expérience club dans les jambes : ressorties sous leurs plus belles couleurs, ces perles de collectionneurs (Dj Du Jour, Chez Damier, Azymuth) s'expriment sous des formes qu'on n'aurait probablement jamais pressenties aussi modernes et racées.

Aucune faute de goût (et de groove par voie de conséquence) n'est à dénoter durant ces septante minutes d'un festival house de très grande qualité. Mieux, on redécouvre les vrais charmes d'un genre trop souvent détourné en musique de cirque pour nouveaux animaux déracinés. Cette house-là crache ses origines afro-américaines – du funk au disco – sous impressions électroniques, bravant la pudibonderie des uns sans tomber dans la vulgarité des autres. Et le kick 4/4 de reprendre tout son sens, entre un escalier de claviers et des oripeaux aux couleurs arc-en-ciel, c'est toute une génération de clubbers (de Juicy Fruit à Superpitcher) qui peut à nouveau respirer dans le dernier des lieux communs : le club comme aucun autre endroit n'offrira plus d'évasion.

Cristallisée entre le passé tout proche et le présent déjà bien loin, cette sélection ne pouvait être que l'œuvre de deux grands spécialistes pour la simple et bonne raison qu'elle n'offre rien au cliché ni au passéisme, qu'elle se conçoit dans l'universalité de la fête étouffante et du bon goût de ses dompteurs. Une histoire qui combine le corps et l'esprit. Une musique de dandy déluré qui s'adresse au dandys délurés, simplement, comme une histoire dont les pages continuent de s'écrire pour autant qu'on le veuille bien. L'homme derrière les platines n'a jamais été si important qu'ici. A posséder absolument.