Everybody Loves a Happy Ending

Tears for Fears

XIII Bis Records – 2005
par Splinter, le 22 décembre 2005
6

Tears For Fears. Roland Orzabal. Curt Smith. A l’évocation de ces noms, j’entends déjà les mauvaises langues se moquer à pleins poumons : "le retour des has been !", "ils sont pas morts ces deux-là ?", "quoi ? ils se reparlent ?", etc. Oui ! Tears For Fears, Mesdames et Mesdames, LE groupe emblématique de la pop britannique des années 80, est de retour en 2005. Rappelez-vous, "Sowing the Seeds of Love", "Woman in Chains", "Badman’s Song"… que des tubes, des pop songs parfaites… qui font de The Seeds of Love (1989) un album tout simplement indispensable dans toute collection de disques un tant soit peu sérieuse. Alors un peu de respect s’il vous plaît !

Roland Orzabal et Curt Smith, donc, ces deux-là ne se parlent plus depuis le début des années 1990, officiellement pour cause de divergences artistiques. Orzabal choisit de continuer l’aventure seul sous le nom de Tears For Fears pendant quelque temps, tandis que Smith, après avoir sorti un album solo, monte son propre groupe, Mayfield. Fâchés à mort, qu’ils sont. Mais nos deux compères se rendent à l’évidence : le groupe vaut bien plus que la somme de leurs individualités. Leurs projets respectifs ne rencontrent pas le succès espéré, même si Tears For Fears, devenu solo, produit des albums de tenue assez correcte (et notamment Raoul and the Kings of Spain, 1995, qui revient sur les origines espagnoles du survivant, de son vrai nom Roland Jaime Orzabal de la Quintana).

Et puis surprise, sans doute parce que tout le monde préfère les fins heureuses (!), les deux frères ennemis se rapprochent en ce début de nouveau millénaire et décident même de sortir un nouvel album. Paru en septembre 2004 outre-Manche, Everybody Loves a Happy Ending n’a connu qu’une sortie tardive par chez nous. Il a en effet fallu plusieurs mois pour qu’un éditeur ne décide de signer le groupe en France, où il a connu un succès certain jusqu’au début des années 1990, pour rapidement tomber dans l’oubli suite au split des deux leaders. Bien sûr, ce rabibochage inespéré sent le coup marketing à plein nez. Et pourtant, il est loin de n’être que cela.

Pour ce nouvel album, Smith et Orzabal n’ont pas tenté de réinventer la roue : les clins d’œil à The Seeds of Love sont assez évidents (ne serait-ce que la pochette, pour le moins chargée), et musicalement on a affaire à un excellent disque… des années 80. Production luxuriante, arrangements pompeux, voix haut perchées... c’est effectivement du Tears For Fears pur sucre, de la pop eighties comme on n’en fait presque plus, voire comme on pourrait ne plus avoir envie d'en écouter.

Et, seconde surprise, nombreux sont les morceaux à flatter l’oreille dès les premières écoutes grâce à leurs mélodies très agréables, ainsi qu’à laisser un très bon goût en bouche : "Closest Thing to Heaven" et ses synthés bien kitsch, "Call Me Mellow" et son refrain très "There she goes" des Sixpence None the Richer (quelle référence !), la douce "Who You are" et la très belle "Ladybird"… Chantés alternativement par Smith et Orzabal, dont les voix n’ont pas pris une ride, tous ces titres sont d’excellente tenue et font honneur à ce vénérable groupe, dernier survivant des eighties aux côtés de Depeche Mode, U2 et Simple Minds (même si, question crédibilité, il se rapproche plus des derniers que des premiers).

Alors, vraiment, malgré les a priori négatifs que vous êtes susceptibles d’avoir si vous avez vécu les années 80, ce disque est très bon et rappelle à tout un chacun les grandes qualités de songwriting de Smith et d’Orzabal. Si, en revanche, vous avez moins de 15 ans, n’hésitez pas un instant à y jeter une oreille attentive car Tears For Fears, quels que soient leur statut et leur réputation dans le monde musical, vaudront toujours mieux que leurs clones actuels.