Chinese Songs For Bad Boys

Combomatix

Howlin Banana Records / Retard Records – 2016
par Pierre, le 11 mars 2016
8

Être étudiant à Rennes est quelque chose d’assez cool. Outre la possibilité de se nourrir uniquement d'alcool, la ville offre un patrimoine exemplaire constitué au hasard de galettes saucisses, d’agriculteurs en colère et de punks à chien matelassant la quasi-totalité de ses pavés. Plus sérieusement, la capitale armoricaine est sans conteste un haut-lieu de l’expression musicale française et de l’underground tricolore : de ses flancs fertilisés par la Vilaine jaillissent de nombreuses formations plus ou moins capables, alimentées par un air breton saturé en électricité et (surtout) en humidité.

Mais Combomatix, c'est encore une autre histoire. Parler ici d’underground serait inapproprié et terriblement euphémique tant les accords crasseux gerbés par nos enceintes semblent tout droit sortis de la gueule putride de Belzébuth. Plus proche d’un Enfer concentrique que de la croûte terrestre donc, le groupe s’épanouit dans une sorte de garage-punk primitif, érodé jusqu’à l’os et démuni de tous ses oripeaux habituels, quitte à en décrédibiliser un bon nombre. Car ce Chinese Songs For Bad Boys remet les choses au clair dans l’hexagone : voilà enfin un rock garage qui ne se trouve pas édulcoré par l’injection d’une sensibilité pop superflue mais renoue avec une musique prédatrice, menaçante et gueularde, traduisant avec brio la substantifique moelle du terme "violence". Si beaucoup de disques sont ici comparés à de grandes gifles en pleine face, cet album serait tout bonnement une espèce de coup de tête - balayette - crachat à la gueule. Un genre de krav maga auditif, finalement.

Pour une fois, garage et punk ne riment pas avec la simple référence ou citation des aïeux mais se complaisent plutôt dans un minimalisme brut et implacable suintant les égouts rennais. Attention tout de même : l’écoute est déconseillée aux âmes innocentes et non averties, au risque de finir traumatisé comme un gamin planté devant L’Exorciste. Quoique… Parce que contrairement au film, on est prêt à parier que Chinese Songs For Bad Boys produira toujours le même effet quarante années plus tard.