Black Holes & Revelations

Muse

Warner – 2006
par Splinter, le 19 juillet 2006
6

Avant de coucher sur le papier mes impressions et sentiments à l'égard du nouvel album de Muse, Black Holes and Revelations, l'envie me prit de lire ce que j'avais écrit sur le précédent opus, Absolution, en septembre 2003. Et que dire, sinon que ce bref article, presque trois ans plus tard, demeure étonnamment d'actualité, et que tout ce qui y est dit s'applique encore aujourd'hui à nos trois Anglais. Ces trois têtes de mules ont en effet choisi de continuer à se complaire dans le mauvais goût absolu et le baroque infini, à l'image de Queen, cet autre (grand) groupe britannique qui s'affirme de plus en plus comme une référence pour Matthew Bellamy et sa bande. Mais alors que, jusqu'à présent, un charme certain se dégageait de leur œuvre pompière et grandiloquante, c'est beaucoup moins le cas cette fois-ci.

Autant le dire tout net : ce nouvel album n'est pas aimable tant il retombe dans les honteux travers d'Origin of Symmetry, leur seconde galette sortie en 2001. Comme l'indique d'ailleurs son titre sans aucun sens, Black Holes and Revelations part dans toutes les directions, à tel point qu'il en désarçonne l'auditeur. Quel rapport entre le quasi-stoner "Assassin" et la douce comptine de "Soldier's Poem" ? Aucun. En outre, cet album use et abuse des nappes synthétiques tourbillonnantes à la "Bliss" ("Take a Bow"…) et eighties à la limite de l'écœurement ("Starlight"), et se trouve non pas à moitié, mais presque au quart rempli de morceaux inutiles ("Soldier's Poem" et "Invincible", en particulier, le ventre mou de l'album) qui masquent mal un cruel manque d'inspiration.

Ainsi, à l'image du premier single, "Supermassive Black Hole", qui avait pu surprendre l'auditeur même un tant soi peu habitué aux tendances extrêmes du trio, avec un son pas très éloigné de ce qu'ont pu produire Prince et Britney Spears dans leurs pires moments, ce court album (45 minutes seulement) s'avère une fois encore complètement ampoulé (bourrinage massif sur "Assassin"), boursouflé (les guitares flamenco de "City of Delusion"), presque insupportable. Et bizarrement, ce qui séduisait encore sur Absolution (ah un karaoké à Tokyo sur "Time is running out"... !) ne fonctionne plus du tout ici, la faute sans doute à un album foutraque et mal conçu, vide et sans idée directrice, sans progression émotionnelle.

Mais si Muse a échoué à fournir un album cohérent comme avait pu l'être Absolution en son temps, grand disque a posteriori, le groupe a tout de même réussi à accoucher de trois titres absolument démentiels qui parviennent à sauver in extremis ce nouveau LP : "Map of the Problematique", tout d'abord, en particulier pour sa rythmique très impressionnante, "Exo-Politics" ensuite, pour sa guitare tranchante et, encore une fois, le jeu incroyable de Dominic Howard, et enfin "Knights of Cydonia", juste exceptionnelle, aux chœurs queeniens, au refrain complètement entêtant ("no one's gonna take me aliiiive") et surmonté des vocalises de Bellamy. Voici un titre que seul Muse semble capable de produire actuellement, un bijou de rock symphonique ou de metal opera, aussi sexy qu'une photo de Freddie Mercury la toison à l'air.

Au bout du compte, ce dernier opus s'avère être un album moyen, pas complètement raté grâce à quelques fulgurances de génie, et qui malheureusement supporte assez difficilement la comparaison avec Absolution. Avec le recul, Muse ne semble capable de produire qu'un grand disque (Showbiz, Absolution) sur deux (Origin of Symmetry, Black Holes and Revelations), ce qui, certes, n'est déjà pas si mal, mais donne malheureusement lieu à une déception récurrente. Avec un peu de chance, on adorera donc le suivant.

Le goût des autres :
5 Romain 7 Popop