Dour Festival 2019
Dour, le 11 juillet 2019
Prix Shane McGowan du groupe aussi fort en rock qu’en cirrhose du foie : les Viagra Boys
Pas besoin d'être l'observateur le plus finaud pour se rendre compte que le rock délaisse de plus en plus le line-up de Dour et celui des festivals en général. Économie de marché oblige, le hip-hop (et tous ses produits dérivés) est le genre le plus en vogue, donc forcément le plus demandé et représenté à l'affiche des grands évènements de l'été. La faible présence de groupes de rock est loin d'être irrationnelle, mais pas forcément inéluctable.
Ainsi, mis à part des groupes comme Fontaines D.C et Rendez-Vous, qui ont tenu leur rang, ou encore les furieux et non moins talentueux représentants belges que sont La Jungle ou It It Anita, les guitares furent plutôt rares durant ces cinq jours. Il aura finalement fallu attendre le dimanche dans Le Labo pour reconnaitre une certaine homogénéité stylistique. Les Liégeois précités, la Fat White Family (que nos organismes fatigués ne nous ont malheureusement pas permis de voir), mais surtout les Suédois des Viagra Boys ont balancé ce genre de concert badass et tellement dansant qui fait que l'on passerait bien l'après-midi en leur compagnie à se mettre une caisse – d’ailleurs, le chanteur Sebastian Murphy avait déjà quelques litrons d’avance sur la concurrence à 17 heures.
Dans l'ensemble, on se dit que si Dour se veut un festival de musiques actuelles et que l'on admet volontiers qu'il privilégie actuellement les grosses machines hip-hop et techno, le pluralisme des genres et surtout l’éclectisme de son public n'en restent pas moins inscrits dans son ADN. Raison pour laquelle limiter ou se priver des rares formations qui tentent de redonner au rock ses lettres de noblesse est, à notre sens, une erreur.
Si elle implique une certaine segmentation du public, la solution pour ramener le rock à Dour passera peut-être par une journée thématique dans une salle à capacité raisonnable, à l'image de ce qui a été proposé en métal cette année. Celle-ci permettra alors au public de concentrer son attention et son énergie sur une musique qui, si elle est en perte de vitesse, bande encore bien dur.
© Olivier Bourgi
Prix Omar Sy du capital sympathie : Flavien Berger
Dans le circuit des festivals, Flavien Berger est ce qu’il convient d’appeler un bon client. Déjà programmé l’année dernière, le français s’est à nouveau présenté à Dour, cette fois armé d’un Contre-Temps unanimement acclamé. Programmé dans une Petite Maison Dans La Prairie qui semble avoir pleinement pris la mesure de la relativement récente notoriété du bonhomme, Flavien Berger, look rigolo et charisme dans les chaussettes, est venu justifier avec toute la simplicité qui le caractérise pourquoi tout le monde s’emballe autour de lui ces derniers mois.
Entre ses morceaux aux rythmes binaires dont la plupart commencent à être bien assimilés par le public et des boucles synthétiques aux allures d’improvisation, l’electro-pop entêtante de l’expatrié bruxellois fait rapidement mouche. Bien aidé par son humour pince-sans-rire et une certaine authenticité, le trentenaire convainc rapidement avec son côté un peu gauche, mais des tubes qui filent droit.
Certes, le bidouilleur français n’est pas le musicien le plus virtuose qui soit et sa prestation en mode one-man band ne sera pas forcément la plus impressionnante du week-end, mais il a le mérite de ne pas s'inscrire dans cette catégorie d'artistes qui décident désormais de jouer la carte de la surenchère lorsqu’il s’agit de présenter un show qui doit se démarquer. Armé de son synthé et d’une mise en scène simpliste, mais onirique (des pieds recouverts de draps qui pivotent avec de faux airs de fantôme), Flavien Berger caractérise finalement bien cette évolution d’une variété française décomplexée. La parfaite incarnation d'un less is more sans prise de tête.