Concert

Dour Festival 2019

Dour, le 11 juillet 2019
par Jeff, le 31 juillet 2019

Prix Cyril Hanouna de la gogolerie qui fonctionne quand même bien quand t'es à 10 grammes : les warm-up des DJ's hip-hop

C’était le vendredi. Il devait être quelque chose comme 23h45. Et on a vécu un moment aussi fort qu’improbable. Dans une Boombox qui s’est remplie encore plus vite que nos vessies en ce second jour de festival, le DJ payé pour chauffer le public en attendant que Trippie Redd daigne monter sur scène a balancé le « CoCo » de O.T. Genasis. Les mauvaises langues diront qu’à l’échelle de Dour, on tient là un putain d’hymne. Mais comme nous ne sommes pas des mauvaises langues, nous nous limiterons dans un premier temps à un travail d’observation. Et là, le constat est sans appel : il paraît que le mec de permanence à l’observatoire royal de séismologie de Bruxelles s’est chié dessus en l’espace de 30 secondes.

En réalité, on s’est mangé dans la tronche une tranche de turn up bien plus épaisse que ce que nous ont procuré pas mal de rappeurs à qui revenait la lourde tâche d’ambiancer un public avec un set up et une scénographie parfois plus proche du showcase que du concert de rap. Bordel, mais quel boulot ingrat que de faire grimper le thermomètre à coup de tubes, tout ça pour que la star du soir débarque sur scène et se retrouve avec un micro qui ne marche pas ou un son aussi clair et transparent que le fond d’une Cathy Cabine à 4 heures du mat’. Ben ouais les mecs, c'est bien de débarquer avec cinq gardes du corps et tout votre entourage, mais il faudrait penser à emmener un ingé son dans le jet privé, et pas un pote d'enfance qui n’a pas fini ses primaires, mais se retrouve à gérer les balances et brancher les câbles ! D’ailleurs, tout ça pose la question de l’absence de DJs hip-hop en festival.

Au final, à part un Lefto qui, chaque année, met tout le monde d’accord (et à genoux) en clôturant la scène qu’il programme, les DJs programmant du rap sont finalement très rares, alors qu’on a l’impression qu’ils coutent bien moins cher que n’importe quel rappeur américain incapable de mettre la Belgique sur une carte et qu'on est certain qu’ils feraient le travail aussi bien (si pas mieux) que certains MCs dont la cote de popularité est inversement proportionnelle à la présence scénique ou la capacité à rapper plus de deux phrases sans avoir besoin de la bande. À quand une journée hip-hop sur la Red Bull Elektropedia Balzaal ?

 

© Mickael Hubert

 

Prix Claude Moniquet de la plus belle erreur de casting : Charlotte Adigéry

Aimer un artiste et le voir programmé à une heure qui ne lui correspond pas ou ne fait pas honneur aux qualités qu’on lui prête est un sentiment terrible. Parce qu’invariablement se profile la perspective de débarquer sous un chapiteau désert, et d’observer un artiste se démener pour amuser la galerie quand un horaire plus clément ou une enceinte un peu moins gigantesque lui aurait permis de jouer un peu plus dans sa zone de confort.

Comme d’habitude, ce sont les locaux de l’étape qui ont joué les variables d’ajustement sur les différentes scènes : on aurait pu évoquer plus longuement le cas de Montevideo programmé sur une Last Arena qu’on aura rarement vu aussi peu peuplée (coucou l’euphémisme) ou ceux des excellents Commander Spoon et Dijf Sanders, qui se coltinaient l’ouverture de leur scène le dimanche à une heure où tout le monde avait clairement mieux à foutre. Mais on en placera une grosse pour Charlotte Adigéry, qui jouaient aux alentours de 16 heures dans une Petite Maison Dans La Prairie heureusement plutôt bien garnie pour cette heure ingrate.

Et ceux qui ont fait le déplacement ne l’ont pas regretté : si on n'a pas manqué de dithyrambes pour parler de son dernier EP sur le label de Soulwax, on sera encore plus généreux au moment d’évoquer sa transposition en live. Vraie popstar en devenir, Charlotte Adigéry use d’un matériau de base déjà extrêmement classieux et savamment dosé pour lui donner une seconde jeunesse et une énergie qu’on ne soupçonnait pas en live. Bien aidée par un Bolis Pupul qui gère les machines et une scénographie sobre mais terriblement efficace, Charlotte Adigéry n’a plus qu’à faire ce qu’on attend d’elle : jouer les popstars, mais pas celles qui en font trop pour cacher la vacuité de leur propos ou l’absence d’idées. 

Non, Charlotte Adigéry va plutôt chercher son inspiration du côté de Robyn ou Beyoncé, dans les pas de qui on lui souhaite de continuer à marcher fièrement, tout en se forgeant une identité propre qui tire autant ses bases dans ses racines africaines que belges. Pas encore reine, mais déjà princesse.