Interview

Frànçois And The Atlas Mountains

par Nicolas, le 1 octobre 2009

Depuis qu’on a reçu Plaine Inondable, le dernier opus de Frànçois And The Atlas Mountains, on ne passe pas une semaine, voire une journée, sans l’écouter. Petite merveille pop, ce disque est celui qui permet à cet artiste-peintre de bénéficier d’une plus large exposition médiatique, amplement méritée. Dans le tourbillon des sorties de la rentrée, Goûte Mes Disques s’arrête donc quelques instants pour mieux comprendre l’univers de François Marry, un artisan de la pop dont on n’a pas fini d’entrer parler.

Goûte Mes Disques : Peux-tu revenir sur ton départ en Angleterre, qui semble être le point de départ de ton aventure musicale ?

Frànçois : Je suis parti en Angleterre en 2003 pour travailler en tant qu'assistant et j'ai continué à faire de la musique là-bas. Comme tout adolescent, je faisais déjà de la musique. J'ai donc rencontré des musiciens qui jouaient dans divers groupes et commencé à jouer avec eux. Mon projet sous cette forme-là date de 2003, de mon arrivée à Bristol.

Goûte Mes Disques : Et la rencontre avec Crescent, comment s’est-elle passée à proprement parler ?

Frànçois : J'avais mis une annonce dans une boutique d'art locale en disant que je recherchais des musiciens et que je voulais faire des collaborations. J'avais cité des groupes comme influence dont l'un était Crescent. Le hasard fait qu’il y avait un concert le soir dans ce magasin et une personne m'a dit que, des groupes que j'avais cités en référence, des gens y seraient. Je suis allé leur parler et ils étaient impressionnés par le fait qu'un Français connaisse Crescent. Ils avaient un concert quelques jours après, ils m'ont proposé de me joindre à eux pour jouer de la trompette. On a commencé à jouer ensemble, puis à traîner ensemble, à faire des repas à la maison,… J'ai fait d'autres concerts avec eux alors qu'eux ont joué sur mes disques,... En arrivant à Bristol, Crescent faisait partie de mes groupes préférés, j'étais vraiment ravi de pouvoir jouer avec eux. C'est un bon exemple de musiciens que j'ai rencontré et avec qui j'ai joué. Tout comme Camera Obscura, de Glasgow.

Goûte Mes Disques : Justement, peux-tu nous en dire un peu plus sur ta collaboration avec ces derniers ?

Frànçois : Je travaillais dans un cinéma-concert qui était tenu par des bénévoles. J'ai discuté avec le groupe et, comme j'allais visiter Glasgow quelques jours après, on s'est dit qu'on se reverrait là-bas. De fil en aiguille, nous sommes devenus amis. Par après, on est resté en contact et j'ai fait leur première partie sur une tournée. Ensuite, un de leurs musiciens a quitté le groupe et je l'ai remplacé pour jouer de la trompette et des percussions. J'ai donc fait des tournées avec eux aux États-Unis en tant que membre temporaire du groupe. Je ne vais pas jouer sur leur prochaine tournée parce que lorsqu’ils font des concerts c’est parfois difficile d’avoir beaucoup de musiciens. Mais on est toujours de très bons amis et on se voit quand on en a l’opportunité. Je pense que ma tournée de juin avec eux sera la dernière avant un bon bout de temps car j’ai envie de me consacrer à mes propres projets.

Goûte Mes Disques : Tu présentes la particularité de croiser le chant en anglais et en français. D’où est-ce que cela vient ?

Frànçois : Je pense que ce mélange de langues va se retrouver de plus en plus parce qu’il y a beaucoup de Français qui habitent en Angleterre, et vice-versa. Ce n’est que le début d’un mélange bilingue. Il y a énormément de gens qui soulignent cette particularité de ma musique et de mes chansons mais, pour moi, ce n’est vraiment pas étrange. Que du contraire, c’est plutôt naturel et je pense que c’est quelque chose que j’ai entendu chez d’autres artistes. De toute façon, cela remonte à Gainsbourg qui avait fait des chansons où il traduisait les mots anglo-saxons.

Goûte Mes Disques : Au niveau de l’enregistrement, comment s’est déroulée la rencontre avec Bost Gehio, cette formation polyphonique du Pays Basque ?

Frànçois : C’était une période où j’avais envie de quitter l’Angleterre et de me consacrer à ce que je faisais. Le problème est que, quand on commence, c’est difficile d’avoir du soutien financier et je n’avais même pas la garantie qu’un label serait intéressé. Cependant, j’avais quand même contacté la directrice du groupe polyphonique Mystère des Voix Bulgares qui m’avait répondu très positivement en me disant que cela l’enthousiasmait et qu’elle était disponible pour commencer un projet. J’avais été ravivé par ce message et le fait de savoir qu’une chorale de l’envergure du Mystère des Voix Bulgares serait disponible pour collaborer. Même si je n’avais pas le soutien financier ni les compétences musicales pour voir aboutir le projet. Je me suis donc replié sur un groupe polyphonique du Pays Basque qui s’appelle Bost Gehio qui peut chanter ces polyphonies bulgares dont j’apprécie les tonalités surprenantes et assez uniques. Ses membres sont encore plus jeunes que mon ami Amaury, elles doivent avoir 19 ans mais font quelque chose d’incroyable. C’était très facile de collaborer avec elles car elles pouvaient travailler à l’oreille. Je pouvais leur évoquer des idées, jouer des parties, des arrangements et elles pouvaient les faire directement. Je suis vraiment content d’avoir travaillé avec elles car cela m’a permis d’aboutir sans effort au résultat qu’on peut retrouver sur l’album. Ainsi, elles sont présentes sur "Be Water (Je Suis De L’eau)", "Do You Do", "Nights = Days" et aussi sur un morceau ("Royan") de l’EP sorti précédemment. On a donc fait quatre morceaux ensemble et on a travaillé sur d’autres plus anciens que l’on a joué en concert à Paris.

Goûte Mes Disques : Est-ce que la scène rendra compte exactement du travail de studio ? Comment comptes-tu retranscrire en live Plaine Inondable ?

Frànçois : Je n’ai pas de véritable groupe car j’aime changer tout le temps. J’apprécie beaucoup tous les gens avec qui je joue mais je n’aime pas me sentir responsable de leur vie. Donc, je ne veux pas me les accaparer. Pour cette raison, je change tout le temps de musiciens. Même si pour cet album, il y a vraiment eu un travail de groupe pour les enregistrements. Mais quand on va le jouer en concert, ce sera très différent. Il y aura seulement une personne présente sur l’album, mais la principale. Il s’agit d’Amaury qui est un ami de Saintes, ville où on a enregistré et où habite ma mère. C’est un jeune musicien d’une vingtaine d’années. Il a un groupe qui s’appelle Unkle Jelly Fish et qui est vraiment très bien. Donc lui va m’accompagner en concert ainsi que ma petite amie Rozy Plain. On sera un trio et le résultat sera plus minimal et expérimental que l’album. Ce sera moins léché, il y aura plus d’improvisations et de bricolages.

Goûte Mes Disques : Quel regard portes-tu sur ce disque par rapport à tes deux premiers efforts ?

Frànçois : C’est différent. Les anciens albums sont beaucoup plus intimistes. Ils sont moins léchés, moins produits. Cela correspond à la sortie de ces albums, qui s’est faite en catimini. J’y suis très attaché, ce sont des étoiles isolées. Si Les Anciennes Falaises sont soldout, les autres sont encore disponibles.

Goûte Mes Disques : Tu es le premier Français signé sur le label Talitres. Comment as-tu rencontré Sean, l’homme fort du label bordelais ?

Frànçois : Par l’intermédiaire d’Unkle Jelly Fish qui était en contact avec Sean pour leur prochain album. Amaury lui a donné les enregistrements qu’on avait fait, presque sans me demander mon avis,… Pour ma part, ce qui m’importait c’était d’aboutir au niveau des enregistrements mais sans réelle ambition. Cela m’était égal que cela sorte sur un bon label ou pas. Sean m’a contacté et j’étais de passage en France cette semaine-là. On a pu se rencontrer et j’ai donc signé.

Goûte Mes Disques : Enfin, quels sont les retours que tu as eus jusqu’à présent à propos de Plaine Inondable ?

Frànçois : Pour ce que j’ai vu, j’ai de bonnes chroniques. Notamment dans Magic. Il y en a une dans Les Inrocks également. Les gens m’ont donné de bons retours mais, surtout, les amis à qui je l’ai fait écouter, ce qui est pour moi le principal moyen de juger mon album, l’ont apprécié. Moi, j’en suis très content, principalement pour la période de ma vie que ça représente et le plaisir que j’ai pris à l’enregistrer. Davantage que le résultat définitif qui est bien mais qui arrive à un moment de la création où on n’a plus de recul sur ce qu’on fait. Pour moi, la seule critique que j’en ai, c’est le plaisir que j’ai pris à le faire.