Concert

The Rascals

Paris, La Maroquinerie, le 1 décembre 2008
par Splinter, le 3 décembre 2008

Certains petits détails font franchement plaisir. Surtout quand ils surgissent lors d'épisodes de la vie parfaitement anodins, comme celui qui consiste à aller retirer sa place pour The Rascals à la Maroquinerie en se présentant à la jolie demoiselle de la billetterie et constater, parce qu'on a l'œil baladeur et qu'on fait toujours attention aux petites choses que les autres, d'ordinaire, ne remarquent pas, que l'ordinateur de ladite demoiselle est allumé et que son navigateur Internet est ouvert sur… Goûte Mes Disques ! Ah, la Maroquinerie : une excellente salle, une excellente programmation et un personnel si sympathique aux si saines lectures.

En parlant de la programmation, si le public, ce 1er décembre 2008, était venu évidemment en priorité pour The Rascals, il ne fallait pas manquer la première partie, assurée par les jeunes Lyonnais de Music Is Not Fun. D'ordinaire, il me coûte assez de parler avec bienveillance de groupes hexagonaux, toujours prompts à singer tel ou tel autre sans jamais faire preuve d'aucune originalité. C'est d'ailleurs également le cas de cette formation composée de quatre gamins à peine sortis de l'adolescence. Le guitariste est un minet chevelu qui s'y croit déjà ; le chanteur a le physique d'un petit premier de la classe dans son joli polo Lacoste rouge ; le batteur est… louche, avec ses grosses lunettes et sa moustache.

Ces quatre-là, multi-instrumentistes, jouent un garage rock tout ce qu'il y a de plus classique depuis 2001, c'est-à-dire depuis que The Strokes ont remis le jean slim à la mode. Mais ils mettent une telle énergie et une telle bonne humeur dans leur prestation qu'ils valent clairement le déplacement. On salue également le choix de leur nom, particulièrement bien trouvé. Un groupe à suivre, donc.

Cela étant, le plat principal, ce soir, c'était donc Les Voyous en bon français, alias The Rascals dans la langue de Miles Kane. Kane, oui, la moitié de cerveau des excellents Last Shadow Puppets, qui nous ont particulièrement épatés cette année avec leur Age of Understatement extrêmement classy and poppy. Sauf que The Rascals et The Last Shadow Puppets n'ont pas grand-chose en commun. Si, sur leur premier album, Rascalize, Kane parvient à faire illusion le temps de quelques titres très bien troussés, comme "Rascalize" ou "I'll Give You Sympathy", il faut bien constater que, sur scène, son rock, joué de manière brute et très forte, manque singulièrement de nuance et de finesse.

Excellent guitariste, excellent chanteur, mais bien piètre mélodiste, Kane a visiblement besoin du songwriting d'Alex Turner, son cobureau des Shadow Puppets, pour vraiment faire prendre la sauce et tourner la boutique, afin de plaire au-delà de la seule bande de jeunes venus pour pogoter comme des dingues sur les "I'd Be Lying To You" et autres "Freakbeat Phantom" du premier album des Rascals.

Leur show, entamé avec une mise en scène cheap mais efficace, n'a pas déçu la Maroquinerie, pleine à craquer, malgré l'absence de "Rascalize" (à la place, Kane a cru bon de jouer – parfaitement – une reprise d'"Instant Karma" de Lennon). Cependant, on se demande très sincèrement si le groupe parviendra à atteindre les cimes des Last Shadow Puppets, qui ont déjà fait un Olympia après seulement quelques mois d'existence. Il faut dire que sa musique, beaucoup moins consensuelle et, surtout, beaucoup moins inspirée, n'appelle pas les commentaires élogieux que ceux dont bénéficie le supergroupe qui pourrait, du coup, devenir un concurrent, voire un ennemi cannibale.