Hurry Up, We're Dreaming

M83

Naive – 2011
par Michael, le 27 octobre 2011
4

On aimait bien M83. Vraiment. On ne faisait pas partie de ces détracteurs qui reprochaient au groupe son goût pour l’emphase et le lyrisme, car ceux-ci étaient assumés et collaient très bien avec cette fraîcheur et cette innocence qui se dégage de la musique du groupe, si proche des humeurs adolescentes. D’ailleurs si la B.O. de Virgin Suicides devait être recomposée, M83 ferait le remplaçant idéal de Air.

Un premier album épuré et lumineux. Un deuxième (Dead Cities, Red Seas & Lost Ghosts) plus sombre qui marquera le début du succès, notamment outre-Atlantique, et Before The Dawn Heals Us où les penchants lyriques d’un Anthony Gonzalez désormais seul maître à bord trouvaient leur aboutissement. Saturdays=Youth (si l’on passe sur Digital Shades, Vol. 1) marquait en revanche une sorte de surplace, et une certaine méforme. L’album, malgré quelques très bons morceaux, restait qualitativement assez bancal. Ça n’empêchera pas M83 d’exploser aux Etats-Unis et de décrocher les premières parties des pharaoniques tournées de Depeche Mode ou des Kings Of Leon.

Voilà donc arriver Hurry Up, We're Dreaming, cinquième album attendu au tournant d’autant plus qu’annoncé comme double et « très très épique » par son auteur. Quand on pense à « double-album-conceptuel-épique », ça évoque immanquablement The Wall ou Mellon Collie And The Infinite Sadness, influences revendiquées par Gonzalez pour ce projet. Alors oui, certes, il y a une construction formelle (intro, outro, symétrie entre les deux parties avec le même nombre de titres, en plage 5 la ballade tire-larmes, en plage 2 le single pêchu et Steve McQueen qui répond à Claudia Lewis en plage 8), mais qu’en est-il du fond ? Et bien là, c’est la claque, et pas dans le bon sens du terme. Les choses commencent de manière plutôt anecdotique avec une « Intro » qui peine à introduire, et sur laquelle le featuring de Zola Jesus se révèle tout à fait dispensable - la rencontre avait pourtant de quoi faire saliver. Première déception donc. Le problème, c’est que ce ne sera pas la dernière mais le début d’une suite de morceaux pénibles et sans relief, ce qui sur un double album devient assez éreintant.

Mais quelle mouche a donc piqué Anthony Gonzalez se demande-t-on dès le deuxième morceau ? Lui qui portait d’ordinaire ses morceaux d’une timide voix androgyne qui convenait fort bien à sa musique, le voilà atteint du syndrome Animal Collective, à savoir chanter comme si on avait une pastèque coincée dans l’arrière-train. Et franchement, là, ça craint. Ça débute donc dès le « Midnight City », premier single de l’album, et ce sera le cas sur la plupart des morceaux, ce qui n’arrangera rien à la sauce, voire deviendra très vite insupportable. Et pour couronner le tout, il faudra supporter les pénibles riffs de guitare (« Reunion ») et les morceaux cache-misère qui n’ont absolument aucun intérêt si ce n’est faire du remplissage sur un double album qui nous en paraît quadruple pour le coup (« Raconte-Moi une Histoire », « Train To Pluton », « Fountains »…).

En fin de compte, à part le « Midnight City » susmentionné, l’autre single potentiel « New Map » et les deux longues ballades « Wait » et « Splendor » (qui lorgnent très fort du côté de The Wall justement), il n’y a pas grand-chose à sauver de ce Hurry Up, Sors-La-Galette-Du-Lecteur. Dans Saturdays=Youth, l’adolescence et les années 80 étaient les thématiques centrales de l’album. Pour celui-ci, ce sont les souvenirs d’enfance et l’innocence de ces années-là qui auront guidé Anthony Gonzalez. Espérons qu’on évite à l’avenir un prochain album sur l’évocation des parties de billes et des colliers de nouilles réalisés à la maternelle...

Le goût des autres :
7 Thibaut 6 Laurent 8 Denis 6 Bastien 5 Maxime 5 Yann