Concert

Dour Festival 2012

Dour, Site de la Machine à Feu, le 12 juillet 2012
par Jeff, le 27 juillet 2012

Crédits photos: Johan Lolos, wwww.johanlolos.com / www.musicfestivals.be

Leçon n° 1 :  Que tu le veuilles ou non, la météo ton programme établira

Même le Bangladesh ruiné par une saison de mousson aurait eu une gueule plus correcte que ce site de Dour 2012. Tellement de pluie et de boue qu’après deux minutes de marche tu tenais le gonzo du siècle. Un bordel sans nom, qui souille la moindre parcelle de ce qui est apparent, qui fait de ton slip après quatre jours sans douche l’endroit le plus propre du site. Les zones qui présentent quinze centimètres de boue liquide se multiplieront au fil des jours, et c’était sans compter sur la poignée de connards qui se sont éclatés à creuser des trous à la pelle les premiers jours pour te ricaner à la gueule quand tu te manges la tête à force de ne plus rien voir dans cet océan de mélasse. Cela avait même un côté presque poétique tant certaines zones immaculées faisaient penser à une mer d’encre. Enfin c’était surtout un nid à maladies tropicales pour les pauvres lascars qui n’avaient pas de bottes (une pensée émue pour le rédac’ chef adjoint qui a du découper ses nouvelles bottes aux ciseaux à six heures du matin le deuxième jour). La solution est de prendre sur soi, de faire marcher son humour en se disant qu’on participe à une édition historique d’un point de vue climatique, qu’on en parlera encore dans dix ans, qu’après ça on peut mourir tranquille. On se dit surtout qu’un Dour même cataclysmique vaudra malheureusement toujours dix fois plus le coup que des Ardentes ensoleillées. Dour boueux, Dour heureux ? Plus que jamais.

Leçon n° 2 : Orelsan et 1995 dans les mois qui viennent tu iras voir parce qu’après, trop gros ce sera

La dernière fois que notre route a croisé celle de 1995, c’était lors de l’édition 2011 des Ardentes. Le crew francilien commençait à buzzer sévère et La Source venait de débarquer. Résultat des courses: une prestation encourageante, mais trop bordélique que pour vraiment convaincre. Un an plus tard, 1995 flirte avec Universal, compte les fans par centaines de milliers, nous fait sérieusement saliver avec son second EP et pour le plus grand bonheur du festival moyen, est désormais une véritable machine de guerre scénique. Malgré un slot un peu ingrat dans l’horaire (la grande scène en milieu d’après-midi), les cinq canailles bien épaulées par un DJ Lo déchaîné ont enchaîné les meilleurs titres de leurs EP’s, gratifié le public de quelques freestyles malins et saupoudré leur set de titres jamais sortis mais qui ont contribués à leur notoriété sur la toile. La grande scène, c’est clairement là qu’Orelsan aurait eu sa place à Dour. On savait l’Alençonnais populaire, on sait désormais qu’il a tout pour être une superstar du music biz en France. Et pas le genre de type qui se cantonne à dominer le rap game hexagonal. Non, après avoir vu ce show d’Orelsan, on comprend que le emcee vise autrement plus haut. Alors c’est vrai, les fans de la première heure se sentiront peut-être un peu trahis par ce show un brin démago et populo, mais il serait malvenu de reprocher à Aurelien Cotentin de ne pas essayer quelque chose de différent dans un rap en français qui a un peu trop peur des instruments de musique.

Leçon n° 3 : Rone à la rentrée tu adouberas

Mine de rien, Rone a su discrètement se tailler une place solide dans l’échiquier électronique français, d’abord, puis international par la suite. Un personnage qui évite les projecteurs, qui se concentre uniquement sur son travail de composition, proposant un premier album délicat (Spanish Breakfast) puis un très bon EP (So So So). A tel point que chez InFiné, personne ne peut plus lui retirer son titre de porte-drapeau du label tant il a mené sa barque avec intelligence. Son set à Dour sera notre cadeau de bienvenue, le premier set électronique (avant celui de Joris Voorn, tout aussi excellent) à véritablement nous en mettre plein les oreilles. Son programme n’a pas changé d’un iota : techno spatiale, deep-house délicieuse et quelques giclées electronica pour attirer le chaland. Pas d’attitudes d’amuseur public, Erwan Castex livre son live avec précision – se révélant ainsi d’une grande tradition de la tech-house franco-française – chaleur et sensibilité. Un live qui tape quand il faut, qui rêve en permanence d’ailleurs. Une machine qui tourne enfin à plein régime, et qui s’annonce comme une des attractions de la rentrée avec un nouvel album prometteur sous le coude. Ce n’est que justice.