The Ever-Crushing Weight of Stagnance
Misanthropy

De tous les sous-genres du metal, le techdeath est celui que j’aime le moins. Déjà, il me semble assez con d’appréhender un genre à l'aune de sa seule technique. Il n’y a aucun monde où une musique qui se joue avec trois notes est meilleure que son équivalent à une note. La composante technique n’est rien a priori, tout au plus pourrait-on évoquer ce qui est véritablement fait de cette technique . Mais comme mon désamour du techdeath est bien inférieur à l’amour irrationnel que j’ai pour le metal en général, cette chronique sera pour Misanthropy, groupe originaire de Chicago qui signe son troisième album chez les essentiels Transcending Obscurity. Et spoilert alert : c’est très bien – même si c’est du techdeath.
Peut-être que le succès de The Ever-Crushing Weight of Stagnance tient surtout au fait qu’il n’est pas vraiment un death metal obsédé par la technique. Premièrement, le passé thrash du groupe lui assure une vision moins monomaniaque, dans laquelle rien ne peut rien s'imaginer sans revenir à un groove latent. Et mine de rien, dans cette configuration, ça peut sauver un disque. La deuxième chose, et c’est la vraie bonne idée de cet album, c'est que The Ever-Crushing Weight of Stagnance a été enregistré dans les conditions du live. Ça vous paraitra logique dit comme ça, mais c’est loin d’être le cas dans cette scène. Exit les montages obtenues par superposition de pistes, tout est instantané. Ce troisième album est tellement organique qu’il fait ses courses en magasins bio.
La chaleur et la vibration à leur paroxysme, on se retrouve dans des dispositions idéales pour subir la déflagration technique. Car nos Américains sont tout sauf des peintres en la matière. Certes, les premières écoutes sont bordéliques, mais c’est propre au genre et on ne leur en veut pas. Une fois que la vue s’est habituée à l’obscurité par contre, tout fait sens : les architectures terriblement complexes, la richesse des centaines de riffs au groove maladif, l'attirail prog metal bien mental, les batteries schizophrènes, les vocaux au max ou la précision chirurgicale de l’ensemble.
The Ever-Crushing Weight of Stagnance est une expérience terriblement intellectuelle si on veut aller au bout des choses. Heureusement pour nous, quand on décide de lâcher la rampe, on se met à profiter d’un son assourdissant, immensément varié et groovy à souhait . En un mot comme en cent : une musique qui ne doit rien à sa technique en tant qu’élément premier. Les écoutes s’enchaînent de manière obsessionnelle et le constat est désormais évident : Misanthropy tient son disque-référence. Un disque si intelligent, balancé à merveille entre les complexités de la tête et la réponse viscérale du bide. Un vrai travail de patrons.