Dark Sky Paradise

Big Sean

G.O.O.D. Music – 2015
par Jeff, le 23 mars 2015
8

Si le rap jeu était la planète foot, il ne fait aucun doute que l’écurie G.O.O.D. Music serait l’une de ces grandes équipes européennes, gérées en bon père de famille (ou en bon oligarque russe) et abonnée aux sommets des classements, qu’ils soient nationaux ou continentaux. Ces équipes sont souvent représentées par des stars qui éclaboussent la concurrence de leur talent et de leur arrogance, mais dont la flamboyance est souvent rendue possible par la force d’un collectif où l’on croise des joueurs que l’on juge parfois indignes du prestige du club qui les héberge, mais qui se subliment dans l’effort de groupe et la saine émulation.  

Chez G.O.O.D Music, la situation est assez particulière, avec un Kanye West qui se la joue joueur-entraîneur, à la fois José Mourinho et Eden Hazard. Big Sean lui, on le verrait plutôt dans la peau d’un Loïc Remy. Un type au talent certain, mais qui a véritablement besoin des autres pour briller. Ce principe, le emcee de Détroit le pousse à son paroxysme sur son nouvel album, Dark Sky Paradise. En effet, rarement on aura entendu un disque dont le personnage central voit sa contribution diluée à ce point dans les délires égotistes des nombreux invités à la fête.  

Déjà sur son précédent album, Hall of Fame, Big Sean avait recours à une formule similaire, et désormais traditionnelle dans le rap à gros biftons : on rameute tous les producteurs et les emcees qui comptent, on secoue et on espère que le mélange ne vous filera pas une chiasse du feu de dieu. Cette formule magique est une fois encore reproduite sur Dark Sky Paradise, mais ce qui plombe la visibilité de Big Sean, c’est tout simplement la forme olympique affichée par pas mal des copains conviés à la bamboula. En même temps, ce n’est pas vraiment une surprise, vu la qualité des extraits balancés en éclaireur ces derniers mois : « I Don’t Fuck With You » (produit par DJ Mustard), « Paradise » (banger bien dark signé Mike Will Made It) ou « Blessings » (avec un Drake à son meilleur niveau) sont tous des tubes certifiés.

Déjà que ces quelques noms suffisent à eux seuls à garantir le succès commercial d’un disque, mais si vous y ajoutez encore Kanye West, Lil Wayne, John Legend, Jhené Aiko et Ty Dolla $ign (ainsi que PARTYNEXTDOOR ou Metro Boomin si vous optez pour la version deluxe), le retour sur investissement est normalement garanti. Après, on connaît la rengaine : ce casting digne d’un blockbuster hollywoodien n’est pas une garantie de réussite, mais on peut vous assurer que, malgré un dernier tiers un peu moins flamboyant, Dark Sky Paradise est un très bon disque. Certes, on a pas l’impression qu’il est signé Big Sean, qui passe pour un invité dans sa propre maison, mais franchement, dans un rap game américain qui a élevé le copinage et la consanguinité au rang d'institutions, est-ce vraiment le plus important ?

Le goût des autres :
6 Ruben