Dossier

Séries TV et musique: (tentative de) classement ultime

par Jeff, le 20 octobre 2014

6. Six Feet Under

Qualité de la Musique : 7,6/10
Utilisation de la musique : 7,9/10
Qualité de la série : 9,4/10
24,9/10

Six Feet Under est la première grande série faisant de la mort son sujet principal, bien avant les tueries et les assassinats en pagaille de Game of Thrones. Pour parler de sa musique, nous respecterons ici la progression narrative typique de chaque épisode. Nous commencerons ainsi par la fin, et plus précisément par le titre qui clôt la cinquième et dernière saison de la série d’Alan Ball. Loin de nous l’idée de vous spoiler – nous détestons cela autant que vous – d’autant que vous avez déjà forcément entendu cette chanson : Breathe Me, interprétée par Sia. Oui, c’est ce fameux morceau au piano tristoune servant à illustrer aussi bien les conséquences insurmontables d’une dispute entre deux candidats de téléréalité qu’une larme versée par quiconque ayant été relooké face caméra. C’est bien Six Feet Under qui a permis de faire connaître ce tube en puissance. Sorti en 2004, le titre sera utilisé un an plus tard lors de la séquence finale du dernier épisode diffusé sur HBO et deviendra culte. Si Six Feet Under est reconnue pour son originalité, son humour constant et les performances notables de Michael C. Hall et Rainn Wilson (le Dwight Schrute de The Office, série également présente dans ce dossier), elle l’est aussi pour sa bande son. Au-delà du respect de la thématique avec Don’t Fear the Reaper de Blue Oyster Cult que l’on peut entendre dans une excellente scène de l’épisode 8 de la saison 2, la musique a été choisie avec soin : Black Rebel Motorcyle Club, Radiohead, Boards of Canada, Death Cab for Cutie, Interpol, Arcade Fire ou encore Coldplay viennent accompagner la vie de la famille Fisher avec élégance et sobriété. Son rang de série majeure, Six Feet Under le doit aussi à sa bande originale.

7. Scrubs

Qualité de la Musique : 7,4/10
Utilisation de la musique : 7,9/10
Qualité de la série : 8,6/10
23,9/30

Scrubs est une série musicale. Elle est, certes, d’abord une sitcom d’hôpital, mais elle a réussi à intégrer la musique comme un élément à part entière de sa narration et de l’identité de ses personnages. Le plus souvent, la bande son illustre les états d’âmes du personnage principal J.D., interprété par Zach Braff, acteur déjà rompu à l’exercice de l’OST depuis son film Garden State. D’abord interne puis médecin loufoque un peu paumé qui offre aux téléspectateurs ses pensées, ses rêveries et ses hilarants délires, J.D. entretient une des plus amusantes bromances de séries US avec Turk, jeune chirurgien. Leurs 400 coups sont régulièrement associés à la musique. Kung Fu Fighting de Carl Douglas, Poison de Bel Biv Devoe, Africa de Toto, le Theme From Shaft d’Isaac Hayes, Rapper’s Delight de Sugar Hill Gang, les grands classiques sont régulièrement utilisés et trop nombreux pour être répertoriés ici. Lorsqu’elles sont extradiégétiques, les paroles résonnent toujours avec un moment clef de l’épisode. Une orientation folk/rock s’y détache clairement : les Shins, The Coral, Joshua Radin, Guided By Voices, ou encore Eels se font entendre aux côtés d’artistes plus confidentiels chez nous appréciés par Braff comme Colin Hay (qui apparaît en guest dans la saison 2). À cela s’ajoutent un groupe a capella récurrent, de constantes références à des génériques de séries télé (Sanford & Son) et à la pop culture américaine. Lors de la saison 6, le temps d’un épisode intitulé My Musical, Scrubs prend même des airs de Glee : une femme admise à l’hôpital entend tous les personnages chanter leurs dialogue. La mini comédie musicale dure tout le temps de l’épisode avec des chansons créées spécialement pour l’occasion. Une série musicale, qu’on vous dit.

8. Les revenants

Qualité de la Musique : 7,3/10
Utilisation de la musique : 8,2/10
Qualité de la série : 7,2/10
22,7/30

Malgré un final quelque peu décevant, Les Revenants est parvenu à trouver son public. Un scénario qui tient en haleine de bout en bout, des ambiances oppressantes à souhait, et un jeu tout en sobriété ont permis à la création de Fabrice Gobert de connaître un joli succès d'estime en France et un retentissement international bien mérité. Mais cette histoire de morts qui reviennent pour questionner notre rapport à la vie n'aurait pu être aussi juste d'émotion sans la musique de Mogwai, qui a composé une B.O. qui se fond admirablement bien dans un décorum so(m)bre. Un travail adaptatif qui voit les Ecossais soumettre leurs réflexes habituels à un modèle imposé. Entre post-rock et pop orchestrale, cette bande originale pour les Revenants est autant une œuvre qui se suffit à elle-même qu'un accessoire indispensable pour l'une des meilleures œuvres de fiction hexagonale de ces dernières années.

9. Skins

Qualité de la Musique : 7,4/10
Utilisation de la musique : 8,2/10
Qualité de la série : 6,9/10
22,5/30

Le sportif, l'intello, le bagarreur, l'écorché vif, la débauchée, le beau gosse qui s'ignore, le beau gosse qui s'exhibe, le gay qui s'assume, la lesbienne qui ne s'assume pas… Girls who are boys who like boys to be girls who do boys like they're girls who do girls like they're boys always should be someone you really loooooooove! 

Sur papier, Skins réunissait tous les éléments pour constituer un amas de clichés sur les infortunes de l'adolescence en général et un portrait à la hache de la jeunesse anglaise en particulier. C'était sans compter sur le savoir-faire de Brian Esley, parfaitement à l'écoute de ses acteurs et de leurs goûts (trois générations étalées sur six saisons, sans compter la septième qui effleure l'entrée dans l'âge adulte). Celui-ci colle au cul de ses têtes-à-claque en insérant des scènes quasi contemplatives entre deux couillonnades de base. Nos gobeurs de pilules se plantent et se relèvent, se tabassent et s'étreignent, baisent sur le bureau du prof et versent une larme devant un spectacle de danse classique. Et se mettent des mines. Beaucoup. En général dans des clubs obscurs ou des appartements dénués de chaperons. Toujours à l'affût de la meilleure bande originale pour rythmer leurs excès, la bande baisse généralement son pantalon sur de l'indie à la pointe (à l'époque, du moins) comme MGMT, Passion Pit, Archie Bronson Outfit et Yeah Yeah Yeahs ou se démontent le crâne sur Radiorama et The Bug. Crystal Castles effectue une apparition lors d'une scène critique de la saison 2 et Foals jouent les maîtres de cérémonie dans un mini-épisode spécial. Au final, une grande partie de la scène rock et électro britannique a accompagné les tourments de nos oisillons, enthousiasmant les oreilles averties et éduquant celles qui en avaient besoin.

10. The Office (US)

Qualité de la Musique : 3,3/10
Utilisation de la musique : 8,3/10
Qualité de la série : 9,6/10
21,2/30

Mais que vient faire The Office dans ce classement ? C’est probablement la question que vous venez de vous poser. Non, l’équipe de GMD n’a pas abusé de la dive Jupiler lors de l’écriture de ce dossier. Au sein de la rédaction nous sommes nombreux à énormément apprécier les facéties d’un Steve Carell survolté et la rivalité régressive entre Dwight et Jim dans cette série. Mais aussi l’utilisation de la musique faite par les scénaristes, toujours au service de la vanne, comme dans l’originale écrite par Ricky Gervais. Plusieurs personnages principaux sont musiciens et montrent, tôt ou tard, leurs aptitudes sur scène : Andy est chanteur au sein d’un groupe a capella et joue du banjo et de la guitare, Dwight est un guitariste occasionnel, Kevin est batteur dans un groupe de reprises de Police (Scrantonicity II, super jeu de mot basé sur le titre du dernier album de la bande de Sting, Synchronicity, où figure Every Breathe You Take), Darryl officie derrière le synthétiseur. Dans The Office,  les protagonistes eux-mêmes donnent de la voix (Michael Scott rape très maladroitement, massacre « Stayin’ Alive », s’approprie le « Physical » d’Olivia Newton John à la sauce Dunder Mifflin, s’égosille en reprenant le « Goodbye Stranger » de Supertramp, Andy et Dwight chantent le Take Me Home, Country Roads de John Denver pour séduire Erin…) et certaines scènes tirent directement leur force comique ou émotionnelle grâce à la bande son. « Forever »de Chris Brown, d’abord devenu un meme sur les internets, intelligemment (ré)utilisé pour conclure un mariage ou encore la mode (heureusement passagère) du lip dub parodiée dans le premier épisode de la septième saison, il y en aurait tant d’autres à citer. Une caution rock indé vient tout de même appuyer notre choix d’intégrer The Office dans ce classement : la reprise de Sons and Daughters des Decemberists, avec Nora Kirkpatrick, l’accordéoniste d’Edward Shape and the Magnetic Zeroes posée sur le perron de la ferme de Dwight, entendue dans la neuvième et dernière saison de la série. Une place méritée, donc.