Dossier

2020 en 50 albums

par la rédaction, le 6 janvier 2021

#20

Sexy Planet

Bonnie Banane

On peut dire que ça valait la peine de l'attendre, ce Sexy Planet. Ce premier album de Bonnie Banane est bien le produit de la somme de toutes ses rencontres (de Varnish La Piscine à Flavien Berger en passant par Para One), ainsi que le juste reflet de ce que souhaite incarner cette chanteuse unique. On aurait toutefois bien du mal à classer la musique de Bonnie Banane. S'il y a bien des traces de chanson française ça et là, et un attrait indéniable pour les musiques urbaines qui empruntent aux rythmes latins, le produit fini ressemble à l'improbable somme de sensibilités en apparence incompatibles, mais que sa personnalité unique parvient à associer. Sexy Planet est un disque dépouillé et enfantin, aux mélodies immédiates et à la narration impeccable. C'est surtout un disque qui révèle un véritable génie pop.

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#19

Circles

Mac Miller

Circles est un album sans thème véritable, où la vie et la mort se confondent, animées par peu de mots, laissant ainsi une large possibilité d'interprétation pour l'auditeur. Mac Miller y trouve pourtant sa voix, et l'exploite sur des productions aussi douces et chaleureuses que tristes et sombres. Son tragique décès, le 7 septembre 2018, alimente d'autant plus les interprétations sur des morceaux comme "Good News" ou encore "Complicated" ("Some people want to live forever / That's way too long, I'll just live through the day") et transforme cette dernière danse en une insoutenable marche funèbre. Pourtant le disque, tout comme son auteur, n'est pas une chose "du moment", mais bien une construction que le temps ne saura altérer.

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#18

SIGN

Autechre

Dire que SIGN signe le retour de la mélodie dans la musique d’Autechre serait un non-sens complet : elle est toujours restée absolument présente. Ce nouvel opus des mancuniens est un disque quasiment feel good dans son immédiateté, et pourtant absolument magnifique. Car le duo prouve qu’il est capable de composer quelque chose de facile d’accès, et pourtant immensément Autechrien. Il propose toujours beaucoup de complexité, mais elle est plus masquée qu’avant, à la manière de ces basses qui se cachent derrières les mélodies du disque, comme un niveau à débloquer pour les fans les plus hardcore. SIGN sonne finalement comme l’aboutissement d’une très longue recherche plutôt que comme un nouveau pavé dans la mare.

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#17

Vintage

Soolking

Dans le paysage du rap français, le Maghreb joue un rôle assez paradoxal. Souvent invoqué, c’est le « bled », c’est la misère qu’on a fui, c’est un rêve perdu, mais qu’on laisse relativement à l’écart. Les rappeurs et rappeuses qui sont issus de l’immigration ont, comme les autres, cette posture assez douloureuse qui consiste à être rejeté à la fois dans son pays natal et dans le pays de leurs ancêtres. C’est peut-être ce qui explique que l’Afrique du Nord soit si présente en image mais si peu en sonorités. Dans cette perspective, Vintage est un petit bijou qui donne ses lettres de noblesse à ce qu’on appelle encore parfois “le rap à chicha” et a tout pour en faire le genre-maître du rap français dans les années à venir. De la mélodie, de la mélodie, et encore de la mélodie.

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#16

Ma vie est un film II

Infinit'

Les Alpes-Maritimes n’ont jamais autant ressemblé à Compton que quand Infinit’ le raconte. Au Nice de carte postale pollué par les retraités au pull noué sur les épaules, le rappeur du 06 oppose une plongée dans l’envers du décor : un monde parallèle où les gangsters jouent aux dés sur la Promenade, et où les petites artères de la baie sentent le goudron chaud et la poudre des balles. Un environnement sur mesure pour le sens du storytelling et de l’egotrip d’Infinit’, qui s’affiche dans un état de grâce d’une insolence rare et fascinante. Avec Ma vie est un film II, le gars se révèle une fois encore constant dans son incapacité à décevoir, son aisance à surprendre, et son habileté à offrir des disques à l’immense replay value.

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#15

Róisín Machine

Róisín Murphy

Depuis son dernier album, l’Irlandaise a entamé sa lente mue en diva disco capable d'alterner entre vrai délire communicatif et poses plus arty. Une mue qui se réalise pleinement sur Róisín Machine, fruit d’un exceptionnel travail avec Richard Barratt, pionnier de la house music dans le Sheffield des années 90. Quand une artiste de cette envergure impose le disco sur tout un album, c’est que le genre est destiné à un énième retour dans les bonnes grâces des majors et des faiseurs de tubes. Mais il est salutaire qu’une artiste au pédigrée de Róisín Murphy puisse faire exister cette renaissance avec autant d’élégance, de flair et de style

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#14

13 Organisé

13 Organisé

À la rédaction, on ne cache plus notre admiration pour JuL – ce qui n'est pas pour plaire à certains esprits chagrins. En treize ans de carrière, le rappeur de la cité Louis-Loucheur a gagné le respect des anciens, l’admiration des plus jeunes, et incarne aujourd’hui l’évolution la plus logique de ce grand barnum intergénérationnel qu’est le rap marseillais. Bref, JuL est l’élu choisi pour coordonner un disque qui convoque jusqu’à trois générations de rappeurs issus de la cité phocéenne. On en rêvait, c’est désormais une réalité avec 13 Organisé et sa palanquée de tubes.

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#13

Impenetrable Cerebral Fortress

Gulch

Annoncé seulement une semaine avant sa sortie sur Closed Casket Activities, Impenetrable Cerebral Fortress est le genre de premier disque dont l’intensité frôle l’indécence. Quinze minutes d’assaut punk hardcore sans le moindre remplissage, une attaque dont la furie qui s’en dégage prend largement le pas sur les aspects plus techniques des compositions. Inutile de chier une pendule, ce premier essai pose les bases et bouscule son auditeur. Son format condensé, la violence qui en émane et l’amalgame parfaitement réussi de plusieurs styles extrêmes font de ce Impenetrable Cerebral Fortress une expérience sonore foudroyante et marque l'avènement de Gulch comme l’une des formations les plus exaltantes qu’il nous ait été donné à découvrir en 2020.

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#12

Adios Bahamas

Népal

Le royaume du défunt Népal s'étend aussi loin que sa musique se propage, plus loin que le 75, plus loin qu'en Île-de-France, partout où la résilience se solidifie une fois que les douze coups de minuit ont sonné. Aérien et technique à la fois, puisant principalement son inspiration du Texas sous lean de Paul Wall et de la culture japonaise dans son ensemble, Adios Bahamas est une belle synthèse des errances nocturnes contées par Népal sur 444 nuits, 445ème nuit et KKSHISENS8. Si l'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt pour les sarkozystes convaincus, dans l'univers de Népal, il appartient nécessairement à ceux qui se couchent tard, traînent dans la ville en quête d'idéal et font le tour des mêmes quartiers comme si leur réflexion mimait le trajet parcouru.

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#11

How I'm Felling Now

Charli XCX

Plus expérimental et chaotique que Charli, ce how i'm feeling now conçu en confinement accentue la claustrophobie et la crise existentielle que Charli XCX essaye de partager. Ainsi, le décapant “Pink Diamond” qui ouvre l’album rappelle le côté abrasif de l'EP Vroom Vroom produit en grande partie par SOPHIE. Heureusement, elle sait également rendre ses expérimentations plus charmantes, comme sur “detonate” où des crépitements colorés nous rappellent au bon souvenir de nos premières cassettes Nintendo. Charli XCX n’a pas eu envie d'opérer un virage clair dans sa carrière avec ce projet qui ressemble davantage à une mixtape qu’à un album en bonne et due forme. En restant fidèle à ses collaborateurs habituels et en conservant une formule hyperpop qui est sa marque de fabrique depuis quelques années déjà, how i’m feeling now s’adresse avant tout à ses fans. Mais vu leur dévouement et l'énergie dont ils font preuve à la moindre de ses apparitions, ils l'avaient bien mérité.

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