Xerrox Vol.2

Alva Noto

Raster Noton – 2009
par Simon, le 3 mars 2009
9

Qu’y a-t-il encore à dire d’Alva Noto au moment de chroniquer ce deuxième opus de la série Xerrox ? On sait déjà qu’il est l’un des producteurs les plus créatifs de son époque, réinventant l’art du minimalisme électronique disque après disque. Son label, Raster Noton, est l’un des plus excitants de la sphère électronique. On pourrait également dire que le premier volet de la série précitée – qui s’attarde à transcender une ambient moléculaire travaillée au microscope  - était l’un des secrets les mieux gardés de l’année 2007. Alors oui, pour toutes ces raisons, ce Xerrox Vol.2 est bel et bien sur papier le candidat le plus sérieux au titre d’album électronique de l’année.

Habitués par le premier volume à une ambient noisy encadrée par les bruits blancs qui flottaient autour d’elle, Xerrox Vol.2 change quelque peu la donne dès les premiers instants de son déploiement. Exit donc les constructions faites à partir d’erreurs informatiques et autres imprimantes, Carsten Nicolai ouvre son microcosme à des sources extérieures, samplant entre autres Ryuichi Sakamoto et Stephen O’Malley (du groupe Sunn O)))). Et ceci a pour conséquence directe de propulser la composition vers un champ plus instrumentalisé, plus directement musical. Cette volonté d’humaniser sa musique n’a pourtant pas détourné notre Berlinois de sa passion pour l’infiniment petit, faisant rentrer tous ces micro-éléments dans un flux de lumière aveuglant. Une mise en ordre à ce point organisée que le minuscule en devient géant. Onze titres qui pourraient décrire tant l’évolution d’une cellule souche que la lente rotation de la terre. Une différence de niveau tout au plus. Ce que ces deux phénomènes ont de commun? Très certainement leur aspect mathématique, une rigueur de principe qui entraîne pourtant une beauté certaine et sans commune mesure une fois celle-ci constatée avec patience. L’évolution de la matière par l’implacable écoulement du temps.

Plus mélancoliques, voire profondément désabusées, les lentes avancées du son créent à nouveau la grandeur musicale à partir du vide physique. Une musique protestante en ce qu’elle évacue les apparats ostentatoires qui en ternissent sa profondeur spirituelle pour ne garder que le minimum minimorum essentiel à la poursuite de ses intérêts. Une conscience d’elle-même qui ne peut être atteinte que par l’organisation minutieuse de ses composantes : faire d’une vie d’ascète un devoir moral pour mieux accéder finalement au beau et au vrai. Ce programme, tout ce qu’il y a de plus antichrétien dans sa conception, se retourne légitimement vers son propre intérieur pour en observer ses incertitudes à la lumière de l’indiciblement vrai, s'ouvrant ainsi pleinement à l'autre avec une énergie retrouvée.

Mais dépouillée de toute consonance religieuse, Xerrox Vol.2 fait donc ici d’Alva Noto le premier apôtre d’une religion séculière aux accents de perfection. Xerrox Vol.1 s’intitulait sobrement « Old World », il n’est que logique de voir cette suite prendre le nom de « To The New World ». Quand on sait que la série comptera cinq volumes, on se rend compte que l’Allemand est en train d’écrire une des plus belles pages du minimalisme électronique, n’en déplaise à Fennesz ou Tim Hecker. Et dire que certains pensent qu’il ne s’agit ici que de musique.