Deutsche Elektronische Muzik : goûte mon kraut!

par Jeff, le 21 juin 2010

Jusqu'ici, quand on comptait explorer le très large territoire du rock allemand progressif, cosmique et expérimental des années 70, on avait principalement deux références pouvant servir de guide du routard. D'abord, le fameux Krautrocksampler , bouquin soigné sorti en 1995 par le musicien anglais Julian Cope et bourré de conseils d'écoute et d'anecdotes (à lire en traduction française, la version originale étant depuis longtemps épuisée et Cope se refusant toute ressortie!). Ensuite, il y avait aussi ce documentaire de BBC4 nettement plus récent et qui a acquis depuis sa découpe en tranches sur YouTube une notoriété internationale certaine. Désormais, on comptera également une troisième référence : la double compilation Deutsche Elektronische Muzik du toujours excellent label londonien Soul Jazz Records.

Sélection très abordable par le commun des mortels, le panorama de 24 morceaux éparpillés entre 1972 et 1983 couvre les grandes orientations de ce « krautock » toujours aussi peu connu du grand-public alors que son influence de seconde main et de contrebande sur la musique actuelle est pourtant énormissime. Trilogie berlinoise de David Bowie? Merci, krautrock. Public Image Limited, Joy Division, The Fall, Happy Mondays, Radiohead ? Merci, krautrock. Primal Scream, LCD Soundystem, The Horrors : tous, à un moment de leur carrière, ont pratiqué le motorik, ce fameux beat hypnotique 4/4 qui était un moment la marque de fabrique de Kraftwerk et Neu! Ambient, electronica, soundscapes? Chez Popol Vuh et Tangerine Dream... entre 10 et 15 ans avant l'apparition des premiers softwares pour fabriquer de la musique sur Mac!

Simple, en fait, le kraut. C'était basiquement du rock progressif mais il était animé par cet esprit anti-establishment, introspectif et musicalement ouvert aux plus larges spectres qui serait celui de la new-wave et de la techno quelques années plus tard. Evidemment, comme pour toute musique trop en avance sur son temps, personne n'y a gagné autrement qu'en réputation et cette histoire musicale pourtant épique et visionnaire passe toujours largement au-dessus de la tête de beaucoup de gens. Outil éducatif de premier choix, cette compilation ne changera sans doute pas grand-chose à large échelle, le kraut semblant condamné à éternellement rester un truc de connaisseurs et de pilleurs de sépultures. Bien davantage qu'un étalage de culture geek, la proposition musicale ici compilée par Soul Jazz Records n'en est pas moins un véritable plaisir, carrément doublé d'une grosse claque de créativité débridée!

Tracklist:

CD1

1. Can — Aspectacle
2. Between — Devotion
3. Harmonia — Dino
4. Gila — This Morning
5. Kollectiv — Rambo Zambo
6. Michael Bundt — La Chasse Aux Microbes
7. E.M.A.K — Filmmusik
8. Popol Vuh — Morgengruss
9. Conrad Schnitzler — Auf Dem Schwarzen Kanal
10. La Düsseldorf — Rheinita
11. Harmonia — Veterano
12. Faust — It's A Rainy Day, Sunshine Girl
13. Neu! — Hallo Gallo

CD2

1. Cluster — Heisse Lippen
2. Ibliss — Hi Life
3. Dieter Moebius — Hasenheide
4. Amon Duul II — Fly United
5. Popol Vuh — Aguirre 1
6. Ash Ra Tempel — Daydream
7. Tangerine Dream — No Man's Land
8. Amon Duul II — Wie Der Wind Am Ende Einer Strasse
9. Roedelius — Geradewohl
10. Can — I Want More
11. Deuter — Soham