Xandri

Lexi Jones

Auto production – 2025
par Albin, le 25 avril 2025
7

Marie Drucker, David Hallyday, Julie Depardieu, Benjamin Castaldi, Charles Michel… les exemples pullulent lorsque l’on s’intéresse au destin des enfants de stars internationales qui peinent à exister dans l’ombre d’un patronyme trop encombrant. Peut-on dès lors en vouloir à Lexi Jones d’avoir opté pour la voie de la discrétion au moment de sortir un premier album qu’elle a entièrement écrit, composé et produit de ses propres mains ? Certainement pas.

Néanmoins, comme on pouvait s’y attendre, les médias rarement avares de raccourcis ont vite fait d’invisibiliser le travail de la jeune femme de 24 ans et la réduire à une étiquette qui pousse au clic, celle d’un fruit pas encore tout à fait mûr sur l’arbre généalogique le plus glamour de l’histoire de la culture pop. Ce genre de traitement médiatique qui ne s’encombre même pas de relayer ta photo promo mais celle de tes darons. Ouais 2025 on t’adore !

N’en déplaise aux accros des rubriques people et carnets roses, cette chronique abordera uniquement les émotions ressenties à l’écoute de Xandri, album d’une fraîcheur étonnante et d’une personnalité solidement assumée. Du côté des influences, Lexi Jones cite à la louche Radiohead, Fiona Apple ou Elliott Smith. Ce parti pris indie s’affirme effectivement comme un élément clé de sa musique : dialogues piano guitare chuchotés, arrangements electro en pointillés, production parfois lo-fi. En s’arrêtant à ces références, on passerait toutefois à côté de la force majeure de Xandri : la voix parfaitement posée, qui trône fièrement au-dessus du mix même lorsqu’elle s’aventure sur des registres peu évidents. Oui il y a quelque chose de Lola Young, Lorde, Lana Del Rey, voire Chelsea Wolfe dans ces compositions pop-folk épurées. Cependant, Lexi Jones ose aussi s’attaquer à d’autres forteresses. Sur "Moral Compass", certainement la chanson la plus aboutie de l’album, on entendrait presque une Nancy Sinatra au sommet de son art jouant avec un épais voile d’écho pour accentuer un effet de catacombe des plus troublants. Alela Diane, autre figure marquante du renouveau folk US, n’est jamais très loin, comme sur le poignant "Standing Alone".

Bien évidemment, l’album souffre également de quelques moments plus anecdotiques, mais vite pardonnés. On oubliera sans peine l’une ou l’autre maladresse. L’essentiel est ailleurs et l’enjeu de Xandri bien plus vertigineux : Lexi Jones doit maintenant se faire un nom. Difficile à ce stade de prédire la tournure que prendra sa carrière musicale, qui dépendra certainement de ses objectifs et de l’énergie qu’elle souhaite y consacrer. Ne pas considérer ce premier album comme un essai brillamment transformé relèverait tout simplement d’une épouvantable mauvaise foi.

Porteuse d’un tel héritage, Lexi Jones aurait pu sortir son premier album sur n’importe quelle major, s’entourer des producteurs les plus illustres, rentabiliser ses gènes de génie pour attirer les flashes de la prochaine Fashion Week et s’assurer une place en haut de l’affiche du festival Coachella pour y interpréter une reprise de "Lady Stardust" au ukulélé aux millions de vues garanties sur facture. Elle a préféré s’enfermer chez elle et enregistrer des chansons très personnelles, certes imparfaites, mais riches de leurs fêlures fragiles. Pas mal quand on est la fille de Dieu himself, même si ce n’est qu’un détail.