The Reign of Terror

Sleigh Bells

Sony Music – 2012
par Gwen, le 2 avril 2012
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S’épiler le maillot à la cire, une fourchette plantée dans l’œil. Voilà à peu près les sensations que procure le dernier Sleigh Bells. Et tandis que notre oreille s’habitue peu à peu aux bourdonnements de l’acouphène, on se demande quel traumatisme a pu subir un groupe aussi prometteur pour basculer ainsi du côté obscur. 

Il y a deux ans à peine, Edward Miller et Alexis Krauss se prenaient la vague de la hype en pleine face grâce à l’intervention de M.I.A. qui s’était vivement éprise du duo de Brooklyn. Une fois la brèche ouverte, ceux-ci en avaient profité pour distribuer quelques singles torrides et préparer le débarquement de Treats, un premier album inégal mais qui fouettait tout de même pas mal. Le bon look, la bonne attitude, la bonne boîte à rythmes… Il leur suffisait de suivre l’autoroute, de prendre la sortie 4B et de garer tranquillement la Multipla dans l’allée de mémé sans démonter le daim en plastique. Si Edward et Alexis avaient collé au plan, on ne serait sans doute pas en train de chercher les survivants à l’heure actuelle. 

Nos deux compères ont donc eu envie d’expérimenter un peu et nous appuyons cette initiative sans réserve. Sortir des sentiers battus, affronter l’autorité, découvrir son corps d’adolescent… Dans l’absolu, nous approuvons l’encanaillement, quel qu’il soit.  Dans le cas des Sleigh Bells, il s’agissait principalement d’éprouver les limites de leur formule de base : des beats pachydermiques, des riffs crasseux, un chant minaudé/hurlé et une couche de pop. Après tout, pourquoi pas ? Tout est possible lorsque tu as la Foi et un minimum de talent. Mais après les premiers saignements de nez, ils auraient dû se douter que quelque chose n’allait pas. Lorsque les oiseaux sont tombés raides au sol, ils devaient bien en déduire que certains sons n’étaient pas destinés à cohabiter sur la même fréquence. Et lorsque le voisin s’est mis à sangloter en se cramponnant à son chapelet, n’était-il pas temps de débrancher l’ampli et de cesser de couiner ?

Sous le prétexte d’avancer des choix audacieux, les Sleigh Bells réalisent une panade auditive qui n’est ni agréable, ni stimulante, ni même un chouïa transgressive. Peut-être se situent-ils tellement à la pointe de l’avant-gardisme que nous ne sommes pas encore capables d’appréhender la décharge sonore qui se déploie devant nous ? Ou alors, on essaie encore de nous vendre de la merde.