(The Album)

Wilco

Nonesuch – 2009
par Jeff, le 2 août 2009
8

Loin de moi l'idée de rendre verts de jalousie les aficionados de ces parangons d'inconstance que sont Pete Doherty ou Frank Black, mais les fans de Wilco sont vraiment des pourris gâtés. En quinze années d'une carrière magnifiquement menée, le groupe incarné par la personnalité sombre de Jeff Tweedy n'a jamais manqué le moindre rendez-vous avec ses nombreux admirateurs, toujours fidèle et rarement en méforme. Certes, le voyage n'a pas toujours été de tout repos et les premiers efforts du groupe ne sont pas exempts de tout reproche, mais depuis la sortie du torturé Yankee Hotel Foxtrot, un constat s'impose: Wilco est l'une des plus brillantes étoiles de cette énorme constellation que forme le rock indé américain, capable de sortir un album d'un classicisme tout bonnement bluffant (Sky Blue Sky) comme de jouer la carte de l'expérimentation sauvage en s'acoquinant avec la légende Jim O'Rourke (A Ghost Is Born). Nous voici donc deux ans après le précédent effort, et d'emblée sur "Wilco (the song)", Jeff Tweedy n'y va pas par quatre chemins: "This is a fact that you need to know, Wilco love you baby." La dégustation peut commencer!

On le sait, depuis quelques années, Jeff Tweedy va mieux, dominant les nombreux démons qui l'habitent. Et si le côté enjoué et optimiste d'un album de Wilco doit permettre de juger de l'état de santé de son leader, disons que (The Album) laisse entrevoir une personnalité sereine, mais qui, à quelques rares moments, se permet une petite incursion du côté obscur. Certes moins léché et perfectionniste qu'un Sky Blue Sky qui a exaspéré plus d'un fan, cette nouvelle livraison n'en reste pas moins placée sous le sceau de la tranquillité et de la décontraction. Telle la bande de vieux briscards de l'indie américain qu'il est désormais, le groupe de Chicago ne se réinvente pas et nous emmène en terrain connu sur un disque qui se révèle rapidement être un mélange savoureux entre Yankee Hotel Foxtrot et Sky Blue Sky – exception faite de la belle ballade "You & I", en duo avec Feist, et qui voit le groupe jouer cette carte de la tendre délicatesse si chère à la Canadienne. Aussi, si vous avez aimé les deux albums précités, que les ritournelles décontractées lacérées par de crapuleux moments de bravoure guitaristique sont votre pain quotidien, que vous ne crachez pas sur des ballades déchirantes chantées par un mec qui semble avoir vécu 10 vies d'emmerdes, que vous aimez la musique qui respire l'Amérique profonde par tous les pores et que voir un groupe en totale alchimie prouver d'un bout à l'autre d'un album qu'il écrase la concurrence en toute décontraction et en moins de 45 minutes montre en main, alors (The Album) est fait pour vous!

Quant à nos lecteurs qui ne se seraient pas encore laissé tenter par ce qui s'impose aujourd'hui comme l'un des groupes les plus attachants et les plus performants d'outre-Atlantique, j'ose espérer qu'ils savent désormais ce qu'il leur reste à faire…

Le goût des autres :
7 Nicolas 6 Julien