Stubborn Heart

Stubborn Heart

One Little Indian – 2012
par Jeff, le 12 décembre 2012
8

En Grande-Bretagne,  une relation ténue a toujours existé entre musique et déréliction urbaine. Cette relation n'est évidemment pas propre aux seuls sujets de Sa Majesté, mais il est indéniable que ces adorables bouffeurs de fish & chips ont réussi mieux que quiconque à l'exploiter. Du Original Pirate Material de The Streets au Untrue de Burial en passant par le Ghost Town des Specials, nombreuses sont les œuvres britanniques qui laissent dans la bouche un arrière-goût de béton décati, en n'oubliant pourtant jamais que derrière cette noirceur de façade se cache souvent la lumière.

A cette longue liste d'albums brièvement esquissée en début de chronique, il faut ajouter le premier disque de Stubborn Heart, binôme composé de Luca Santucci et Ben Fitzgerald.

Poussé à l'origine par Kaya Kaya (structure appartenant au mastodonte XL Recordings de Richard Russell) et désormais sur One Little Indian, le binôme qui emprunte son nom à un vieux classique de Northern Soul s'impose clairement comme l'une des belles révélations de cette fin d'année avec un disque qui conjugue à tous les temps romantisme, élégance et noirceur. Post-dubstep comme a pu l'être Darkstar sur North et post-moderne à la manière d'un Portishead dernière mouture, cet album éponyme n'est qu'une longue ode glaçante à la beauté, un enchaînement de pistes racées qui foutent autant de frissons dans la nuque qu'elles vous filent la chair de poule.

En même temps, on le sentait venir ce carton. Déjà l'année dernière, Stubborn Heart nous avait mis l'eau à la bouche avec une poignée de titres à l'élégante froideur, qui se retrouvent tous au tracklisting final. Il y a évidemment le tube en puissance "Need Someone", déchirante mélopée placée en orbite par le falsetto fascinant de Luca Santucci, ou "Interpol", qui renvoie sans conteste aux passages les plus sombres du Third de la bande à Beth Gibbons.

Ailleurs sur le disque, tout est question d'équilibre, jamais instable et toujours subtil, entre giclures bass music, aspirations pop et dorures soul. Alors forcément, on se réjouit que les huit autres titres présents sur cet album éponyme forment un ensemble cohérent, duquel rien n'émerge vraiment mais où tout fonctionne à merveille.