Mystère

La Femme

Barclay – 2016
par Jeff, le 6 septembre 2016
8

Quant on connaît un peu la capacité d’une major à tout tremper dans un grand bain de détergent et quand on connaît un peu l’incapacité du ‘rock français’ (ouh le vilain mot !) à proposer un vrai produit de qualité, on se doit de véritablement célébrer l’avènement d’un groupe comme La Femme.

En effet, à l’heure actuelle, difficile de trouver un groupe, qui plus est chantant en français, capable de fédérer un public extrêmement large et hétérogène, qui va des lecteurs des Inrocks aux auditeurs de France Inter en passant par les blogueuses mode, les loubards 2.0 qui vouent un culte à Born Bad Records ou les publicitaires français à la recherche d’ambiances sonores bon marché.  

Un engouement pour quoi au final ? Un mélange totalement improbable entre post-punk, glam, folk, surf music, pop et new wave dont on se demande encore comment il parvient à fonctionner dans de telles proportions d’acceptation par les masses. En même temps, dans un monde où Nickelback continue de remplir des salles de 15.000 places un peu partout où ils passent (même chez nous), on a arrêté de chercher un sens à l’expression ‘les clés du succès’.

La Femme donc, et le putain d’album de la confirmation. Celui qui semble imposer des grilles de lecture totalement différentes, ne tolère pas l’échec ou la petite baisse de régime qui tue. Mais pas trop de soucis à se faire de ce côté-là : le groupe nous a démoulé un truc totalement improbable et intouchable, que l’on rattachera assez facilement à Psycho Tropical Berlin sans pour autant en être une sorte de copie carbone.

Alors certes, on retrouve bien cette attitude débonnaire et punk qui a fait le succès du groupe, mais celle-ci se met au service d’un disque autrement plus ambitieux et qui a remisé au placard les marottes surf-rock du groupe pour les remplacer par une envie de « tout-au-psyché » incarnée à merveille par l’inaugural et incroyable « Sphynx », qui symbolise à lui seul l’ambition folle et débridée de La Femme et sa volonté de ne s’imposer aucune limite, aucun carcan. 

Dans ce grand bordel sous influence(s), où la bonne surprise est en permanence en embuscade, on se laisse séduire par un groupe qui remplit l’espace sans pour autant nous asphyxier. Et puis surtout, derrière des paroles qui semblent parfois sortir d’un mauvais disque de Plastic Bertrand, on finit par comprendre ce que nous racontent Marlon Magnée et Sacha Got (et les nombreuses chanteuses invitées, qui se fondent à merveille dans l’ensemble), comme sur l’émouvant « Septembre » qui commence comme une rengaine légère sur la fin des vacances pour embrayer l’air de pas y toucher sur un message à l’adresse d’une jeunesse perdue et désabusée. Et puis bon, un groupe qui arrive à nous faire adorer un titre entier qui parle de mycoses vaginales qui grattent est forcément un grand groupe.