Memory in Vivo Exposure

Tomaga

Hands In The Dark – 2017
par Émile, le 13 décembre 2017
8

La musique de Tomaga n'est pas expérimentale dans le sens où le duo anglais chercherait à pousser les limites de la musique contemporaine dans une sérieuse arrogance, mais dans le sens où ses albums sont des espaces de jeu. C'est une véritable expérimentation ludique qui tire son origine de l'histoire du groupe. Valentina Magaletti et Tom Relleen sont respectivement la batteuse et le bassiste du (très bon) groupe de rock psyché anglais The Oscillation. Sauf que The Oscillation est avant tout le bébé de Demian Castellanos. C'est en filigrane de ce travail qui ne leur appartenait pas vraiment que s'est créé Tomaga en 2014, afin de digérer toutes les idées qui venaient aux deux musiciens dans un espace de création et de liberté qui leur était propre.

Difficile de définir leur style, tant ils font preuve d'une inventivité et d'une diversité insaisissables dans la composition. Si l'EP Greetings From The Bitter End sorti en début d'année semblait très inspiré par le trip hop et la cold wave, ils semblent aujourd'hui explorer un tout autre univers. Ainsi, le premier titre offre une grande dissertation programmatique tout droit héritée de la musique de Terry Riley et de Steve Reich - de la répétition, des claves et des marimbas à gogo pour nous plonger dans une transe moderne. Autour de ce morceau, sous la forme de tentacules, trois excroissances évoquent des rituels magiques, la musique bruitiste, les sons de la nature, l'atelier d'un vieil horloger, des pensées qui s'égarent librement et qu'on prend un doux plaisir à regarder voltiger.

A partir de cette inspiration de la musique minimaliste, cela aurait été facile de faire une habile mais habituelle revisite ; il n'en est rien : leur musique est certes expérimentale, mais elle boude l'ennui. Cela aurait également été facile de faire une musique angoissante et douloureuse, comme on en a l'habitude dans l'experimental ambient : c'est pourtant une vraie jovialité qui s'échappe de l'EP, et c'est probablement ce qui marque le plus à l'écoute.

L'année 2017 de Tomaga nous donne envie d'en faire le groupe à conseiller pour s'initier à ces fameuses musiques obliques dérivées des musiques populaires ; car si l'ambiance est très différente ce ce qui se fait avec The Oscillation, ils en ont assurément retiré ce qu'on avait pu y découvrir il y a quelques années, c'est-à-dire l'incroyable capacité d'étonner sans ennuyer, de transformer sans détruire, de mélanger sans choquer. Dans Memory in Vivo Exposure, l'inquiétude ne perce jamais à jour et la créativité pousse à vue d'oeil. Tomaga y propose une musique qu'on dira littéralement jouée, comme deux enfants qu'on aurait laissés à leur monde avec des lego sonores.

Le goût des autres :
8 Albin