Dross Glop

Battles

Warp – 2012
par Jeff, le 2 mai 2012
8

Même si le Gloss Drop de Battles s’est pris un beau 9/10 et s’est payé le luxe de figurer en très bonne position dans notre classement de fin d’année, cette note doit être quelque peu tempérée par le double 5/10 attribuée par deux éminents membres de notre équipe via le fameux « Goût des autres » qui accompagne certains papiers du site. Parmi ces esprits chagrins, l’auteur de ces quelques lignes, qui reste convaincu que le départ de Tyondaï Braxton est l’une des pires crasses qui soit jamais arrivée au groupe et que Battles qui fait du sous-Battles (presque tous les titres de Gloss Drop) ou s’essaie à faire de l’electro-pop de cirque en invitant ce saltimbanque de Mattias Aguayo, c’est comique deux minutes mais ça tape vite sur le système.

Déjà énervé par le flop qu’a constitué à titre tout personnel ce dernier album de Battles, Warp en remettait une couche en annonçant la sortie d’un album de remixes, dont le seul véritable attrait a résidé jusqu’à sa sortie dans sa pochette tellement hideuse qu’elle en devenait belle. Pour le reste, on sentait venir le truc gros comme une maison : on met à contribution le carnet d’adresses gigantesque du label, on trouve quelques noms ronflants qui ont un peu de temps libre dans leurs agendas respectifs démentiels pour nous pondre des relectures pas bien bandantes et on commercialise le tout histoire d’avoir quelque chose à vendre au stand merchandising de la tournée 2012.  Loin de nous l’idée d’être d’une mauvaise foi crasse sur ce coup-là, mais il faut bien avouer que de récents exercices similaires nous ont amené à tant de méfiance. Mais voilà, il fallait bien une exception à la règle, et c’est ce Dross Glop qui s’y colle pour notre plus grand plaisir.

En fait, la vraie belle surprise de ce disque, elle ne vient pas du casting retenu pour mettre en musique cet exercice de style mais bien du traitement apporté à la matière première par la brochette de remixeurs soigneusement sélectionnés. Certes, on n’a pas fait appel à la pire engeance de bras cassés, mais ceux-ci font par ailleurs montre d’une réappropriation qui aurait à première vue pu sembler compliquée vu le caractère résolument original du matériau de base. Mais voilà, quand on s’appelle Gang Gang Dance, Hudson Mohawke, Kode9, The Field ou Shabazz Palaces, on peut se dire qu’on a affaire à des artistes à l’identité sonore tellement marquée qu’ils ne tomberont pas dans le piège de la courbette forcée.

Et on se retrouve donc avec un disque dont l’improbable variété n’est nullement un frein à l’écoute. Il faut dire que cet argument est vite balayé par la qualité exceptionnelle de la toute grosse majorité des remixes : Gui Boratto fait monter le BPM et donne une petite leçon de « house-tech made in Kompakt », The Alchemist transforme « Futura » en une banger hip hop qui n’aurait pas dépareillé sur le disque de Gangrene, The Field jongle avec des boucles droguées sur neuf minutes de techno en apesanteur et EYE transforme « Sundome » en une cavalcade africanisante plutôt irrésistible. Et ce ne sont ici que quatre exemples censés vous mettre l’eau à la bouche. Mais n’ayez crainte, le reste de Dross Glop est du même acabit. Et finalement, c'est là où on les attendait le moins que les gars de Battles nous suprennent. La griffe des grands, dira-t-on...

Le goût des autres :
5 Laurent 8 David