Interview

Genono

par Tariq, le 12 décembre 2016

Qu'on se le dise, Genono est un journaliste à l'image de ses multiples contributions pour Noisey, Mouv' ou, depuis peu, OKLM Radio : un mec simple, direct, qui fait les choses avant tout par amour de la déconne. Il a d’ailleurs accepté de quitter sa Mantes-la-Jolie de résidence le jour de son anniversaire pour répondre à nos questions dans le quartier parisien de la Gare Saint-Lazare. 

"Je sais même pas pourquoi vous êtes là en fait" nous confiera-t-il au détour d'une question. Si, si, nous on sait pourquoi on est là Genono : pour parler de tes débuts dans le journalisme rap - qui remonte à 2013 avec le lancement de ta plateforme Captcha Mag, de tes papiers toujours bien sentis et de tes projets actuels (le label Captcha Limited Records et la chaîne de télé VICELAND). C'est parti ! 

Goûte Mes Disques : Pour commencer, peux-tu nous parler de tes premiers contacts avec le rap ? 

Genono : Alors là, je vais me décrédibiliser tout de suite : mon premier contact avec le rap c'est le morceau "Casanova" du groupe Ultimate Kaos. C'était un groupe moitié hip-hop, moitié boys band, qui sévissait à la même époque que les 2Be3. Voilà pour la street-cred ! Après, comme tout le monde, y a eu Manau, Les Flammes du Mal de Passi, MC Solaar un peu, même si j'ai jamais trop accroché. 

GMD : T'écoutais pas de rap US ? 

Genono : Non, pas vraiment. Quand j'écoutes du rap, j'ai besoin de comprendre ce que ça raconte, même si ça raconte de la merde la plupart du temps ! Pour moi, le rap US, c'est trop loin... Leurs univers, leurs trucs, j'arrive pas à me projeter là-dedans. Après quand t'écoutes Passi, tu es exposé à tout ce qui passe à côté : Biggie, Snoop, Dr. Dre, Eminem... Mais j'ai toujours été plus porté sur le rap français. Ma première grande passion dans le rap c'était NTM.

GMD : Qu'est ce qui t'a particulièrement parlé chez NTM ? 

Genono : C'est la musique que tes parents n'écoutent pas, y a un côté un peu... je vais pas dire subversif parce que ce serait exagéré mais voilà quoi... Quand à la maison on écoute Claude François et que toi tu écoutes Joey Starr, t'as l'impression de t'encanailler un peu. Puis ça allait à l'encontre du discours dominant, y a un côté un peu cool, rebelle... L'adolescence quoi. 

GMD : À quel moment tu as senti que tu avais un rapport privilégié avec cette musique, au point de vouloir écrire sur le rap ? 

Genono : En vrai, c'est assez récent. J'ai longtemps été un auditeur lambda. Ça vient surtout de l'envie d'écrire. J'ai toujours aimé écrire mais j'arrivais pas vraiment à trouver de sujets à traiter. En fait, j'ai eu une connexion internet super tard, genre vers mes 20 ans. Et là, j'ai découvert les blogs et tout, et ç'a été une vraie révolution pour moi ! J'ai commencé à écrire des quelques chroniques sur un petit blog qui n'est probablement plus en ligne... 

Puis, de fil en aiguille, j'ai eu envie de faire ça de manière un peu plus sérieuse et lancer un vrai site... Enfin, vrai site, c'est un peu fort, parce que Captcha ne ressemblait pas à grand chose au début. L'idée c'était vraiment de me faire plaisir, je me disais même si j'ai que 20 lecteurs, au moins j'aurai fait mon truc. J'aurais jamais pensé écrire un jour pour Mouv' ou Vice, ou même qu'il y aurait des mecs qui viendraient m'interviewer pour... pour... je sais même pas pourquoi vous êtes là en vrai ! (rires)

GMD : Quelles étaient les références que tu avais en tête lors de la création de Captcha Mag ?

Genono : Je vais faire une révélation : à un moment donné, j’ai hésité à postuler à l'abcdr du son. Ils avaient publié un article qui s'appelait « Al K-Pote expliqué à ma chienne de femme ». J'ai dû le lire 300 fois cet article ! Déjà j'étais content de voir des gens parler d'Alkpote. Et ils avaient compris le truc avec lui, ils avaient compris que c’était beaucoup plus que du rap de cité de base. Au final j'ai pas postulé, mais c'est un des trucs qui m'a donné envie d'écrire. J’aimais beaucoup cette idée qu’il y avait chez eux d’intellectualiser le truc à fond, de prendre un rappeur qui raconte que des conneries et d’en faire le nouveau Baudelaire.

Mais ma vraie influence c'est Le Blavog (ndlr : blog culte de l'internet rap, connu notamment pour ses dialogues fictifs et hilarants entre rappeurs) bien évidemment. Aujourd’hui encore, je lis des articles de Yérim (ndlr : Yérim Sar aka Spleenter, l'un des deux fondateurs, avec Teobaldo, du Blavog) et je pompe la moitié des trucs (rires). Ce que que je kiffais chez eux, c’était que quand tu lisais leurs trucs t’étais mort de rire et, en même temps, tu sentais que les mecs connaissaient très bien leurs sujets, ça fourmillait de références hyper pointues. C’est ce qui m’a donné envie d’aller dans cette direction, sans faire exactement la même chose : si j’avais refait des dialogues comme eux, on m’aurait dit « tu te fous de la gueule de qui ? » Donc, je dirais que ma ligne directrice pour Captcha, c’était un peu un mélange de l’abcdr et du Blavog.

GMD : Vous vous êtes connectés d’ailleurs par la suite avec le Blavog…

Genono : Ouais, ça s’est fait via Twitter. J’ai commencé à suivre Teobaldo et Spleenter. Et eux ont vu que j’avais lancé mon site et que je kiffais leur travail. Du coup, ils m’ont proposé un deal : j’avais la possibilité de publier leurs dialogues sur mon site – déjà, truc de ouf ! - mais en échange je devais aller les interviewer  - encore mieux, j’arrive tout de suite ! C’est comme ça qu’on s’est connectés, on s’est bien entendus et on a commencé à aller faire des interviews ensemble : Butter Bullets, Escobar Macson, Zekwe Ramos… 

GMD : Ah oui, ces fameuses interviews filmées dans une chambre...

Genono : Ouais c’était chez Teobaldo à l’époque. Y a eu tellement d’interviews dans cette obscure chambre ! Bref, ils m’ont amené un peu de visibilité, ç'a crédibilisé Captcha de collaborer avec le Blavog. Et en plus de ça, malgré eux, ils m'ont un peu formé : j’ai pu voir leur manière de faire, les erreurs à ne pas faire… Dès que je posais une question pourrie, ils me disaient : « Nan, nan c’est pourri, retire-ça ! ». Donc moi qui voulais aller dans la même direction qu’eux, c’était tout benef', j’ai pu m’imprégner de leur façon de travailler.

GMD : Petit à petit, une équipe s’est formée autour de toi à Captcha. Il y a eu des contributions du Blavog mais aussi du journaliste Jean-Pierre Labarthe (écrivain et journaliste, auteur de trois livres de référence sur le rap et la musique du Sud des États-Unis dont l'immanquable Gangsta Gumbo 'Une anthologie du rap sudiste via Houston, Memphis, Atlanta, Miami, Jackson et La Nouvelle-Orléans). Comment s'est faite la connexion ? 

Genono : Alors ça, c’était un peu le coup de pot. Il m'a contacté en me disant qu'il voulait écrire sur mon site. Donc j'ai checké son CV et j'ai halluciné. Du coup, forcément j'ai été obligé de le prévenir : « T'es au courant qu'on a trente lecteurs par mois et qu'on va pas te rémunérer ? ». (rires) Il m'avait répondu qu'il s'en foutait, qu'il kiffait le ton. Il m'a même demandé si j'avais des directives ! C'est comme si tu dirigeais un club amateur en DH et que Messi venait frapper à ta porte pour venir jouer pour toi, gratos. C’était surréaliste ! Il a beaucoup aidé à crédibiliser le site. Un mec comme ça qui vient écrire pour toi... C'est fou. C'est concret, il s'y connaît mieux que quiconque et en plus il a une vraie plume, reconnaissable entre mille.

GMD : Vous avez eu l'occasion de vous rencontrer ?

Jamais, tout est resté à distance. Il m'avait invité à Toulouse mais on a des vies compliquées, du coup on n'a pas encore eu l'occasion encore de se voir.

GMD : Dans le fond, tu as eu les bons parrains... 

Genono : Mais à mort ! Les mecs étaient placés là pour me donner un coup de pouce. Ils m'attendaient presque !

GMD : C'est quoi l'équipe actuelle chez Captcha du coup ?

Genono : C'est très informel, il n'y a pas vraiment d'équipe. Des gens qui sont arrivés récemment et qui alimentent de temps en temps le site (Vladeck Trocherie,  Clément Apicella). Y a aussi pas mal de gens qui m'envoient des articles que je refuse. On essaie de ne pas s'éparpiller et d'avoir une espèce de marque de fabrique, des choses qu'on ne trouvera pas ailleurs que sur Captcha Mag. Ce qui explique un peu qu'il est plus vraiment actif, c'est dommage mais voilà j'ai plus tellement le temps de m'en occuper, sauf cas exceptionnels – comme une interview d'Alkpote – parce que le site ne me rapporte rien financièrement. J'aimerais bien trouver de nouveaux rédacteurs pour faire vivre un peu ce projet, mais là où l'abcdr a une certaine notoriété et un certain crédit qui fait que les gens sont heureux d'écrire pour eux, nous c'est un peu différent.

GMD : Après Captcha, tu as commencé à écrire pour Noisey, à la même époque que Yérim. Qu’est-ce qu’ils sont venus chercher chez vous selon toi ? 

Genono : En fait, avant, nous ils ne parlaient pas ou très peu de rap français sur Noisey. Je pense qu'ils cherchaient un certain ton, quelque chose un peu à contre-courant du reste du journalisme rap, des gens qui n'ont pas peur de critiquer tel ou tel artiste ou de dire si c'est de la merde. Je pense pas qu'ils soient venus me chercher pour ma plume - c'était pas du tout au point à l'époque- mais plutôt pour le choix des sujets. 

En plus, à la base, je savais pas que c'était rémunéré, je voyais Noisey US, ça tuait ! Et ça s'est bien passé avec eux, ils étaient contents de mon taf donc c'était gagnant-gagnant. Ils me laissent vraiment libre sur le nombre de caractères. Bon, ça arrive qu'ils refusent certains de mes articles mais j'ai des idées chelou des fois moi aussi. (rires) Mouv' est moins sélectif par exemple ! J'essaie de les tester pour voir si des trucs un peu chauds peuvent être enlevés et, au final, 95% du temps ça passe (rires). Des fois, j'arrive à placer des mecs qui font 200 écoutes dans l'année, c'est magnifique ! Même Vice m'a donné carte blanche pour un portrait de rappeur pour leur format papier, j'ai réussi à placer Rochdi. Je lui ai même fait faire une séance photo. (rires)

GMD : Papiers pour Noisey, chroniques à l'antenne de Mouv' ... (depuis notre interview, Genono fait également des apparitions régulières dans l'émission La Sauce de Mehdi Maïzi sur OKLM Radio). Jusqu'où tu te vois aller ? Tu te verrais faire de la télévision ? 

Genono : J’ai commencé à bosser pour la télé depuis quelques mois. La chaîne de télé de Vice, VICELAND, va bientôt être lancée (ndlr : elle est depuis disponible en France). Je commence à travailler sur l’écriture de scénarios, d’interviews télévisées. Je pensais que ça serait compliqué parce que je n’avais jamais fait ça et en fait, ça va, je me sens à l’aise. Et puis on me laisse, encore une fois, une liberté quasi-totale donc c’est cool.

Je peux pas encore trop en dire là-dessus, déjà parce que je sais pas ce que j’ai le droit de dire ou pas (rires). À la base, on m’a demandé de présenter des reportages. Ce que je ne vais pas faire finalement parce que j’ai pas le temps. Ça demandait des déplacements fréquents en France et à l’étranger, chose que je ne peux pas faire parce que j’ai une famille, trois enfants et un taff à côté. Donc, je peux pas mettre ça de côté pour aller me retrouver avec des rappeurs, avec des bandits ou je-ne-sais-quoi. Après, c’est un truc qui m’aurait plu parce que, les rares fois où j’ai été amené à me retrouver devant une caméra, je me suis senti plutôt à l’aise. Peut-être que ça viendra.

GMD : Abordons la dernière de tes nombreuses casquettes : patron de label. Tu as récemment lancé la plateforme Captcha Limited Records - dont on vous parlait plus en détail ici (micro-label indépendant, la structure se propose de distribuer en version physique des albums de "rap de niche". Pour sa grande première, CLR a proposé l'album Dude Life de Moïse The Dude). L'exemple qui nous vient tout de suite en tête quand on pense à un journaliste rap qui a réussi sa reconversion dans la production musicale, c’est Jean Pierre Seck (journaliste rap dans les années 90 devenu l'un des patrons du label 45 Scientific de Lunatic et Booba). Du coup, Dude Life est-t-il le Mauvais Œil des années 2010 ?

Genono : (rires) L’objectif c’est pas le disque d’or hein ! (ndlr : Lunatic fut le premier groupe de rap indépendant à obtenir un disque d'or avec son album Mauvais Œil) ! Le lancement s’est super bien passé. C’était un test et les retours ont été super positifs. Un grand merci aux sites qui ont relayé l’initiative. La démarche est toujours la même : mettre des mecs underground en avant. Donc on a fait 100 exemplaires en édition limitée et numérotée pour apporter un petit plus.

C'était cool de faire ça avec Moïse The Dude. Moi, je trouve ça toujours relou en fait, y a des gens que t’écoutes à longueur de temps et dont tu n’as jamais le skeud entre les mains. Comme si le truc existait pas vraiment quoi. Si internet crashe, le truc existe plus quoi ! On a essayé de faire un objet un peu joli, propre.

En tout cas, on est largement rentré dans nos frais. Et on a décidé que le peu d’argent qu’on arriverait à dégager avec ça, on l’investirait dans la sortie suivante.

GMD : Et donc, ce qui sera ?

Genono : On a comme ligne de conduite de ne rien annoncer tant qu’on n’a pas les CDs dans les mains. On connaît trop bien le rap français, les « tkt ça arrive ». Les gens qui suivent Captcha en général ne pourront qu’aimer. Je pense que y a pas vraiment de surprise et qu’en réfléchissant un peu, on peut trouver de qui il s’agira.

Pour l’instant, on publie des projets qui sont déjà sortis en digital. Mais à terme, on aimerait pouvoir faire des exclusivités en physique. Je pense qu’un mec comme Jorrdee – pour en avoir parlé avec lui – ça peut être intéressant. C’est ce qu’ils ont essayé de faire avec Ténébreuse Musique. Malheureusement ça a leaké.

GMD : Du coup, est-ce qu’à terme tu souhaites pousser le concept un peu plus loin et t’impliquer dans le processus de création, comme un vrai label quoi ? 

Genono : M’impliquer dans la création, je pense pas que ça soit nécessaire sauf si l’artiste me le demande. Après, moi, je déteste le studio et, en plus, j’ai vraiment envie que l’artiste arrive avec sa vision du truc et même, si possible, ses visuels et tout…  Et que nous on arrive en bout de chaîne pour le proposer aux gens. Sinon, ce serait un peu hypocrite, je passe ma vie à critiquer les DA, les labels, etc. si c’est pour faire la même chose qu’eux à la fin…

GMD : Comment t’est venue cette idée ?

Genono : En fait l’idée ne vient pas de moi. C’est mes deux acolytes – Singe Mongol et Young Did – qui font vraiment 95 % du taff là-dessus. Moi, je suis juste là pour faire la vitrine. Je m’en rendais pas compte mais c’est un taff monstre. Faut tout déclarer à la SACEM : les beatmakers, les samples,…

Singe Mongol, c’est lui qui s’est occupé de tout pour Ténébreuse Musique. Il s’est impliqué comme un ouf et si le CD a vu le jour, c’est grâce à lui uniquement. Et du coup, après cette expérience, il m’a dit « On peut faire un Cash Money à la française ». Du coup, ils ont tout manigancé avec Young Did et ils m’ont dit « toi tu t’occupes de relayer et de faire la vitrine du projet ». Bah OK !

GMD : Tu peux nous parler un peu de Singe Mongol et Young Did ?

Genono : En fait, c’est des mecs qui viennent de la scène un peu punk, alternative et qui se sont intéressés au rap tardivement. Et ils ont bouffé du rap jusqu’au point où ils s’y connaissent mieux que quiconque aujourd’hui. Ils connaissent plein de scènes super underground que personne ne connaît.

Singe Mongol, à la base, il est dessinateur, je crois qu’il bossait dans la publicité. Et à côté, il dessinait Alkpote et il a commencé à lui envoyer ses dessins. IL les a relayés. Ils ont commencé à bosser un peu ensemble. Puis il s’est dit "je veux un album collaboratif entre Alkpote et Butter Bullets". Il lancé le kickstarter.

Et lui et moi, on appréciait nos travaux respectifs donc on s’est mis en relation. J’ai une bonne étoile. J’y suis pour rien. J’ai jamais postulé chez personne et à chaque fois, on est venu me chercher. C’est la preuve que si tu fais tes trucs, sans trop te poser de questions, sans chercher à plaire à un untel ou untel, ça peut marcher. Ca peut aussi ne pas marcher mais ça peut marcher.

On va essayer de faire plus de sorties. Que ce soit plus régulier. La première, c’était vraiment un test. Mon objectif perso ce serait de faire une sortie par mois. Ça va demander beaucoup de travail à mes collègues (rires ). Mais en vrai, j’suis motivé et j’ai envie de m’impliquer davantage. J’ai envie de faire de ce truc-là un truc réel, qui prenne une vraie dimension.

GMD : Récemment, tu as commencé à publier des articles chez Motherboard, la branche sciences et technologies du groupe Vice. Tu aspires de plus en plus à écrire sur autre chose que le rap ?

Ouais, je suis super content, ça tue ! À la base, j'avais pas spécialement envie de m'enfermer dans le rap, car dès que tu veux faire autre chose, t'es vite pas crédible. Perso, je suis un gros passionné de sciences, de trucs chelou, et je suivais pas mal tout ce que la branche américaine du site pouvait sortir. 

Là encore, ils me laissent vraiment carte blanche, je peux écrire sur les conneries que je veux. Du coup, ça me permet d'élargir et d'écrire sur d'autres choses que le rap et de me rendre compte que j'en suis capable. Après, le travail est pas tout à fait le même puisque ça demande des recherches, de l'intérêt sur d'autres choses. Et ils m'ont proposé une série d'articles où je prends des éléments de la culture populaire et je pose la question de leur transposition dans une réalité scientifique. Par exemple, l'article sur lequel je bosse actuellement c'est : « Est ce que le tortues ninjas pourraient exister dans le monde réel ? ». J'aime tellement ma vie mec, c'est magnifique (rires).

GMD : Tu as eu affaire à une véritable tempête de critiques quand tu as tweeté à propos de l'affaire du burkini l'été dernier. Du coup, t'appréhendes pas le fait de quitter le terrain musical pour des sujets plus "sérieux" ? 

Genono : Tant qu'on me critique pas sur la forme, pour me dire que mon article est mal construit ou mal écrit, ça me touche peu. Je trouve ça même presque beau de regarder un peu les effusions de commentaires, qu'ils soient positifs ou négatifs.

Dans ma vie de tous les jours, je suis un relou, j'aime bien titiller jusqu'à ce que les gens craquent. Après, j'aime pas me placer en représentant de ma communauté. Quand je parle en tant que Musulman, les gens peuvent avoir le raccourci facile et penser que c'est une partie des Musulmans de France qui pensent comme moi. Du coup, je dois faire très attention à ce que je dis quand je m'engage dans cette voie, ne pas faire de discrédit à d'autres Musulmans qui peuvent penser différemment.

GMD : Retour à la musique. Quelles sont les sorties que tu attends en rap FR ?

Genono : Le prochain LIM. Je suis un grand fan ! (également sorti depuis notre interview, décidément...) J’attends l’album de Samira. C’est une chanteuse R&B qui chante des refrains de LIM, un peu avec le style à Léa Castel, mais en disant « nique ta mère ! »

L.O.A.S, le prochain, j’ai pu l’écouter, c’est incroyable. Mais je suis très client. Jul, mais j’attends rien de lui, je suis content de l’observer de l’extérieur. Ses albums, y a 3-4 sons que je vais écouter en boucle, comme un autiste mais pas au-delà. Mais je kiffe, il ose des trucs que personne n’ose. En fait, y a trop de trucs qui sortent, t’as pas le temps d’attendre. Donc j’écoute les sorties. 

GMD : Tu te verrais écouter encore du rap dans 10 ans, 20 ans ?

Genono : En vrai, j’aimerais bien arrêter complètement d’en écouter. Mais je pense que c’est impossible. Je pense que le seul moyen, c’est d’arrêter pendant un moment. Et ça va tellement vite, que quand tu reviens, tu peux vite être dépassé par le nombre de groupes, de tendances, etc. Du coup, ça peut te permettre de zapper complètement. 

Mais en soi, tu peux écouter du rap jusqu’à 50 ans. Les mecs vieillissent avec nous : Booba a 40 ans. Ou même plus underground, Joe Lucazz, il approche de la quarantaine, mais il est toujours pertinent.

C’est une musique qui évolue, qui vieillit avec nous. La question de l’âge se posait peut-être il y a quelques années, mais aujourd’hui c’est terminé.