La piste à suivre du jour: Chickfight
On aurait pu les vendre comme quatre rejetons sortis de Californie, assurant la première partie de Rancid avec leur guitares Gibson fraîchement payées par leurs pères et mères pleins aux as. Ces quatre-là feraient du skate comme leurs idoles, fumeraient de la weed hors de prix et glousseraient de voir leurs groupies s'exciter tout en ignorant que leur batteur n'a même pas de diplôme d'études secondaires. Mais non. Ces quatre-là viennent de Belgique, une presqu'île continentale où il pleut en permanence, plus précisément d'une région liégeoise qui sent la bière pas chère et les trips nocturnes au rabais. Pas l'idéal a priori pour débuter une carrière dans le punk-rock. Qu'importe finalement car, comme pour tant d'autres, la reconnaissance sera ici une affaire de travail et de maturité.
Actifs depuis quatre ans sur une scène belge qui s'enlise dans une paresse grandissante, les quatre de Chickfight ont gagné leurs gallons en prestant pour des évènements référence (notamment Les Ardentes ou encore Les Francofolies de Spa) autant que dans les caves pourlingues de Sa Majesté. De quoi faire de leur premier album – Slackers And Slaves – un micro-événement qui mérite toute notre attention. Le contenu étonne par sa sagesse : du punk-rock tout ce qu'il y a de plus américain, calé sur la fréquence 90's; bref, un vrai manifeste qui n'a rien de bleu-blanc-belge. Sept titres, vingt minutes et une poignée de tubes pour un premier EP qui aurait pu figurer dans la bande-originale du prochain Tony Hawk Pro Skater. Slackers And Slaves est à ce titre une synthèse aboutie des Anti-Flag, Blink-182, Rancid et autres No Fx : un objet abouti et sûr de ses références.
Chickfight - Slackers and slaves EP trailer from Chickfight on Vimeo.
Pour s'assurer complètement de la qualité du nouveau-né, nous nous sommes même rendus à la "release party" qui se tenait à L'Escalier liégeois. Les crêtes et punks à chien sont autorisés à l'entrée, ce qui est sûr par contre, c'est qu'on les retrouvera mélangés à un public hétérogène – preuve, s'il le fallait encore, que la musique de Chickfight tend à l'universalité. Le temps d'un concert bien chargé, on s'enfilera des mousses, on prendra dans les dents des riffs en forme de barres à mine, on se boira à nouveau des mousses et on se reprendra des riffs dans la face. Et on finira pleins comme une boite d'œufs. Un concert de punk quoi. Ce qu'on retiendra par contre, c'est la finesse générale de la composition, tout en lignes claires. L'ensemble est joué sur une dynamique logiquement old school : ça joue vite et bien, ça n'oublie rien en chemin et ça monte haut dans les tours. Un vrai groupe de punk quoi.
La galette et le concert ont montré patte blanche, et nous donnent ainsi des motifs suffisants de croire en la jeunesse et le talent de ces quatre branleurs. Tout en justesse et en humilité, Chickfight et leur Slackers And Slaves viennent de s'imposer comme une alternative supplémentaire à l'éventail du rock wallon de qualité. Et rien que pour ça, on les en remercie.