The Shape Of Fluidity

Dool

Prophecy Productions – 2024
par Guigui, le 30 avril 2024
8

Dans cette news datant du 31 janvier dernier, nous vous faisions comprendre que le printemps serait grisâtre avec ce nouvel album de Dool, formation batave dont l'appétence pour le doom et le post-métal n'est plus à démontrer. Musicalement on ne s’est pas trompé et finalement, en passant notre nez dehors, on remarque que GMD n’est pas non plus complètement à la ramasse point de vue prévisions météo. Mais comme nous ne sommes pas employés de l’IRM ou de Météo-France, on va se contenter de traiter de la musique du groupe néerlandais et de The Shape Of Fluidity, sa dernière offrande.  

C’est avec un son de guitare qui pourrait être un petit clin d’œil au glam rock des années 70 que démarre « Venus in Flames ». Mais si le glam tel qu’on le conçoit généralement se veut festif et décadent, Dool remet très vite l’auditeur sur le droit chemin dès le premier appui sur la pédale de distorsion. Même si les cadences sont soutenues, le groupe n’est pas venu pour la fête mais bien pour jouer la carte d’une mélancolie qui rappelle la merditude d’une époque dans laquelle on évolue et où la recherche d’identité collective et individuelle est plus que jamais une question fondamentale et une préoccupation majeure du chanteur Raven Van Dorst.

Le groupe a néanmoins l’intelligence de ne pas basculer dans la complainte permanente en inscrivant sa musique dans des registres différents - certains entendront probablement des influences prog ou post-punk. La lumière côtoie l’obscurité sur le magique « The Shape of Fluidity », le rêve flirte avec le rappel à la réalité sur « House of a Thousand Dreams » et l’efficacité se fond dans la subtilité pour « Hermagorgon ». Ce dernier titre mérite d’ailleurs qu’on s’y attarde tant il synthétise à lui seul la démarche de ce nouveau disque : contraction de « hermaphrodite » (réalité biologique du chanteur à sa naissance) et de « Gorgone » (un monstre de la mythologie grecque), ce morceau sur lequel le frontman se livre comme jamais sur ses difficultés à se faire accepter est le premier véritable effort collectif de Dool (Van Dorst s’était chargé seul de l’écriture des 2 premiers disques), et ça s’entend. De loin le morceau le plus progressif de l’album et un choix de premier single à saluer puisqu’il évite la facilité. En effet il eut été plus sécurisant de proposer « Evil in you » et son refrain qui n'aurait pas dénoté sur un album de Ghost. Pourtant ce titre presque radio friendly ne figure même pas dans la liste des 3 singles sortis depuis le début de l’année. On veut y voir l’affirmation d’une personnalité forte qui se dévoile de plus en plus au fil des années. Une démarche qui n’a certes pas débuté avec la création de l’entité Dool puisque le background des musiciens parle pour eux. Certains, dont Van Dorst ayant un temps fait partie de The Devil’s Blood, formation culte du rock occulte. Le parallèle fait entre ces deux formations est inévitable, mais avec ce troisième album, elles vont sembler de moins en moins utiles ou pertinentes, tant Dool y affirme sa volonté de s'affranchir du passé.

Preuve ultime des ambitions du groupe et de la crédibilité dont il bénéficie dans les sphères metal, la production du disque a été assurée par un vrai cador du genre (Marcus Lindberg, qui a produit Cult Of Luna ou Russian Circles) tandis que le mastering a été confié à Ted Jensen, qui a notamment offert ses services à Ghost (tiens donc). Cela nous donne un son clair et puissant, et qui rend parfaitement justice à des compositions déjà solidement texturées à la base, et rapproche accessoirement Dool d'artistes comme Alcest ou Chelsea Wolfe, capables de construire des ponts entre la communauté metal et les nombreux fans de rock indie qui ont parfois peur de franchir le Rubicon. L'été sera peut-être chaud, mais avec Dool, plus besoin de clim'.

 

 

Le goût des autres :