Come Home The Kids Miss You

Jack Harlow

Atlantic Records – 2022
par Ruben, le 9 juin 2022
3

En 2022, Jack Harlow est un visage familier de la scène US ; un jeune artiste solidement arrimé aux sommets du Billboard, avec quelques immenses succès à son actif, dont l’incontournable « Industry Baby », avec Lil Nas X. Sans surprise, ce nouveau projet intitulé Come Home The Kids Miss You va apporter son lot de tubes - il faut ici souligner la jolie prouesse de « First Class » qui, avec son sample de « Glamorous », n’avait rien du hit planétaire. Et si le succès commercial de ce nouvel album va probablement ravir label et banquier, ce n’est certainement pas un gage de qualité. Bien au contraire. 

Côté productions, nous pouvons immédiatement statuer que la tracklist de Come Home The Kids Miss You ne révolutionnera rien - il suffit d’écouter la piteuse performance de Pharrell Williams sur l’instru bâclée de « Movie Star » pour s’en rendre compte. Toutes les productions, sans exception, manquent  de punch et de profondeur. Pire, l’écart de qualité avec la concurrence directe est terrible. En effet, maintenant qu’il joue dans la cour des grands, Jack Harlow doit se frotter aux mastodontes du rap et son nouveau disque sera fatalement comparé aux autres sorties récentes. C'est inutile, ça n'a aucun sens, mais le constat final reste le même : par rapport à I NEVER LIKED YOU de Future, It’s Almost Dry de Pusha T et un certain Mr Morale & The Big Steppers de Kendrick Lamar, le gouffre est abyssal, et on parle ici uniquement des parites instrumentales.

Côté textes, mis à part se vanter de ses dernières conquêtes et de l’incroyable chance qu’elles ont de passer quelques heures en sa compagnie (mais seulement après avoir signé un NDA), Jack Harlow ne raconte pas grand chose d’intéressant. Come Home The Kids Miss You n’est jamais un disque intime ou touchant et ne nous apprendra rien sur la vie de l’artiste ; la plupart des textes étant totalement vides d’intérêt - on pense ici au calamiteux « Dua Lipa », une ode embarrassante inintéressante à la pop star anglaise. Constamment à la recherche de la rime ultime, Jack Harlow cherche surtout à reproduire les punchlines instagrammables de son aîné, Drake. Mais contrairement à ce dernier qui, il faut le reconnaitre, excelle en la matière, Jack Harlow peine à convaincre et essaie, tant bien que mal, de copier le flow de son mentor, quitte à ce que les ressemblances en deviennent gênantes. En effet, l’introductif « Talk Of The Town », dans son sample loopé et son architecture, se rapproche un peu trop de l’intro de Certified Lover Boy, tandis que « Poison » et « Lil Secret » apparaissent comme des tentatives désespérées de reproduire l’aura mielleuse de Views. Le mindfuck est alors « Churchill Downs », quand  Drizzy en personne vient enterree Harlow sur son propre titre.

L’échec de Come Home The Kids Miss You n’est clairement pas une question de budget – la liste ddes VIP en est la preuve – ni de mauvais marketing – avec sa gueule d’ange, Jack Harlow pourrait vendre des disques à nos parents. Non, l’échec de ce deuxième album studio provient simplement des choix artistiques calamiteux. Après un premier disque déjà peu ambitieux, Jack Harlow reproduit les mêmes erreurs, sombre dans un conformisme affligeant et délivre un projet qui manque cruellement d’originalité et de personnalité. Avec Come Home The Kids Miss You, on comprend alors que le jeune rappeur a définitivement choisi le chemin du mauvais mainstream plutôt que de chercher à bâtir une discographie respectable, à la hauteur des prouesses et technicités dont il est capable. Car le talent et le potentiel du jeune homme sont indéniables : Jack Harlow est des rappeurs les plus prometteurs de la nouvelle école. Quel gâchis.