Le disquaire est-il en passe de devenir une boutique de luxe?

par Antoine G, le 5 juillet 2021

Est-ce déjà la fin du retour du vinyle ? Alors qu’ils doivent encore se relever de la crise sanitaire, les disquaires font face à un nouveau problème. Alors que la vente de vinyles est en hausse depuis des années, grignotant sur celles des CD, le Gredin français (pour Groupement des Disquaires Indépendants Nationaux) tire la sonnette d’alarme. Ils pointent surtout une flambée spectaculaire du prix des vinyles en 2021. Une hausse, selon eux, qui va de 50 centimes… à 19 euros ! Le syndicat donne l’exemple de l’album Dure Limite de Téléphone. Warner le vendait jusqu’ici à 12,49 euros hors taxes. Il vaut désormais 30,05 euros. En ajoutant les taxes et la marge du disquaire, le prix en boutique monte donc à 51 euros, contre 21,30 auparavant. Pour un disque sorti en 1982, et déjà vendu à 400 000 exemplaires...

Comment justifier une telle hausse ? Les distributeurs évoquent surtout la crise des matières premières. En effet, toutes les matières polymères (plastique, PVC, vinyle, etc.) se font plus rares depuis quelques mois. Pour les disques, cela entraîne une hausse de 30 à 40 % des prix des matières premières, en plus d’allonger considérablement les temps de livraison. Cette crise a surtout un effet désastreux pour les indépendants, puisque plus la quantité de disques pressés est réduite, plus la hausse se fait sentir. Mais cela ne suffit pas : la hausse de prix est d’à peine plus d’un euro par disque, au pire.

Ainsi, pour le Gredin, l’argument ne tient pas, notamment car certaines majors (Warner en tête) augmentent nettement plus que les autres. « Le polymère indispensable à la fabrication du disque vinyle serait donc plus cher pour presser Premiers Symptômes de Air (passant de 10.80€ HT à 26.50€ HT) que pour Random Access Memories de Daft Punk (seulement 1.66€ d’augmentation) ? »

Étrange manœuvre, donc, de la part des majors. Car le conséquence paraît logique : plus aucun disquaire ne va commander ces disques hors de prix. « A se demander s’il n’y a pas une volonté des distributeurs de supprimer de leurs catalogues ces références ? » s’interroge le Gredin. Le coup est particulièrement dur pour les petits disquaires, qui ne peuvent baisser d’avantage leur marge, contrairement à la Fnac ou Amazon. Et en France, la TVA de 20 % sur les disques n’aide pas… De là à prévoir un retour du CD, il n'y a qu'un pas.