En 2021, même J Balvin se prend pour un drilleur

par Elie, le 1 mars 2021

Opps, froid, violence, poignards, accents à couper au couteau (lol)... En 2021, tout le monde semble avoir à peu près compris ce en quoi consistait la UK drill. Alors on va essayer de ne pas trop s'épancher sur ses origines. Mais un peu quand même... Née en Angleterre, cette cousine du grime puise ses influences dans son homonyme de Chicago, apparu au début des années 2010 : des paroles crues qui relatent un quotidien sanglant et morbide à base de meurtres à l'arme blanche et de cagoules, le tout sur des rythmiques syncopées. Quand Pop Smoke débarque en 2019 et importe la UK drill aux Etats-Unis dans un improbable retour d'ascenseur, il faut seulement quelques mois pour que Travis Scott, puis le reste du game (Drake en tête) s'approprie les codes de cette musique au départ vouée à l'underground.

Côté francophone, c'est en janvier 2020 que le raz-de-marée surgit : Freeze Corleone pose sur le beat de "Welcome to the Party" de Pop Smoke, de nombreux auditeurs se mangent une gifle magistrale et se mettent à suivre le mouvement. Viennent Lyonzon, Hamza, jusqu'à une vidéo du Règlement publiée le 10 mai 2020. Et là, c'est le drame. L'analyse drill du Youtuber marque malgré elle un tournant décisif : ce qui était un gimmick frais et sympathique devient un poncif insupportable. Du gros rappeur au rookie en passant par le freestyleur de soirée ; tout le monde s'y met. 

De l'autre côté de l'Atlantique, c'est évidemment Drake à qui incombe la responsabilité de plonger toute une culture dans un mainstream aseptisé. Après tout, il suffit d'une parka sombre recouvrant le visage et de petits moves efficaces pour faire le taff. Et c'est ce que le Colombien J Balvin, star planétaire et tête de gondole de la scène reggaeton, semble avoir parfaitement compris, à en croire son dernier clip remplis d'apprentis voyous masqués et vêtus de noir. Alors certes, le morceau du Colombien est plus propre que l'argent de la drogue quand il a transité par un paradis offshore, mais l'appropriation culturelle qui l'emballe gâche quelque peu le plaisir. A écouter les yeux fermés donc.