Dossier

Vulvet Underground - Episode 2

par Gwen, le 26 mars 2019

Vulvet, clap deuxième. Dans ce nouveau chapitre, nous continuerons à nous intéresser aux chattes de gouttière qui préfèrent consacrer du temps à la six cordes plutôt qu’à la dentelle. Nous avions encore quelques louches alors autant en profiter avant d’explorer d’autres genres dans les prochains épisodes. 

Mary Bell

Et la France, alors ? Hein, la France ? Ben, la voilà dignement représentée par Mary Bell, une formation parisienne qui n’hésite pas à retourner la guitare dans la plaie, en commençant par ce nom qui gratte, inspiré par un atroce fait divers (Google est ton ami). Nous avons donc un mec, trois filles et une seule possibilité : faire un maximum de bruit. Du bruit qui crache et fait bien chier les voisins le dimanche à l’heure du brunch. Du bruit engagé aussi, que l’on pourrait facilement connecter au mouvement des Riot Girls sans qu’il lui doive toute sa férocité pour autant. Et puis du bruit accessible à toutes et tous puisque leur EP, Histrion, est disponible gratuitement sur leur Bandcamp. Faites-vous plaisir, ce n’est pas pas tous les jours que vous pourrez vous offrir un bon déboîtement des cervicales sur un titre aussi pertinent que "I used to be kind to people in crowds, but that gave me murderous tendencies".

CHAI

Si on vous a déjà brièvement touché un mot de ce quatuor japonais, la sortie de leur nouvel album, PUNK, nous donne l’occasion d’affiner les présentations. Frustrées du rôle de poupées au sourire congelé que la culture de leur pays natal attribue en général aux artistes féminines, CHAI prend les devants en singeant des postures rose bonbon pour mieux mordre la main qui ne les nourrit pas tant que ça. Leur petit deuxième est donc à leur image : totalement incontrôlable et profondément joyeux. C’est une basse bien grasse sous de la pop bubblegum, du post-punk éclairé au néon, une batterie sous stéroïdes, des voix qui piaillent de bon coeur avant de donner l’assaut sans préavis. Tout y passe sous une pluie de confettis. Ce joli doigt d’honneur "neo-kawaii" - comme elles se qualifient elles-mêmes – encourage chacune à abandonner ses talons pour afficher fièrement les pas de danse les plus ridicules possible. 

SASAMI

Des qualités, SASAMI n’en manque pas. Pour la référence The Fader, c’est même « rock’s next big thing ». Et avec près de 600.000 fans sur Facebook on peut imaginer que leur voix porte un peu plus que la nôtre quand ils se lancent dans ce genre d’affirmations. Son principal défaut, c’est de sortir son album après ceux d’Angel Olsen en 2016, de St. Vincent en 2017, de Mitski en 2018 et de Sharon Van Etten en 2019. Car à elles quatre, celles-ci ont fait souffler un vrai vent de modernité sur l'indie au féminin, qu’elles ont la ferme volonté de conjuguer au futur à une époque où il s’écrit parfois un peu trop au passé simple. Et l’Américaine SASAMI, qui vient de sortir son premier album sur Domino, c’est inévitablement à ces quatre filles qu’on va forcément la rattacher, car son premier album participe de cet élan visant à créer quelque chose de neuf en amalgamant de l’ancien - il y a énormément de folk, de shoegaze et de dream pop dans son ADN. En attendant que Sasami Ashworth passe du statut de ‘follower’ à celui d’’influencer’, on se contentera aisément d’un disque éponyme qui sent bon la catharsis.

Stella Donnelly

À l’image du "Seven Nation Army", le "Boys Will Be Boys" de Stella Donnelly est lui aussi un tube par accident. Tandis que la scie des White Stripes s’est convertie du jour au lendemain en un hymne pour stades de foot, la ballade indie-folk de l'Australienne sur la culture du viol est devenue un morceau qui compte pour la génération #metoo. Un sacré poids à porter pour une fille plutôt timide qui n’a jamais vraiment cherché la célébrité ou les louanges. Mais voilà, quand on a son talent et les plus gros labels qui frappent à votre porte, difficile de résister : c’est donc Secretely Canadian qui a gagné la floche. Un choix doublement judicieux. D’abord parce qu’avec des nouveaux copains de labels qui s’appellent Whitney, Jens Lekman ou Alex Cameron, on comprend vite dans quelle division on joue. Ensuite parce que sans le label américain, on n'aurait probablement jamais entendu parler d’une fille dont la timidité cache mal le talent fou et cette capacité à nous mettre dans sa poche en s’imposant une sobriété épatante et une économie de moyens dont elle ne se départit qu’à des moments opportuns, comme sur l’incroyable "Beware of the Dogs" qui brocarde le gouvernement de son pays et se hisse au passage au niveau du "Depreston" de sa compatriote Courtney Barnett sur la forme.

Illuminati Hotties

Déjà il y a un nom, qui rentre directement dans notre classement des meilleurs noms de groupes de l’univers, juste entre Someone Still Loves You Boris Yelstin et La Secte du Futur. Ensuite, il y a Sarah Tudzin, dont la ressemblance avec April Ludgate dans Parks & Recreation (rien de moins que la meilleure sitcom US de ces 20 dernières années juste derrière The Office) nous a directement mis dans d’excellentes dispositions. Et enfin il y a un single qui nous a fait dire qu’on est vraiment dans le bon. Le titre qui nous a mis la puce à l’oreille, c’est "(You’re Better) Than Ever", et on nous souffle dans l’oreillette que c’est la bombe que Courtney Barnett a oublié d’inclure sur son dernier album en date. Mais la bonne nouvelle (comme si on en manquait à ce stade), c’est que l’album dont ce morceau est tiré, Kiss Yr Frenemies, démontre sans peine qu’on n’est pas dans le one hit wonder et que la palette avec laquelle Sarah Tudzin est capable de s’amuser sans se vautrer est extrêmement large. Seule ombre au tableau : le groupe n’a pas encore traversé l’Atlantique et franchement, on commence à s’impatienter.