The B.I.D.

Spodee

Auto-production – 2014
par Simon, le 25 janvier 2015
8

S’il est évident que le Hustle Gang doit une bonne partie de sa popularité à son chef de file (T.I., toujours aussi en vue), les vrais savent que l’énorme emcee est l’arbre qui cache la forêt, et que des Young Dro ou Trae Tha Truth ont aujourd’hui toutes les aptitudes pour défendre le collectif au-delà de la visibilité unique du kingpin d’Atlanta. Young Dro, Trae The Truth, mais aussi le trop discret Spodee, rappeur immensément sous-estimé en raison (probablement) de son activité plus que sporadique. En effet, trois mixtapes depuis 2011, seulement, c’est trop peu pour suivre la productivité imposée à tous les wannabe du rap jeu.

Mais à vrai dire, le rap de Spodee n’a pas vraiment vocation à tout casser sur son passage : on n’y trouve pas de dj qui gueule, pas de drills de bâtards, et son fond de commerce n’est pas entièrement basé sur l’attitude thug. Spodee est un emcee qui rappe franchement, qui ne pose que sur des prod’s luxuriantes (trap ou non) et qui sait ce que c’est d’envoûter. Un vrai mec du sud, avec son héritage, sa classe, son lyrisme et son groove respectueux. Un emcee taillé pour la vision qu’entretient l’écurie Grand Hustle (détaillée dans notre chronique du récent G.D.O.D.2), qui n’échangerait rien contre un produit magnifiquement fini, pour qui la grossièreté et l’attitude sont indissociables de la technique et de l’ambiance. The B.I.D. est ce genre de disques qui rend la distinction « rap de gentils / rap de méchants » complètement inappropriée, et qui trouvera sa place tant dans la discothèque des trentenaires à barbe que des jeunes excités, pour autant que l’amour véritable du hip-hop soit de la partie. Une mixtape qui possède une urgence magnifiquement convertie et qui enterre la moitié des albums moyens (mais pas moyennement surestimés par la critique) sortis sous major company par des mecs qui se sont vus plus gros que le boeuf - coucou YG et Schoolboy Q.

Le genre de disque qu’on adore ici, malgré notre tristesse de savoir que ce genre d’effort ne trouvera pas l’audience et le succès qu’il mériterait (il suffit d'écouter le triptyque "Shoot Em"/"Foreigner"/"Anyway"). Combien d’années faudra-t-il encore au public européen pour se rendre compte de la valeur d’un Spodee ? Demandez donc à Big K.R.I.T.