Rub

Peaches

I U She Music – 2015
par Yann, le 12 octobre 2015
7

Un éminent membre de la rédaction m'a dit un jour: "En fait, t'es vachement plus intéressant quand tu ne parles pas de cul." Malheureusement, quand on parle de Peaches, on ne parle pas vraiment de musique, mais de provoque féministe et queer hyper-sexualisée sur fond de musique aux vagues relents punk. En tout cas, quand c'est bien.

La bonne nouvelle, c'est que c'est exactement ce que Rub propose. En cela, il s'éloigne de son disque précédent I Feel Cream, où la Canadienne s'était métamorphosée en chanteuse électro-pop, certes sans abandonner complètement ses intentions, mais en mettant bien plus l'accent sur les mélodies qu'auparavant. Ici, on retrouve un résultat plus proche des deux premiers albums The Teaches of Peaches et Fatherfucker. Les thèmes centraux de l'album sont le féminisme, les identités de genre, la libération sexuelle, mais sont abordés de manière frontale, provocante, sur fond de musique DIY combinant beat basique et chant scandé.

Les comparaisons avec ses morceaux précédents sont parfois frappantes sur Rub. Ainsi, "Dick in the Air" confronte la différence de traitement du corps de la femme et de l'homme comme le faisait "Shake Yer Dix", "Free Drink Ticket" recrée l'ambiance vénéneuse de la vengeance song "Operate", "Rub" est une ode au plaisir féminin aussi frontale que l'était "Diddle My Skittle". Au niveau son, la majorité de l'album est construit autour du beat et des quelques sons électroniques d'habillage, loin des approches mélodiques de l'opus précédent, même si le dernier tiers y replonge volontiers (notamment avec le très mauvais "Dumb Fuck" dont on se demande ce qu'il fait là). On n'y retrouve toutefois pas les guitares et sons punk-rock qui étaient fort présent au début de sa carrière. Dans l'ensemble, ça sonne "plus propre", et ce n'est pas nécessairement une bonne chose.

Mais bon, au final, même si on pourrait fustiger Peaches pour refaire ce qu'elle faisait déjà il y a plus de 10 ans, tant au niveau des thèmes que du son, on est bien forcé de constater que le tout reste pertinent. Globalement, on n'a pas beaucoup avancé sur ces sujets depuis The Teaches of Peaches et, contrairement aux ruminements des vieux cons que nous sommes parfois, nous sommes toujours aussi prudes quand il s'agit de parler de sexualité de manière frontale. Bien sûr, on préférerait que ce genre d'albums soit devenu inutile en 2015. Mais en attendant, du haut de ses 46 ans, Peaches a sorti un album bien plus provoquant que tous les twerks de Miley Cyrus et de Nicky Minaj réunis. Ca vaut bien une demi-molle.