How To Live On Nothing

Troy Von Balthazar

Third Side – 2010
par Michael, le 20 juillet 2011
8

Se lancer dans une carrière solo en parallèle de son groupe est souvent une gageure. C'est forcément souffrir la comparaison avec les productions du groupe auquel on est associé, et les albums en question sont souvent synonymes de soupe réchauffée ou de substitut tiédasse (on pense aux albums solo de Phil Selway, Julian Casablancas ou Billy Corgan). Certes pour Troy Von Balthazar en hiatus de Chokebore depuis maintenant plus de huit ans, on ne saurait invoquer ici des raisons mercantiles.

Chokebore a toujours été un groupe reconnu par ses pairs (signature sur Alternative Tentacles de Jello Biafra, premières parties de Nirvana...) et acclamé par la critique, promis à un très bel avenir mais qui pour de multiples raisons que l'on ne s’explique pas encore n'a jamais réussi à dépasser le succès d'estime malgré une base de fans toujours très active à ce jour - et qui piaffe d’impatience depuis les premiers concerts redonnés par le groupe depuis l'an dernier et la promesse d'un nouvel album qui ne saurait tarder à se concrétiser. De plus, quand on sait la vie d'ascète et de moine itinérant que mène TVB, on ne peut soupçonner le bonhomme de capitaliser sur son statut de perdant magnifique en délivrant sous son patronyme des albums qui pourraient sonner comme du sous-Chokebore.

C'est donc le deuxième album à ce jour, après un premier effort éponyme qui nous avait déjà laissé un très bon souvenir. Dans How To Live On Nothing, on est encore une fois dans l'épure au sens sonore du terme : morceaux courts en mid-tempo et son clair ou acoustique le plus souvent, pas de détails superflus. Une pop-folk minimaliste mais où l'on sent un grand attachement porté au son et aux arrangements parcimonieux mais toujours à propos (une ligne de Casio par ci, une voix déformée ou quelques chœurs par là). On sent toutefois que la production est ici plus ample et moins rêche que sur le premier effort, ce qui adoucit les morceaux tout en préservant une certaine fraîcheur. On distingue encore une fois de plus les quatre qualités en or que possède TVB : un sens imparable de la mélodie, une voix unique et sans équivalent toujours servie par une interprétation impeccable et des textes qui prennent aux tripes.

Adeline Fargier Jasso intervient comme sur le premier album pour quelques parties de guitare et surtout pose sa voix douce et presque naïve qui se marrie tout en contraste avec celle de Troy Von Balthazar, sur le très bon "Communicate" ou la construction en dialogue de "Dots And Hearts". Mêmes si les paroles sont souvent elliptiques et pleines de métaphores, les mots font mouche et on arrive assez bien à lire entre les lignes les thèmes de la difficulté à communiquer, du repli sur soi et d'une manière générale de la relation à l'autre, aux autres. Rien de très gai à priori, et pourtant, à l'écoute de How To Live On Nothing - phrase-titre qui pourrait être le crédo de TVB - on ressent un certain optimisme se dégager de toute cette noirceur apparente. On pourrait presque parler d'album solaire, impression renforcée par l'étonnant denier morceau, "Infinity Face", dans lequel une petite chorale vient conclure l'album sur une note lumineuse, qui laisse l'auditeur en suspens.