Death Folk Country

Dorthia Cottrell

Relapse Records – 2023
par Albin, le 15 mai 2023
8

Son nom ne nous évoque peut-être rien de particulier. Malgré plus de 10 années à occuper le haut de la nouvelle scène doom avec son groupe Windhand, Dorthia Cottrell n’est pas du genre à courir derrière la gloriole. Pas forcément à l’aise sous les projecteurs, la chanteuse au timbre envoûtant nous avait même laissé une impression de timidité maladive lors d’un entretien expédié en 15 minutes chrono en marge d’un concert à Bruxelles il y a quelques années.

Pas étonnant dès lors que son premier album solo publié en 2015 n’ait pas franchi les frontières d’un cercle d’initiés, malgré des qualités de songwriting incontestables. Réservée et pas forcément pressée non plus, Dorthia Cottrell aura attendu 8 longues années pour retenter l’exercice en solitaire sur ce Death Folk Country, dont le titre ne pourrait être plus explicite. La chanteuse originaire de Richmond, Virginia y entasse 11 chansons qui transpirent la mélancolie, la souffrance et la désolation, mais peuvent également s’écouter comme une ode aux grands espaces américains. Sans surprise, l’ombre du maître absolu du genre Townes Van Zandt n’est jamais bien loin. Cependant, contrairement à son premier disque, qui était presque exclusivement composé de chansons accompagnées à la guitare acoustique, la vocaliste enrichit cette fois ses compositions d’arrangements plus soignés (orgues, lapsteel) qui soulignent encore mieux la richesse de son registre vocal. Les effets d’écho et de réverbération sur son chant brumeux complètent magnifiquement ce sombre tableau et lui confèrent une dimension solennelle, presque spirituelle.

Au niveau des inspirations, l’interprète évoque un entrelacs d’histoires mêlant l’amour et la mort, que viennent souligner les 2 plages instrumentales qui ouvrent et referment ce recueil aux titres pas franchement folichons : « Death is the Punishment for Love » et « Death is the Reward for Love ». Sur l’ensemble, l’album se révèle extrêmement convaincant. Dorthia Cottrell y condense un goût pour une écriture énigmatique, préférant poser des atmosphères pesantes plutôt que pondre des refrains qui collent à l’oreille. Ce deuxième album mérite largement sa place aux côtés des productions d’une Emma Ruth Rundle, d’une Chelsea Wolfe ou des aventures solos d’un Steve von Till. On passera sur un artwork d’un goût discutable (un clin d’œil à Type O Negative peut-être?) pour ne retenir qu’un disque d’une beauté éprouvante, à déguster bien installé dans son bain, une lame à la main et les yeux mi-clos, en observant l’eau se parer de reflets écarlates.