Build a Rocket Boys!

Elbow

Fiction – 2011
par Jeff, le 4 avril 2011
8

Cela faisait à peu près trois ans que les gars d'Elbow n'avaient plus donné de leurs nouvelles, discographiques il s'entend. Parce que dans les 24 mois qui ont suivi la sortie du magnifique The Seldom Seen Kid, il n'y en a eu que pour eux. Mais quel plaisir de voir le groupe de Manchester enfin reconnu à sa juste valeur, quelle joie de voir cet album gagner ses lettres de noblesse au fil des semaines, percolant lentement mais sûrement dans l'inconscient collectif jusqu'à récolter le Mercury Prize au nez et à la barbe de Burial ou Radiohead. A une époque où des formations sont proclamées "meilleur groupe du monde" par le NME sur la foi d'un pauvre titre racoleur, il est presque rassurant de voir Elbow parvenir à fédérer un public "à l'ancienne". En sortant des disques et en les défendant, tout simplement. Le point culminant de cette ascension fut à n'en point douter l'impeccable passage du groupe dans les studios d'Abbey Road en compagnie de l'orchestre symphonique de la BBC pour y interpréter dans son intégralité ce disque magnifique qu'est The Seldom Seen Kid. D'ailleurs, à l'écoute de ce Build a Rocket Boys!, on comprend vite que Guy Garvey ne s'est pas encore remis de cette expérience.

En effet, ce nouvel effort du groupe de Manchester s'inscrit dans le droit fil de l'enregistrement dans le mythique studio londonien, où les compositions d'Elbow s'étaient vues recouvertes d'un vernis orchestral supplémentaire qui collait à merveille avec une écriture tout en sensibilité et élégance. Et très régulièrement sur ce cinquième album, on sent le groupe comme en apesanteur, porté par des chœurs augustes ou des arangements luxuriants qui jamais ne plongent l'écritue de Guy Garvey dans le pathos écœurant. De surcroît, on sent le bonhomme habité d'une confiance en lui jamais décelée auparavant dans son travail, à l'image de l'inaugural "The Birds" et ses huit minutes de pop ascensionnelle. Et on comprend alors que Build a Rocket Boys! est avant tout la réalisation d'un groupe qui sait pertinemment où il va, gardant le cap sans tenir compte du qu'en-dira-t-on – en même temps, les éloges dont il fait l'objet depuis ses débuts ne sont certainement pas un frein à la réalisation des ambitions de Garvey et les siens. Enfin, Build a Rocket Boys! semble confirmer le caractère complètement anachronique (et donc jouissif) d'un groupe comme Elbow, aujourd'hui capable de remplir des salles de 3.000 personnes avec une musique qu'il est loin d'être le seul à pratiquer mais dont il est le seul à véritablement en récolter les fruits. Bref, pour toutes ces raisons (et bien d'autres encore, disséminées aux quatre coins du disque), cette nouvelle réalisation des Mancuniens sonne comme la confirmation dont on n'avait absolument pas besoin, celle qu'Elbow compte bien parmi ce qui se fait de mieux à l'heure actuelle au Royaume-Uni. Et ce, tous genres confondus.