Ash Wednesday

Elvis Perkins

XL Recordings – 2007
par Jeff, le 17 août 2007
9

J'aurais tant aimé que le statut de «fils de» dont Elvis Perkins a hérité bien malgré lui n'ait pas été l'élément qui m'ait permis de découvrir cet album. J'aurais tant aimé avoir entendu ces compositions à fleur de peau sans la moindre mise en contexte, souvent propice à des avis hâtifs et mal avisés. Mais voilà, force est de reconnaître qu'avec un père acteur (Anthony Perkins alias Norman Bates dans Psychose) mort du SIDA et une mère photographe et actrice (Berry Berenson) décédée lors ses attentats du 11 septembre 2001, il était difficile de ne pas passer à côté du passé familial et surtout de ne pas avoir celui-ci à l'esprit au moment de juger le travail de Elvis Perkins sur Ash Wednesday.

D’ailleurs, tant le titre de cet album que les paroles de certaines chansons qu’il contient pourraient laisser penser que les évènements tragiques qui ont émaillé la vie d'Elvis Perkins ont à tout jamais imprégné son écriture d'une souffrance bien légitime mais parfois malsaine quand elle est surjouée. Heureusement pour nous, il n'en est rien sur ce Ash Wednesday d'une rare beauté. En effet, ce premier album émeut par cette mélancolie sous-jacente qui le parcourt de bout en bout et qui ne se place qu’occasionnellement aux avant-postes. Version moins geignarde de Bright Eyes, plus épurée d'Okkervil River et aussi émouvante que les meilleures ballades d’un Damien Rice, la musique d'Elvis Perkins respire la sincérité par tous les pores. Exception faire de l'enjoué et efficace « May Day ! », Ash Wednesday est un enchaînement parfait de crève-cœur pleins de pudeur qui plaira à tous les amateurs de folk subtile aux arrangements épars. Et bien que le disque perde quelque peu en intensité sur plusieurs titres de sa deuxième partie, on peut difficilement en vouloir à un artiste capable, à l'instar d'un M. Ward ou d'un Benjy Ferree, de nous pondre avec une évidente facilité des joyaux d’intemporalité tels que « While You Were Sleeping » ou « Moon Woman II ».

Qu’il soit seul à la guitare ou accompagné de son groupe, qu’il chuchote ou qu’il gueule, qu'il nous fasse sourire ou pleurer, Elvis Perkins nous prouve à onze reprises qu’il a choisi de ne pas considérer les évènements tragiques qu’il a enduré comme un laissez-passer illimité pour un univers fait de titres aussi ennuyeux que larmoyants. Sage décision donc que celle prise par Elvis Perkins qui, l’air de rien, s'impose comme l'une des révélations de cette année 2007.

Le goût des autres :
7 Nicolas