Séries TV et musique: (tentative de) classement ultime

par Jeff, le 20 octobre 2014

Y’a pas que la musique dans la vie, y’a aussi les séries. C’est ainsi que l’on pourrait décrire la manière de fonctionner de pas mal de rédacteurs de l’équipe, qui aiment autant découvrir les dernières sorties de chez 4AD ou Matador que la dernière pépite produite par Showtime ou HBO. Passion pour la musique oblige, les choix musicaux des showrunners font partie des critères permettant de déterminer si une série est digne de leur intérêt ou non. Dans cette optique, Jeff, Maxime V. et Gwen ont décidé d’établir un classement des 15 meilleures séries de ces 15 dernières années, en basant leurs choix sur trois critères : la qualité de la série, les choix musicaux défendus par celle-ci, ainsi que l’utilisation de la musique dans le projet. Cela donne un classement qui mélange surprises, découvertes et valeurs sûres.   

1. Flight of the Conchords

Qualité de la Musique : 9,8/10
Utilisation de la musique : 10/10
Qualité de la série : 9,2/10
29/30

Des millions de moutons, le décor du Seigneur des Anneaux, une putain d'équipe de rugby. Parmi les excitantes attractions proposées par la Nouvelle Zélande, nos coups de cœur absolus se nomment Bret McKenzie et Jemaine Clement. Version cheap et déglinguée de Almost Famous, Flight of the Conchords dresse la liste des galères du gratteux-de-base-en-quête-de-gloire-dans-un-environnement-hostile : tournée foireuse, manager incompétent (impeccable Rhys Darby), costumes de kermesse, groupies imaginaires… ou beaucoup trop réelles (impeccable Kristen Schaal). Prolongement des délires scéniques de Bret et Jemaine, leur série fait partie de ces petites merveilles réalisées à partir de trois bouts de carton qui s'animent soudainement grâce à l'imagination d'un duo d'éternels gamins.

Des gamins sans doute mais également de solides musiciens qui se servent des pérégrinations de leurs deux losers pour rendre un hommage sincère et touchant à leurs idoles. Au-delà des dialogues ultra-référencés, ce sont donc leurs interludes musicaux qui les assoient en première position de notre classement: un David Bowie plus vrai que nature ("Bowie's in Space"), un Barry White de bac à sable ("Business Time"), des Pet Shop Boys sous Xanax ("Inner City Pressure") ou du hip hop de branques ("Tears of a Rapper")... En deux saisons bien tassées, tous les genres y sont passés et les Conchords sont devenus la référence ultime en termes de "Daft Punk en papier alu".

2. Treme

Qualité de la Musique : 9,8/10
Utilisation de la musique : 10/10
Qualité de la série : 9,1/10
28,9/30

Normalement, dans tout bon classement sur les séries qui se respecte, The Wire figure invariablement (et à très juste titre) en première place. Il n’en sera rien ici. Heureusement pour le génial David Simon, c’est son dernier bébé en date qui s’offre une place sur la seconde marche du podium. En effet, si Treme emprunte à The Wire la densité de l’écriture (à laquelle se superpose la fluidité des schémas narratifs), la série remplace Baltimore-la-sinistrosée par la Nouvelle-Orléans, berceau du jazz et plus globalement, ville de musique par excellence. C’est cette riche scène musicale qui sert à analyser et dénoncer les maux qui gangrènent la ville depuis le passage de Katrina, et qui plombent plus globalement une Amérique moins reluisante que l’image que l’on s’en fait de ce côté-ci de l’Atlantique. Treme, c’est une série dont les choix musicaux sont à l’image des choix scénaristiques de David Simon : on ne fait pas dans la facilité, et on ne donne pas dans les habituels poncifs des dramas à l’Américaine. Et surtout, comme pour réaffirmer toute l’importance d’une scène musicale qui colle à la peau d’une ville, David Simon profite de la petite heure que lui laisse HBO chaque semaine pour mettre la musique au cœur de l’histoire. Cela donne une série d’un dynamisme incroyable et d’une intensité émotionnelle de tous les instants – sans à aucun moment donner dans le pathos facile. Du grand art, tout simplement.

3. Breaking Bad

Qualité de la Musique : 9,1/10
Utilisation de la musique : 9,3/10
Qualité de la série : 9,9/10
28,3/30

Il y a six ans, on découvrait un moustachu en slip, errant au milieu du désert du Nouveau-Mexique, les doigts noués autour d'un flingue dont il ne maîtrisait pas encore le mode d'emploi. Depuis lors, la métamorphose du Dr. White en Mr. Heisenberg est devenue culte et le monde s'est déchiré entre ceux qui ont regardé et ceux qui n'ont pas (encore) regardé Breaking Bad. Les ados assènent du "Yeah, bitch!" pour assoir leur niveau de coolitude, les profs de chimie de province bénéficient d'une lueur à la fois anxieuse et admirative dans les yeux de leurs cancres et on fantasme secrètement que le McDo du coin soit géré avec panache par un mec nommé Gus. Le décor, la narration, les dialogues, l'interprétation sans faille… Le triomphe de Breaking Bad repose sur un ensemble de détails minutieusement configurés par l'initiateur du projet, Vince Gilligan. Si la musique ne semble pas occuper une place centrale, elle s'impose comme un ciment invisible de l'action, distillant en permanence la tension et l'humour nécessaires. Entre les deux morceaux emblématiques de la série ("Baby Blue" de Badfinger qui clotûre judicieusement l'épopée de Walter et la ballade des "Los Pollos Hermanos" par les incontournables Calexico), on trébuche sur une multitude de styles, tous calibrés pour définir les personnages ou créer un nouveau décalage. Parmi les choix de Gilligan, on a le plaisir de se frotter à Thee Oh Sees ("Tidal Wave"), Apparat ("Goodbye") ou TV on the Radio ("DLZ") mais aussi à quelques classiques tels America ("A Horse with No Name") ou The Platters ("Enchanted") ou les chouchous de Pinkman pour gonfler son cœur d'apprenti gangster ("Digital Animal" de Honey Claws). La bande originale de Breaking Bad est une inépuisable mine de pépites improbables dont se dégagent deux champions incontestables: "Ballad Of Heisenberg" par Los Cuates De Sinaloa (ultime hommage aux talents de l'homme au chapeau noir dans la pure tradition des narcocorridos, ces chansons dédiées aux exploits des nacro-trafiquants mexicains) et surtout… la performance de Gale, le mec qui n'a jamais eu de bol.

4. Friday Night Lights

Qualité de la Musique : 8,8/10
Utilisation de la musique : 9,4/10
Qualité de la série : 8,8/10
27/30

A première vue, Friday Night Lights a tout de la série US bien neuneu, une sorte de Dawson’s Creek 2.0 tiré d’un film dont personne n’a parlé par chez nous. En effet, tous les éléments sont réunis pour en faire un teen drama ne mobilisant que peu de neurones : une équipe de foot américain dans un lycée du trou du cul du Texas, des amourettes en-veux-tu-en-voilà, de gros chagrins d’amour et des coups de pute en pagaille. Pourtant, Friday Night Lights est bien l’une séries dramatiques les plus indispensables de ces dix dernières années. Car derrière un constat de base peu engageant se cache une trame narrative d’une intensité permanente, des personnages à la profondeur insoupçonnée, et une mise en scène qui place le spectateur au plus près de cette Amérique puritaine et républicaine que l’on connaît finalement très mal. Mais ce projet piloté par Peter Berg (Very Bad Things, The Kingdom ou Lone Survivor) et dans lequel on croise quelques têtes qui ont désormais fait leur trou à Hollywood (Michael B. Jordan et Kyle Chandler en tête) ne serait rien sans une bande-son qui n’a pas son pareil pour évoquer cette Amérique que l’on ne visite jamais, celle des culs-terreux qui puent le bourbon, des WASPS qui feraient passer Frigide Barjot pour Mère Teresa. Voguant entre les nombreuses incursions dans le post-rock (Explosion in the Sky notamment), quelques favoris du public incontournables (Wilco, Spoon, Deerhunter) et une énorme place laissée à la découverte, la bande-son de FNL est en permanence au service de l’histoire, et à considérer comme un acteur à part entière de celle-ci.

5. The Sopranos

Qualité de la Musique : 8,5/10
Utilisation de la musique : 7,1/10
Qualité de la série : 9,9/10
25,5/30

Souvent placée dans le trio de tête des meilleures séries de tous les temps, la saga de David Chase est habituée aux superlatifs. Si l’intérêt du spectateur pour le quotidien et les états d’âmes d’un escroc bedonnant du New Jersey est entretenu durant sept saisons (nous comptons la deuxième partie de la sixième saison comme une saison à part entière) grâce à l’audace des scénaristes et, bien sûr, au charisme de James Gondolfini, il se nourrit également de l’excellente bande son sélectionnée par Chase, lui-même bien conseillé par Steve Van Zandt, l’interprète de Silvio et guitariste de E-Street Band, le groupe tournant avec Bruce Springsteen. L’immersion dans la vie de Tony Soprano commence dès le générique, filmé de son point de vue. Cigare au bec, au volant de sa voiture, il voit le paysage urbain défiler au rythme du Woke Up This Morning d’Alabama 3. Amateur de cinéma, de documentaires historiques et de charcutaille napolitaine, Tony Soprano est un nostalgique : il écoute des classiques du rock américain et apprécie particulièrement le Rat Pack, Derek & The Dominos et Journey. Alors que sa femme Carmela s’émeut de la grandiloquence des grandes voix italiennes comme Andrea Bocelli, lui exècre le « Ridin’ Dirty » de Chamillionaire faisant office de réveil pour son fils A.J. Meadow, sa fille, chantonne des niaiseries adolescentes et le No Scrubs de TLC. Corrado Soprano, l’oncle Junior, révèle son chant à la fois frêle et puissant capable d’arracher des larmes aux gangsters désœuvrés lorsqu’il interprète, avec un coup dans le nez, son déchirant Cuore Ingrata à la fin de la troisième saison. Au-delà des morceaux illustrant les rapports de force au sein du clan, la musique utilisée lors des génériques de fin de chaque épisode résume à la perfection les 52 minutes écoulées. John Cooper Clarke, Radiohead, Aphex Twin, Otis Redding, X-Zibit ou encore Howlin’ Wolf ont, entre autres, permis de conclure une des tranches de vie du mafieux le plus aimé de la télévision. Imparable.

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6. Six Feet Under

Qualité de la Musique : 7,6/10
Utilisation de la musique : 7,9/10
Qualité de la série : 9,4/10
24,9/10

Six Feet Under est la première grande série faisant de la mort son sujet principal, bien avant les tueries et les assassinats en pagaille de Game of Thrones. Pour parler de sa musique, nous respecterons ici la progression narrative typique de chaque épisode. Nous commencerons ainsi par la fin, et plus précisément par le titre qui clôt la cinquième et dernière saison de la série d’Alan Ball. Loin de nous l’idée de vous spoiler – nous détestons cela autant que vous – d’autant que vous avez déjà forcément entendu cette chanson : Breathe Me, interprétée par Sia. Oui, c’est ce fameux morceau au piano tristoune servant à illustrer aussi bien les conséquences insurmontables d’une dispute entre deux candidats de téléréalité qu’une larme versée par quiconque ayant été relooké face caméra. C’est bien Six Feet Under qui a permis de faire connaître ce tube en puissance. Sorti en 2004, le titre sera utilisé un an plus tard lors de la séquence finale du dernier épisode diffusé sur HBO et deviendra culte. Si Six Feet Under est reconnue pour son originalité, son humour constant et les performances notables de Michael C. Hall et Rainn Wilson (le Dwight Schrute de The Office, série également présente dans ce dossier), elle l’est aussi pour sa bande son. Au-delà du respect de la thématique avec Don’t Fear the Reaper de Blue Oyster Cult que l’on peut entendre dans une excellente scène de l’épisode 8 de la saison 2, la musique a été choisie avec soin : Black Rebel Motorcyle Club, Radiohead, Boards of Canada, Death Cab for Cutie, Interpol, Arcade Fire ou encore Coldplay viennent accompagner la vie de la famille Fisher avec élégance et sobriété. Son rang de série majeure, Six Feet Under le doit aussi à sa bande originale.

7. Scrubs

Qualité de la Musique : 7,4/10
Utilisation de la musique : 7,9/10
Qualité de la série : 8,6/10
23,9/30

Scrubs est une série musicale. Elle est, certes, d’abord une sitcom d’hôpital, mais elle a réussi à intégrer la musique comme un élément à part entière de sa narration et de l’identité de ses personnages. Le plus souvent, la bande son illustre les états d’âmes du personnage principal J.D., interprété par Zach Braff, acteur déjà rompu à l’exercice de l’OST depuis son film Garden State. D’abord interne puis médecin loufoque un peu paumé qui offre aux téléspectateurs ses pensées, ses rêveries et ses hilarants délires, J.D. entretient une des plus amusantes bromances de séries US avec Turk, jeune chirurgien. Leurs 400 coups sont régulièrement associés à la musique. Kung Fu Fighting de Carl Douglas, Poison de Bel Biv Devoe, Africa de Toto, le Theme From Shaft d’Isaac Hayes, Rapper’s Delight de Sugar Hill Gang, les grands classiques sont régulièrement utilisés et trop nombreux pour être répertoriés ici. Lorsqu’elles sont extradiégétiques, les paroles résonnent toujours avec un moment clef de l’épisode. Une orientation folk/rock s’y détache clairement : les Shins, The Coral, Joshua Radin, Guided By Voices, ou encore Eels se font entendre aux côtés d’artistes plus confidentiels chez nous appréciés par Braff comme Colin Hay (qui apparaît en guest dans la saison 2). À cela s’ajoutent un groupe a capella récurrent, de constantes références à des génériques de séries télé (Sanford & Son) et à la pop culture américaine. Lors de la saison 6, le temps d’un épisode intitulé My Musical, Scrubs prend même des airs de Glee : une femme admise à l’hôpital entend tous les personnages chanter leurs dialogue. La mini comédie musicale dure tout le temps de l’épisode avec des chansons créées spécialement pour l’occasion. Une série musicale, qu’on vous dit.

8. Les revenants

Qualité de la Musique : 7,3/10
Utilisation de la musique : 8,2/10
Qualité de la série : 7,2/10
22,7/30

Malgré un final quelque peu décevant, Les Revenants est parvenu à trouver son public. Un scénario qui tient en haleine de bout en bout, des ambiances oppressantes à souhait, et un jeu tout en sobriété ont permis à la création de Fabrice Gobert de connaître un joli succès d'estime en France et un retentissement international bien mérité. Mais cette histoire de morts qui reviennent pour questionner notre rapport à la vie n'aurait pu être aussi juste d'émotion sans la musique de Mogwai, qui a composé une B.O. qui se fond admirablement bien dans un décorum so(m)bre. Un travail adaptatif qui voit les Ecossais soumettre leurs réflexes habituels à un modèle imposé. Entre post-rock et pop orchestrale, cette bande originale pour les Revenants est autant une œuvre qui se suffit à elle-même qu'un accessoire indispensable pour l'une des meilleures œuvres de fiction hexagonale de ces dernières années.

9. Skins

Qualité de la Musique : 7,4/10
Utilisation de la musique : 8,2/10
Qualité de la série : 6,9/10
22,5/30

Le sportif, l'intello, le bagarreur, l'écorché vif, la débauchée, le beau gosse qui s'ignore, le beau gosse qui s'exhibe, le gay qui s'assume, la lesbienne qui ne s'assume pas… Girls who are boys who like boys to be girls who do boys like they're girls who do girls like they're boys always should be someone you really loooooooove! 

Sur papier, Skins réunissait tous les éléments pour constituer un amas de clichés sur les infortunes de l'adolescence en général et un portrait à la hache de la jeunesse anglaise en particulier. C'était sans compter sur le savoir-faire de Brian Esley, parfaitement à l'écoute de ses acteurs et de leurs goûts (trois générations étalées sur six saisons, sans compter la septième qui effleure l'entrée dans l'âge adulte). Celui-ci colle au cul de ses têtes-à-claque en insérant des scènes quasi contemplatives entre deux couillonnades de base. Nos gobeurs de pilules se plantent et se relèvent, se tabassent et s'étreignent, baisent sur le bureau du prof et versent une larme devant un spectacle de danse classique. Et se mettent des mines. Beaucoup. En général dans des clubs obscurs ou des appartements dénués de chaperons. Toujours à l'affût de la meilleure bande originale pour rythmer leurs excès, la bande baisse généralement son pantalon sur de l'indie à la pointe (à l'époque, du moins) comme MGMT, Passion Pit, Archie Bronson Outfit et Yeah Yeah Yeahs ou se démontent le crâne sur Radiorama et The Bug. Crystal Castles effectue une apparition lors d'une scène critique de la saison 2 et Foals jouent les maîtres de cérémonie dans un mini-épisode spécial. Au final, une grande partie de la scène rock et électro britannique a accompagné les tourments de nos oisillons, enthousiasmant les oreilles averties et éduquant celles qui en avaient besoin.

10. The Office (US)

Qualité de la Musique : 3,3/10
Utilisation de la musique : 8,3/10
Qualité de la série : 9,6/10
21,2/30

Mais que vient faire The Office dans ce classement ? C’est probablement la question que vous venez de vous poser. Non, l’équipe de GMD n’a pas abusé de la dive Jupiler lors de l’écriture de ce dossier. Au sein de la rédaction nous sommes nombreux à énormément apprécier les facéties d’un Steve Carell survolté et la rivalité régressive entre Dwight et Jim dans cette série. Mais aussi l’utilisation de la musique faite par les scénaristes, toujours au service de la vanne, comme dans l’originale écrite par Ricky Gervais. Plusieurs personnages principaux sont musiciens et montrent, tôt ou tard, leurs aptitudes sur scène : Andy est chanteur au sein d’un groupe a capella et joue du banjo et de la guitare, Dwight est un guitariste occasionnel, Kevin est batteur dans un groupe de reprises de Police (Scrantonicity II, super jeu de mot basé sur le titre du dernier album de la bande de Sting, Synchronicity, où figure Every Breathe You Take), Darryl officie derrière le synthétiseur. Dans The Office,  les protagonistes eux-mêmes donnent de la voix (Michael Scott rape très maladroitement, massacre « Stayin’ Alive », s’approprie le « Physical » d’Olivia Newton John à la sauce Dunder Mifflin, s’égosille en reprenant le « Goodbye Stranger » de Supertramp, Andy et Dwight chantent le Take Me Home, Country Roads de John Denver pour séduire Erin…) et certaines scènes tirent directement leur force comique ou émotionnelle grâce à la bande son. « Forever »de Chris Brown, d’abord devenu un meme sur les internets, intelligemment (ré)utilisé pour conclure un mariage ou encore la mode (heureusement passagère) du lip dub parodiée dans le premier épisode de la septième saison, il y en aurait tant d’autres à citer. Une caution rock indé vient tout de même appuyer notre choix d’intégrer The Office dans ce classement : la reprise de Sons and Daughters des Decemberists, avec Nora Kirkpatrick, l’accordéoniste d’Edward Shape and the Magnetic Zeroes posée sur le perron de la ferme de Dwight, entendue dans la neuvième et dernière saison de la série. Une place méritée, donc.

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11. Eastbound and down

Qualité de la Musique : 7,1/10
Utilisation de la musique : 6,5/10
Qualité de la série : 6,8/10
20,4/30

Des gros connards dans les séries TV, ce n’est pas ce qui manque. De Saul Goodman (dans Breaking Bad) à Ari Gold (dans Entourage) en passant par Christian Troy (Nip/Tuck), la télé américaine se nourrit de ces incarnations parfaites des pires traits de la nature humaine. Mais tout bien réfléchi, personne ne battra Kenny Powers, le personnage joué par Danny McBride dans la série HBO Eastbound & Down. Joueur de baseball raté et coké se croyant sorti de la cuisse de Jupiter, Kenny Powers est à la croisée des chemins entre deux concepts bien américains : le redneck et le trailer park trash. Quatre saisons durant, sa connerie (doublée d’une méchanceté crasse et / ou d’un égoïsme sans commune mesure) aura donné lieu à de grands moments d’hilarité et de WTF intersidéral. Vu le profil du personnage, on aurait pu imaginer une bande son alignant les beauferies ultimes. Si c’est parfois le cas, c’est régulièrement des standards du rock avec du poil aux couilles ou des badass-eries oubliées que l’on nous sert. Ainsi, ce sont des gens comme R.L. Burnside, Lee Hazlewood, MC5, The Slits, The Black Keys ou les Stooges qui donnent de l’ampleur et de la crédibilité à un personnage qui n’en aurait peut-être pas des masses si les choix musicaux étaient moins rugueux.

12. Entourage

Qualité de la Musique : 7,1/10
Utilisation de la musique : 5/10
Qualité de la série : 7,5/10
19,7/30

Forcément, quand le concept d’une série consiste à montrer l’envers du décor de l’industrie de l’entertainment hollywoodien, il convient de concocter un environnement sonore qui envoie au moins autant de rêve que les acteurs qui huilent à longueur d’année les rouages de cette impitoyable machine. Et cela, les créateurs de la série HBO qui suit la carrière Vincent Chase et de son entourage (son meilleur ami / manager, son pote / chauffeur, son frère / acteur de série à la recherche désespérée d’un second souffle, son psychopathe d’agent) l’ont très bien compris. Ainsi, la bande-son de chaque épisode enchaîne les titres d’artistes majeurs et vendeurs, à la coolitude certifiée, et au compte en banque souvent déjà bien fourni. En même temps, ces huit saisons où se mélangent coke, coups d’éclats et de pute, scandaleuses agapes, choix de carrière compliqués, bombes sexuelles en puissance (avec un big up tout particulier à la MILF ultime, Perrey Reeves) et guest stars de premier niveau (James Cameron, Martin Scorcese, Matt Damon et même cette souillonne de Sasha Grey) auraient tout de suite eu moins de gueule si elles étaient contées à travers le prisme d’une compilation des meilleurs titres de Bénabar. Après, on pourra toujours dire que si les choix musicaux étaient habituellement pertinents, leur intégration trop régulière en arrière-plan priva le spectateur lambda et pas spécialement mélomane de chouettes découvert

13. Misfits

Qualité de la Musique : 7,1/10
Utilisation de la musique : 6,9/10
Qualité de la série : 5,3/10
19,3/30

Misfits avait tout pour devenir une bonne série. Le thème éculé de l’homme ordinaire devenant super-héros, dans la lignée d’Heroes, mais revu au sein d’une jeunesse britannique déviante, l’idée était plus que séduisante. La vie de cinq adolescents venus purger leur ASBO (Anti-Social Behaviour Order, mis en place par Tony Blair dans le but de réhabiliter une personne au comportement jugé antisocial, que l’on peut rapprocher du travail d’intérêt général) bascule après un étrange orage leur conférant un pouvoir surnaturel. L’un peut devenir invisible, l’une peut entendre toutes les pensées, un autre peut remonter le temps. Ils peinent à maîtriser leur capacités naissantes et seront poussés, malgré eux, au crime. Suivront alors une pelletée d’ennemis inattendus, de scènes comiques, d’histoires d’amour et de cul. Le charisme des différents membres de la bande (le mystérieux Simon, l’hilarant et provocateur Nathan, la violente Kelly, l’affriolante Alisha et le tranquille Curtis) contribue grandement au succès de Misfits. Si la série s’est ensuite perdue pour devenir une parodie d’elle-même avec d’incessants changements de casting, des rebondissements écrits à la va-vite et une nette baisse d’inspiration, sa musique reste de bon goût jusqu’à la cinquième et dernière saison. Son générique d’abord, « Echoes » de The Rapture, au riff immédiatement reconnaissable. Comme Skins et The Inbetweeners, la tendance musicale impulsée par le NME se fait souvent entendre : Florence + The Machine, Justice, Hot Chip, La Roux, Kasabian ou encore Foals. D’anciennes gloires figurent aussi en bonne place : Echo & The Bunnymen, Massive Attack, DJ Shadow, The Cure, LCD Soundsystem ou encore Gil Scott-Heron. Plus que sa narration bancale et sa conclusion, ce sont bien la première bande de paumés et la qualité des playlist que l’on retient de la série d’E4.

14. The Inbetweeners

Qualité de la Musique : 6,5/10
Utilisation de la musique : 5/10
Qualité de la série : 7/10
18,5/30

The Inbetweeners, c’est avant tout une efficace sitcom britannique diffusée entre 2008 et 2010 sur la vie de quatre garçons pas vraiment dans le vent (renommée dans nos contrées Les boloss : loser attitude…) avant d’être un film. Les Dalton puceaux qui se rêvent stars du lycée ce sont Will l’intello un peu nul (qui est aussi le narrateur), Jay le petit obsédé mythomane au look lad avec sa frange et ses survêts, Simon le beau gosse timide et Neil, le grand dadais drôle malgré lui. Ils ne pensent qu’aux filles et à leur virilité naissante, sauf qu’évidemment, tous leurs plans pour s’encanailler finissent par foirer. Un American Pie à la sauce HP, pour grossir le trait. Durant trois courtes saisons (six épisodes chacune), de nombreux artistes encensés à l’époque par le NME se font entendre, et pour certains à plusieurs reprises : The Libertines, The Maccabees, The Wombats, Kate Nash, Arctic Monkeys, The Kooks ou encore Hot Chip mais aussi des valeurs sûres comme The Cure ou encore The Jam. Cette quatorzième place dans ce classement, The Inbetweeners la doit non seulement à sa joyeuse immaturité mais aussi à la qualité de sa bande son.

15. Gossip Girl

Qualité de la Musique : 7,25/10
Utilisation de la musique : 4,5/10
Qualité de la série : 3/10
14,75/30

Allez, il ne faut pas avoir peur de le dire : si tu es une gonzesse, tu as probablement regardé Gossip Girl en mode plaisir coupable, complètement love to love de Chuck Bass. Et si tu es un mec, tu es tombé sur ta moitié qui regardait ça en scred, tu t’es un peu payé sa tronche, puis t’as vu le boule à Serena Van Der Woodsen (ou à Blair Waldorf, ou à Vanessa Abrams), t’en as profité et comme un couillon, tu t’es laissé avoir par ces histoires d’embrouilles entre gosses de riche de l’Upper East Side new-yorkais et t’as même eu envie de terminer tes mails par des xoxo de zoulette. Si tu es dans le déni, reconnais au moins que les rares fois où tu as regardé, tu as entendu de chouettes petits trucs. Certes, des tubes de poche pour la jeunesse hipstérisée qui se sape chez Asos et suit aveuglément tous ces groupes adoubés par Hype Machine (et qu’au fond de nous on aime tous un peu), mais des tubes de poche quand même. Puis bon, y’avait le boule à Serena Van Der Woodsen (ou le sourire ravageur de Chuck Bass, ok les filles), et rien que pour ça, ça valait la peine de savoir qui était Gossip Girl – il a quand même fallu attendre cinq saisons, bordel.