The Bestiary

Castle Rat

Blues Funeral – 2025
par Simon, le 25 novembre 2025
7

Imaginez un monde où le metal ne serait composé que par des hommes blancs, où il n'y aurait plus aucune notion de fun dans l'exercice et où la violence extrême aurait pris le dessus. Bien joué, c'est grosso modo le monde dans lequel le genre évolue depuis cinquante ans. Loin de nous l'idée d'analyser les raisons de cet entre-soi codifié, mais c'est un fait : les projets avec à leur tête des femmes ne courent pas vraiment les rues. C'est exactement là où Castle Rat débarque tel un bulldozer avec ses déguisements impeccables (un druide, un vicomte, un docteur de peste et une égérie erotico-barbaresque), ses chorégraphies parfaitement calées et son attitude théâtrale. Tout est calibré et pensé pour que les Américains crèvent le plafond de verre de l'underground en quelques albums. Et le résultat est immédiat : Riley Pinkerton, The Rat Queen, est devenue une icône, le groupe est booké partout et son deuxième album fait la couverture de la presse spécialisée.

Tout cela nous éloigne de la musique mais qu'on se rassure : ici aussi, le crime est parfait. On a cherché une manière intellectuelle et sérieuse de vous présenter la chose, mais le constat est finalement assez simple : tu prends Black Sabbath aux instruments, tu mets Lana Del Rey (ou Lady Gaga) au micro, tu ajoutes un imaginaire sword & sorcery à la Conan et tu obtiens le banger doom / heavy de 2025. Une sorte de roman épique, à l'image de sa pochette, qui sort son épée à chaque live, qui n'envisage sa narration que sous la forme du tube qui se chante à tue-tête. Attention, les intentions pop que l'on prête au groupe ne l'empêchent pas de jouer son doom de manière assez talentueuse, dans le respect du cahier des charges propre au rock occulte extrêmement premier degré, le tout dans une version un peu cartoonesque, inspirée de Donjons et Dragons, et livrée avec suffisamment d'humour pour ne pas sombrer dans le pastiche.

Un équilibre qui sonne comme instable mais qui fait tout l'ADN de Castle Rat. Le groupe incarne si fort son personnage qu'aucune faute de goût n'est à déplorer, que la navigation dans cet univers tragi-comique se fait avec toute la fluidité du monde, jusqu'à le doter d'une personnalité très forte. Difficile de dire quelle direction prendra la carrière de la reine des rats et de ses acolytes, mais au fond de nous, on se dit que le groupe américain peut probablement exploser à un niveau encore plus gros à condition de jouer pleinement la carte pop et de gonfler sa production en version Stade de France. En attendant cette consécration qui leur tend les bras, The Bestiary est aujourd'hui le disque idéal pour plier la tournée marathon dans laquelle ils se sont lancés, une carte de visite qui les place en bonne position pour aller jouer demain devant des publics peut-être moins habitués à porter des bâtons de Gandalf et des vestes à clous en festival. Xenia 2.0.